- Allemagne
- Michael Ballack
Ballack-listé de la Mannschaft
Joachim Löw a officiellement mis fin à la carrière internationale de Michael Ballack. Une carrière longue de onze ans, durant laquelle la Mannschaft s'est souvent retrouvée placée, mais jamais gagnante. Un peu à l'image de son ancien capitaine dans la vie de tous les jours, en fait.
« Les derniers mois ont montré qu’il y a beaucoup de jeunes joueurs qui se sont mis en évidence. Avec ces joueurs, l’évolution de l’équipe nationale s’est très bien déroulée depuis la Coupe du monde en Afrique du Sud. Lors de nos entretiens, j’ai eu l’impression que Michael Ballack a montré beaucoup de compréhension pour notre point de vue. De fait, une décision claire et honnête a été prise, et ce dans l’intérêt de tous. […] Durant une décennie, Michael Ballack a été un leader de l’équipe nationale et a une grosse implication dans les succès de l’équipe depuis la Coupe du monde 2002 » . C’est ainsi que Joachim Löw s’est exprimé lors de la dernière réunion de la DFB (la fédération allemande) pour expliquer pourquoi il n’appellerait plus Michael Ballack en sélection. Par ses propos, Löw met fin à une histoire cocasse de près de onze ans: car Michael Ballack et la sélection nationale, c’est un peu l’histoire du croque-mort qui emporte la tombe au cimetière: l’homme peut paraître lugubre, mais se révèle au final être indispensable.
Numéro 13
Avant même de jouer pour la Nationalmannschaft, Michael Ballack avait perdu: celui qui devrait être nommé capitaine en 2004 est né et a grandi en Allemagne de l’Est. Schizophrénie ambiante, donc incompatibilité, donc impossibilité de gagner. Quoi, Matthias Sammer? Il était roux, et comme tout le monde sait, moins et moins ça fait plus. Quoi, Ulf Kirsten? Le prénom est moche, faut pas le blâmer non plus. Mais, à la différence de Ballack, les deux autres célèbres joueurs made in RDA n’ont jamais été capitaines de la Mannschaft. Au-delà du brassard, Ballack, c’est surtout l’Allemagne qui ne gagne pas. Pour comprendre le pourquoi du comment, il faut remonter en avril 1999. Alors au 1.FC Kaiserslautern, sa première station « Wessi » , Ballack est convoqué par Erich Ribbeck pour jouer contre l’Ecosse, en match amical. A l’heure de jeu, le score est de 0-0. Ballack entre en lieu et place de Dietmar Hamann. Six minutes plus tard, l’Ecosse ouvre la marque par l’intermédiaire de Hutchinson. L’Allemagne s’inclinera sur le plus petit des scores. VDM.
L’Euro 2000 est la seule compétition à laquelle Ballack a participé et où on ne peut lui incomber aucune responsabilité. Au cours du naufrage allemand au Pays-Bas, le milieu n’aura évolué que 54 petites minutes. Pas suffisant pour retourner une situation, ni pour être responsable de quoi que ce soit. Par contre, dans toutes les autres, Michael Ballack aura brillé par sa présence ou son absence, mais sans succès au bout, bien entendu. Coupe du monde 2002: en poules, l’Allemagne se balade. A partir des huitièmes, ça devient plus technique. C’est là que le mental joue le plus, dit-on. Après une victoire étriquée face au Paraguay (1-0), la Mannschaft remet ça face aux Etats-Unis, puis en Corée du Sud. Le héros se nomme Michael Ballack, l’homme au numéro 13. Si ce nombre peut parfois porter chance, il arrive aussi que l’inverse se produise: Ballack se prend un carton jaune tout bête et rate la finale face au Brésil. L’Allemagne s’incline en finale. Bien sûr. Lors de l’Euro 2004, l’Allemagne se chie dessus, en se faisant sortir dès le premier tour. Dans ce nouveau naufrage à l’échelle européenne, seul Michael Ballack (une fois de plus) surnage. Alors que son équipe est éliminée d’entrée, lui fait partie du onze-type de la compétition. Homme étrange.
