- C3
- Finale
- Chelsea-Arsenal (4-1)
Arsenal, bonne nuit les petits

Pour la première fois en finale de Coupe d'Europe depuis 2006, les Gunners avaient l'occasion de démontrer qu'ils avaient enfin grandi sous la houlette d'Unai Emery, là où les dernières années du mandat d'Arsène Wenger à Londres avaient été celles d'une équipe immature et vide de caractère. Un raté sur toute la ligne : à Bakou, Arsenal s'est incliné sans gloire, ni hargne, ni panache.
La demi-volée d’Iwobi, qui venait réduire le score à la 71e minute, n’aura donc presque rien signifié. À peine une étincelle, un début de frémissement. Arsenal était alors mené trois buts à un, allait bientôt encaisser un quatrième pion d’Hazard, sans même parvenir à marquer un dernier pour sauver l’honneur, face à une défense des Blues qui laissait pourtant des boulevards et avait probablement déjà la tête aux festivités d’après-match. Pour les supporters des Gunners subsistait alors seulement ce sentiment de résignation, ce fatalisme inhérent au club du nord de Londres, qui lui colle à la peau comme une malédiction. Comme si Arsenal était destiné à ne pas gagner cette finale de C3.
La lose collée au corps
Il y a bien sûr cet ensemble de choses qu’on appelle l’histoire, la culture club, qui fait depuis trop longtemps défaut aux Londoniens. Car Arsenal reste tout simplement sur quatre défaites de rang lors des finales de coupes européennes : les Gunners ont successivement échoué sur la dernière marche de la C2 en 1995, celle de la C3 en 2000, de la C1 en 2006 et viennent donc de passer à côté du rendez-vous du sommet de cette Ligue Europa cuvée 2019. Mais plus que cette interminable spirale de la lose, c’est la manière qui interpelle.
En tournant la page Wenger et en ouvrant une nouvelle ère pilotée par Unai Emery, Arsenal voulait entamer un tout nouveau cycle. Changer de style de jeu, d’état d’esprit, renouveler le logiciel usé de son football et de son image de club tendance Bisounours, tenant d’un football agréable, mais qui souffrait d’un déficit évident d’aspérité, de vice, de combativité. Personne n’oublie les paroles provocatrices – mais porteuses d’une forme cruelle de vérité – de Patrice Évra, au soir d’une demi-finale retour de la Ligue des champions remportée par Manchester United face à Arsenal en 2009 (1-3) : « Ce soir, c’était onze hommes contre onze enfants. » Dix ans plus tard, les enfants n’ont pas grandi.
Forever young
Comment expliquer, sinon, le match aussi décousu que maladroit de la doublette d’attaque londonienne, Aubameyang-Lacazette, qui avaient pourtant inscrit à eux deux les huit derniers buts d’Arsenal en Ligue Europa ? Les errances de Kolašinać sur son couloir gauche, porté disparu dans le jeu ? Le naufrage de Monreal et Koscielny derrière en seconde période, comme paralysés par le premier but des Blues inscrit par Giroud, d’une tête piquée millimétrée ? Quand le Français a ouvert le score, Arsenal a comme cessé d’exister. De quoi permettre à Chelsea de planter deux autres pions à l’heure de jeu, soit un total de trois banderilles en quinze minutes, et d’assassiner le suspens.
À ce titre, l’attitude des Gunners, qui n’ont jamais donné l’impression de se rebeller, de croire réellement à un hypothétique retour, tranche cruellement avec l’air du temps d’un football européen où la notion de remontada est en passe de devenir une superbe banalité. Mais Arsenal avait-il seulement les moyens de sonner la révolte avec Özil en meneur de jeu, comme souvent lost in translation dans les matchs à enjeu, Xhaka pour réguler l’entrejeu et plus globalement un onze type qualitativement deux crans en dessous de celui de Chelsea ? Peut-être pas, mais un peu plus d’insoumission face à l’ordre établi n’aurait sûrement pas pu faire de mal aux Gunners. Qui quittent la scène européenne cette saison l’âme en peine, comme Lucas Torreira au moment de laisser sa place à Iwobi à la 67e minute de jeu. L’Uruguayen pleurait à chaudes larmes. Exactement comme un enfant.
Les finales de Ligue Europa et de Ligue Conférence ne seront pas diffusées en clairPar Adrien Candau