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Allemagne-Ghana (2-2) : le top match du Mondial 2014 !

Par Chérif Ghemmour
Allemagne-Ghana (2-2) : le top match du Mondial 2014 !

S'il fallait désigner « le plus beau match » de la Coupe du monde 2014, pourquoi ne pas élire cette partie fabuleuse du premier tour entre la Nationalmannschaft et les Black Stars ? Le seul match où les futurs champions du monde ont été menés au score et sont passés pas loin de la correctionnelle…

Blacks Stars contre Trois Étoiles

Bien sûr, il y a eu Pays-Bas – Espagne (5-1) et l’entrée en matière tonitruante de ce Mondial 2014. Il y eut aussi Allemagne-Brésil (7-1) match couperet au déroulement un peu irrationnel, mais révélateur de l’imposture brésilienne. Et puis Uruguay-Angleterre (2-1), Pays-Bas-Australie (3-2), Costa Rica-Uruguay (3-1), France-Suisse (5-2), Belgique-USA (2-1 a.p), Allemagne-Algérie (2-1 a.p), etc. Mais l’intensité rare, l’opposition de styles, le foot débridé, les actions allant d’un but à l’autre, le suspense jusqu’au bout, l’extrême correction des 26 acteurs, les buts et les occasions de buts, les couleurs chamarrées et l’équilibre des forces qui pousse à une partie indécise… Tous ces ingrédients très recherchés, on les a retrouvés lors de cet Allemagne-Ghana, malgré une première mi-temps un peu déclinante.

Ce groupe G (avec Portugal et USA) était aussi un de ces « groupes de la mort » où tout pouvait arriver, comme ce match entre Africains et Européens l’a démontré. C’était aussi un 21 juin, solstice d’été et jour le plus long. Inoubliable, donc… Les Ghanéens étaient entrés dans le tournoi de la pire des façons en perdant stupidement 1-2 face à une bonne équipe des USA qui ne lui était pas supérieure. À cause d’un but idiot encaissé dès la première minute de jeu (Clint Dempsey, 0-1) et un autre à la 86e inscrit par John Brooks. Et dire que quatre minutes avant, André Ayew avait égalisé pour les Blacks Stars (1-1), laissant espérer au moins le point du match nul… Dans l’autre rencontre de ce groupe G, l’Allemagne avait flingué le Portugal 4-0 et confirmait un statut de co-favori de ce Mondial brésilien. Comme tous les deuxièmes matchs de premier tour des grandes compètes internationales, la rencontre Allemagne-Ghana s’annonçait décisive. Une victoire, et l’Allemagne se qualifiait quasi direct pour les 8es avec 6 points au compteur et son + 4 amélioré qu’elle avait récolté contre Lusitania. Une défaite et le Ghana retournait en Afrique…

Le Ghana en chantant et enchantant

On se retrouve donc à l’Estadio Castelao de Fortaleza, Nordeste. À 16 heures, l’enceinte mi-ombragée, mi-ensoleillée est très garnie (51 000 gus et gusses), du fait d’une colonie allemande nombreuse. Or, la chaleur est torride. Avantage Ghana, habitué à ce genre de météo ? Pas sûr. La Nationalmannschaft a prouvé tout au long de son histoire qu’elle savait s’acclimater aux rigueurs polaires européennes, à la fournaise mexicaine (1970 et 1986) ou bien à l’humidité asiatique (2002). Mais, autant le dire de suite : dans ce deuxième match de Coupe du monde qui débute, l’Allemagne va quand même souffrir du chaud-chaud-chaud… On devine les Ghanéens hyper stressés avant d’aborder ce match machette. Même pas ! La réalisation TV brésilienne nous les montre arrivant en polos blancs aux vestiaires, avec la banane jusque-là en train de chanter aux rythmes des percus. Asamoah Gyan et André Ayew dirigent la petite chorale. Des images à chialer.