Une gifle à Podolski
Puis arrive la Coupe du monde 2006. LA compétition de Michael Ballack. Il a 30 ans. Il a été nommé capitaine par Jürgen Klinsmann après la déroute de 2004. Durant les quatre dernières années, il s’est bien éclaté du côté du Bayern, il est maintenant arrivé à maturité, prêt à remporter la compétition qui se joue à domicile. En plus, Ballack la fait dans le tragique, puisqu’il joue la compétition sur une jambe. Plus belle en serait la victoire, pourrait-on penser. Mais un mur se dresse: l’Italie. Un mur infranchissable. C’est bien simple: l’Allemagne, qui pourtant ne renonce jamais, aurait pu jouer vingt fois, cent fois ce match, elle ne l’aurait jamais gagné. Michael Ballack le sait, et, en posant son cul sur la pelouse de Dortmund, il comprend qu’il a grillé presque tous ses jokers, que gagner le titre suprême relève de l’improbable, voire de l’impossible.
C’est le début de la fin pour Ballack en sélection. Lors de l’Euro austro-helvétique, l’Allemagne arrive en finale plus grâce au sens tactique de Joachim Löw que grâce au capitaine Ballack, même si celui-ci marque le but de la victoire lors du troisième match de poule face au frère autrichien, le but qui permet aux Allemands de jouer les quarts. Mais une fois arrivé en finale, point de Ballack. Il faut dire qu’il avait une fois de plus décidé de la jouer tragique, j’ai bobo à la jambe, tout ça… Après cette compétition, clairement, Michael Ballack n’a plus de crédit au sein de l’équipe nationale. S’il est encore là, s’il est encore capitaine, c’est parce que l’Allemagne est en galère de leaders. Les Lahm et autres Schweinsteiger prennent certes de l’importance, mais l’aura de Ballack est encore puissante. Il n’empêche, l’influence du « Capitano » est remise en cause par les plus jeunes loups: en avril 2009, au Pays de Galles, lors d’un match de qualif’ pour la World Cup en Afrique du Sud, Lukas Podolski s’embrouille avec le numéro 13, et finit par lui coller une gifle. Les Allemands calment l’affaire comme ils peuvent, mais c’est fini: dans l’inconscient des Allemands, Ballack est définitivement condamné. Mais Löw compte toujours dessus pour la Coupe du monde; un peu par défaut, diront les mauvaises langues…
99e sélection ?
La suite est pour Ballack aussi déprimante qu’un suicide collectif: dernier match avec la Mannschaft ponctué par une défaite 1-0 face à l’Argentine, blessé par KP Boateng, éclosion d’un Khedira, émergence d’un Schweinsteiger, Lahm capitaine, jeu plaisant à voir, Allemagne troisième de la World Cup. Pendant ce temps, Ballack est un peu comme le type démuni après que les huissiers sont passés. On lui a tout pris. Il se remet alors sur pied, et la joue comme le mec qui veut se remettre avec son ex: il se rapproche d’elle (il revient en Allemagne, à Leverkusen) et multiplie les appels du pied. Löw, lui, joue le rôle de celle qui n’en a rien à foutre: il continue de l’ignorer. Puis promet de prendre une décision. Puis, rien. Puis à nouveau promet d’en reparler avec lui. Pour finalement lui annoncer, au bout d’une saison au cours de laquelle Ballack s’est traîné pour revenir en forme, que ce ne serait pas la peine, finalement. Mais quand même, Löw tient à remercier l’homme pour tout ce qu’il a fait: « Il va de soi que nous voulons remercier Michael Ballack pour tout ce qu’il a fait pour l’équipe d’Allemagne et lui dire au revoir de la plus belle des manières » . Une participation en amical face au Brésil en août prochain serait à l’étude. Pas sûr que Ballack accepte pour autant: bah ouais, il s’agirait là de sa 99ème sélection. A une sélection du symbole. Du Ballack dans toute sa splendeur.
Ali Farhat
Par