Oubliés les p… de casques audio et les tronches de mort des autres footeux qui arrivent au stade… En fin de troupe, on reconnaît Kevin-Prince Boateng, l’air un peu pincé. Il faut dire qu’il joue gros cet aprèm. Entré comme remplaçant contre les USA il a ensuite revendiqué et obtenu du sélectionneur James Kwesi Appiah une place de titulaire contre l’Allemagne. Ah, l’Allemagne ! C’est sa deuxième patrie. Comme son demi-frère, Jérôme Boateng, il est né à Berlin d’un père ghanéen et d’une mère allemande. Accessoirement, après avoir joué pour le Hertha et Dortmund, il est revenu au pays après le Milan AC pour se poser à Schalke depuis 2013. Toute l’Allemagne guette l’affrontement entre Kevin-Prince et son cadet, Jérôme, titularisé lui aussi. Mais autant Jérôme fait l’unanimité en sélection après s’être fait une place au Bayern, autant Kevin-Prince inspire la méfiance au Ghana : en 2011, il a laissé tomber la sélection… pour y revenir en 2013 afin de pouvoir participer à la Coupe du monde au Brésil !

L’Allemagne flippée

Et c’est parti ! L’arbitre brésilien Sandro Ricci lance ce match qui, très rapidement, part sur les mêmes bonnes bases que toutes les autres premières rencontres de ce Mondial pour l’instant de toute beauté. Les Allemands sont en blanc linceul, et les Ghanéens arborent leur magnifique kit fruits rouges. Joachim Löw a reconduit en 4-3-3 /4-1-4-1 les 11 qui ont torpillé Lusitania : Thomas Müller en pointe, soutenu par Mario Götze et Mesut Özil. Toni Kroos et Sami Khedira sont associés à la récupération. Avec Philipp Lahm, sentinelle devant la défense. Côté africain, James Appiah a opté pour un 4-2-3-1 qui place Boateng au poste clef derrière Gyan en pointe, le gardien Fatau Dauda ayant pris la place d’Adam Kwarasey. Après un bon début allemand, avec un Özil en jambes dans le couloir droit et un Lahm offensif, le Ghana impose petit à petit son milieu renforcé. À la 13e, Kevin-Prince Boateng joue sur Christian Atsu qui déclenche une frappe sèche du pied gauche que Manuel Neuer repousse difficilement.

À tour de rôle, les deux équipes tentent de trouver la faille sur un rythme qui se ralentit du fait de la chaleur générale et de la peur qui gagne peu à peu les Blancs. Car les Ghanéens sont là pour vaincre : avant la rencontre, le guerrier André Ayew s’était dit « prêt à mourir pour la nation » . Rien que ça… À la 32e, Sulley Muntari bazarde une demi-volée du gauche ! Manu Neuer doit se détendre en renvoyant des deux poings ! Joachim Löw a le masque aussi pâle que sa chemise : ses gars montrent des signes évidents de fébrilité. Et revoilà Gyan qui s’échappe côté gauche… Il pénètre dans la surface où il est stoppé in extremis par la sortie de Neuer ! La Mannshacht n’est pas non plus à la rue, mais elle n’y est pas vraiment : sur un service d’Özil, Mario Götze, à droite de la surface ghanéenne, reprend d’une volée trop molle de l’extérieur du pied droit captée par Fatau Dauda (38e). Dix minutes plus tôt, Khedira avait aussi écrasé sa frappe, sans conviction. La première mi-temps s’achève de façon un peu décevante, car sans but. Le Ghana mène aux points, et l’Allemagne inquiète. On sent que pour aller loin, elle va devoir mieux colmater derrière et mieux blinder au milieu.

Deuxième mi-temps à 100 à l’heure !

D’entrée de seconde période, le duel des Boateng perd un combattant : Jérôme, mal à l’aise en latéral droit, laisse sa place à Shkodran Mustafi, le défenseur de la Sampdoria. Le jeu a repris sur des bases moyennes quand, à la 51e, Thomas Müller centre de l’aile droite devant le but ghanéen : Mario Götze, entre deux défenseurs, reprend de la tête puis de la cuisse gauche (!). Fatau Dauda est battu : 1-0 ! Un avantage un peu contre le cours du jeu, au vu de la première mi-temps ? En tout cas, la Mannschaft exulte, à l’image de Joachim Löw bras levés au ciel. L’Allemagne est en 8es : 6 points et + 5 ! Le Ghana est à ce moment-là éliminé. Appiah sort alors le dernier des Boateng, Kevin-Prince, ultra décevant et qui ne méritait pas d’être titulaire. Avec l’entrée à sa place de Jordan Ayew, c’est à un autre récital de frangins qu’on va assister, celui des frères Ayew. Car à partir de cette 53e minute, le match va décoller à la verticale et atteindre des sommets…

À la 54e, Harrison Afful signe un centre de la droite vers « André de l’OM » , coincé entre Mertesacker et Mustafi, qui place une tête croisée dans le petit filet droit de Manuel Neuer, battu à la détente : 1-1 ! André Ayew explose de la même joie extatique que Gigi à Séville 82… contre la RFA ! Désormais la marée rouge submerge la côte blanche : Muntari frappe même des 30 mètres. Au dessus. Joachim Löw flippe en envoyant Schweini s’échauffer sur le bord de la touche. Au Mondial 2010, Joachim n’a certainement pas oublié que sa Mannschaft avait péniblement battu les Blacks Stars au premier tour (1-0). On joue la 63e, et les Rouges sont partout : au milieu, Philipp Lahm se fait chourer le ballon par Sulley Muntari qui sert Gyan dans l’espace. L’ex-Rennais lancé profond vers la droite de la surface décoche un tir croisé du pied droit qui fusille Manuel Neuer : 2-1 ! Le stade chavire… Dans la surface allemande, Gyan Asamoah lance alors la célèbre Azonto Dance : les Ghanéens s’alignent, remplaçants compris, en se balançant d’une jambe sur l’autre et en roulant des épaules ! L’Allemagne est KO. Malgré le gros contingent de supporters germaniques, on est au Brésil, et, dans les tribunes, la fraternité « de couleur » accompagne l’équipe africaine.

Miro, quinzième !

Les Allemands sont désormais à la rue physiquement… Jordan Ayew en profite alors à la 66e pour s’échapper côté gauche (encore à gauche), mais il choisit l’option individuelle en frappant du droit un tir bloqué par Manu, alors qu’Asamoah Gyan, mieux placé, réclamait le ballon ! Occasion énorme : à 3-1, c’était plié pour les Rouges, et pour les Blancs, les 3 points et le petit +2 les auraient mis en grande difficulté pour leur dernier match face aux États-Unis… Il est alors temps d’agir pour Löw qui va tenter un des plus beaux coups de coaching de cette Coupe du monde. À la 69e, il effectue un double changement : Sami Khedira laisse sa place à Bastian Schweinsteiger et Mario Götze est remplacé par Miroslav Klose.

Et c’est ce bon vieux « Miro » (36 ans) qui va sauver la Nationalmannschaft deux minutes après son entrée en jeu. Sur un corner frappé à gauche par Toni Kroos, Benedikt Höwedes dévie de la tête et sur sa droite dans la petite surface : Klose se jette au deuxième poteau et marque du pied droit ! Un but de renard estampillé « Deutsch Qualität » qu’on a vu des dizaines de fois dans le passé : Seeler (1958), Weber (1966), Müller (1970 et 1974), Rummennigge (1982), Völler (1986), Klinsmann (1996), Klose (2002). Des buts de raccroc, mais qui n’en sont pas pour les attaquants allemands. Tant que le ballon est en jeu, dans les limites du terrain et que le chronomètre tourne encore, ils plantent ! Avec sa 70e réalisation en sélection, Miroslav Klose égale à ce moment le record de Ronaldo et ses 15 buts marqués en Coupe du monde. Et ça vaut bien un salto !

À la mort subite !

Mais le match n’est pas fini… Avec une Allemagne requinquée et un Ghana qui veut les trois points (entrées des milieux Wakaso et Agyemang-Badu aux 73 et 78es), ça repart d’un but à l’autre. 84e : Toni Kroos sert dans la profondeur et dans la surface Thomas Müller qui est repris et contré sur le fil par Kwadwo Asamoah, auteur d’un retour express… Réplique ghanéenne à la 87e : une frappe bien partie de Jordan Ayew force Neuer à se coucher. Manque de puissance, dommage. Deux minutes plus tard, bien servi par Philipp Lahm, Klose se retrouve en position favorable dans la surface ghanéenne : il va marquer ! Nooon : Miro ne cadre pas son tir du pied droit à ras de terre qui file à droite du but de Fatau Dauda.

Ultime minute… Contre des Ghanéens en supériorité numérique, à trois contre deux défenseurs allemands. Mais Emmanuel Agyemang-Badu joue mal le coup et joue sur Mubarak Wakaso signalé hors-jeu ! La Nationalmannschaft revient de très loin… Encore cinq minutes d’arrêts de jeu, alors qu’on voudrait que ça dure toute la nuit. Sulley Muntari chope un jaune à la 94e pour une charge sur Toni Kroos. Ce sera le premier et seul avertissement d’un match exemplaire joué dans la plus correcte sportivité. Mais Muntari sera suspendu contre le Portugal. Sur le coup franc centré par Toni Kroos, Thomas Müller et John Boye se télescopent violemment. Müller gît à terre, le visage ensanglanté. Ce sera le dernier temps fort d’un match épique qui s’achève sur le traditionnel échange des maillots. Les Allemands serpillères sont car-bo-ni-sés et les Ghanéens sont rincés, héroïques et déçus, mais encore en course. Mario Götze a été désigné « Homme du match » (un avant-goût de la finale face à l’Argentine ?).

Épilogue

Côté allemand, le statut de favori en a pris un coup : cette Mannschaft encaisse des buts, Neuer n’est pas invincible, et la terreur Thomas Müller peut connaître des jours sans. Mais l’Allemagne finira bien leader de ce groupe G en battant petitement les USA (1-0). Löw tirera progressivement les leçons de cette rencontre contre le Ghana en replaçant d’abord Boateng dans l’axe défensif. Contre la France en quarts, il l’associera même à Hummels, et il remettra Lahm en latéral droit et misera sur Klose en avant-centre, laissant toute latitude offensive à Thomas Müller. Ayant vu momentanément la mort en face (à 1-2), la Mannschaft avertie du danger cinglera vers la victoire finale. Côté ghanéen, le sommet de ce 21 juin à Fortaleza laissera place à une triste descente en enfer, si commune aux nations africaines (et aux Bleus de Knysna ?).

Le 24 juin, des journalistes anglais révèlent une sale affaire de match amical truqué impliquant le Ghana (score arrangé, arbitres corrompus et paris illégaux)… Le 26 juin, le gouvernement ghanéen envoie 3 millions de dollars en cash par avion spécial et convoi blindé aux Black Stars en paiement de primes de qualif diverses… 26 juin, toujours : à quelques heures du crucial Portugal-Ghana, Kevin-Prince Boateng et Sulley Muntari sont exclus de leur sélection : le premier a agressé physiquement un membre du staff lors d’une séance d’entraînement, le second a insulté son sélectionneur Kwesi Appiah ! Battu par le Portugal (1-2), le Ghana est éliminé dès la phase de groupes de la Coupe du monde. Après le match, Asamoah Gyan insultera un journaliste de Rfi, puis s’excusera le lendemain… Après le Mondial, le 12 septembre, le bon coach Appiah viré pour mauvais résultats en qualifs de la CAN 2015 (le Ghana se qualifiera quand même)… Dans le cœur de l’Afrique du foot, l’Algérie remplacera le Ghana après un 8e de toute beauté, perdu contre l’Allemagne (1-2 a.p). Et vous, au fait… C’est quoi votre « plus beau match de la Coupe du monde 2014 » ?

Après la trêve internationale, place au festin !

Par Chérif Ghemmour

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