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« Footballeur, tu es une honte ! » Par Fernando Aristeguieta

Par Fernando Aristeguieta
«<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Footballeur, tu es une honte !<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>» Par Fernando Aristeguieta

Passé par Nantes et le Red Star, l'international vénézuélien Fernando Aristeguieta évolue désormais au CD Nacional Funchal, en D1 portugaise. Et quand il n'est pas sur un terrain, l'attaquant écrit.

« Vous devriez avoir honte, vous n’avez pas honte ! Bande de fils de pute ! » Voilà comment nous avons été reçus au retour de notre avant-dernier match, que nous jouions à l’extérieur. Il était minuit passé un samedi soir, et au siège du club où nous avions tous laissé nos voitures, un groupe de 6 ou 7 messieurs, la cinquantaine bien tassée, visiblement avinés, nous attendaient pour nous insulter. Le résultat du match nous laissait bien mal en point dans notre lutte pour le maintien.

Le sportif professionnel est exposé à ce que celui qui le désire puisse voir une petite partie de son travail. Cette petite partie est en réalité la plus décisive, puisque c’est celle qui concrétise le travail en soi. C’est le jour de la compétition. Dans le cas du football, ce sont les matchs qui, une à deux fois par semaine, viennent « valider » ce travail. Derrière la compétition, il y a toute une méthodologie à suivre pour être prêt le jour J. Une méthodologie qui implique les entraînements, la préparation du match en tant que tel et toute une série de sacrifices qui consistent de façon basique dans le repos et le régime.

Je me permets de les appeler sacrifices, puisqu’il s’agit là d’actes indésirés, que le sportif doit réaliser en amont de son travail. Ce n’est pas que je n’aime pas manger sainement, mais à de nombreuses reprises, vient l’envie de manger ou boire autre chose, et il faut se conformer à la diète de l’athlète et à l’eau qui, croyez-moi, à certains moments devient ennuyeuse.
Les après-midi à la maison, où il faut rester calme au lieu de sortir en ville faire ce dont tu as envie sont tout aussi pénibles. Bien sûr, il y a des fois où la fatigue t’empêcherait de toute manière de sortir, mais il y aussi des jours où tu peux sortir sans aucun problème. Tout réside dans la connaissance de son corps. Ce qui est certain, c’est que le joueur doit tout faire pour que son corps soit le plus proche possible de 100% pour le jour d’après et que cela exige ces sacrifices.

Certains joueurs incluent également l’entraînement en soi dans la liste de ces sacrifices, mais ça n’est pas mon cas, ni celui de la majorité des joueurs avec qui j’ai pu joué. Il y a donc ces sacrifices relatifs à la préparation, mais il y a aussi le sacrifice qui consiste à quitter sa famille pendant un mois durant la pré-saison et les jours d’avant-match puisque la plupart des équipes obligent leurs joueurs à se concentrer à l’hôtel pour mieux préparer le match.

Seules les familles des joueurs, et quelques autres sont au courant de ce que tout cela signifie. Pour les yeux du supporter lambda, il n’y a que les 90 minutes que durent le match. Et la plupart du temps, ce supporter lambda émettra un jugement péremptoire sur le travail du footballeur en fonction du résultat du match, sans prendre rien d’autre en considération. Très souvent, ce jugement est négatif et vient accompagné d’insultes envers les joueurs et leurs familles qui doivent les supporter sans pouvoir rien faire.

Tout le travail du footballeur est réalisé dans le but d’être un meilleur joueur. Si un joueur s’améliore personnellement, immédiatement il rend l’équipe meilleure. Et si l’équipe s’améliore, les chances de gagner augmentent. Par conséquent, le travail du footballeur consiste à être le plus utile possible pour que l’équipe gagne. Cela posé, je m’interroge : est-il possible que quelqu’un désire davantage la victoire que le joueur lui-même ? À part peut-être l’entraîneur oo le président qui se voient directement touchés par le résultat eux aussi ? Je ne le crois pas.

Parce que j’ai évoqué auparavant en quoi consistait le travail des footballeurs et j’ai parlé du fait que ce travail avait pour unique mission d’aider l’équipe à gagner, mais je n’ai pas évoqué le plus important : les conséquences du bon ou du mauvais travail du joueur.

Quand les choses ne fonctionnent pas collectivement, le joueur – et je dois reconnaître que l’entraîneur à un degré encore supérieur – est perdant dans tous les sens. Quand le match est perdu, le footballeur est immédiatement affecté puisqu’il a préparé durant toute la semaine quelque chose qui n’a pas marché. Souvent, tu n’as même pas la chance de pouvoir entrer sur le terrain, et tu dois te résigner depuis le banc de touche ou la tribune à voir ton coéquipier jouer. Pour donner un exemple, c’est comme si un ingénieur préparait toute la semaine une présentation, mais qu’au moment de la présenter à ses chefs, ceux-ci lui disaient aux portes de la salle de réunion qu’il n’allait pas exposer son projet, mais qu’un compagnon présenterait le sien à la place. Et l’ingénieur doit se résigner à voir à travers la vitre de la salle de réunion comment son compagnon s’en sort. Dans ce cas, la frustration et la douleur sont décuplées. Puisque c’est en réalité une double défaite.

Un vestiaire est normalement un endroit de rires et de joie, mais la tristesse que j’ai vue et ressentie dans certains, je ne l’ai jamais sentie ailleurs, pas même lors d’enterrements. Lorsque tu vas à un enterrement, tu sais que tu devras composer avec la tristesse. Tu vas te préparer pour cela en quelque sorte. Dans le vestiaire à l’inverse, la tristesse est spontanée, elle remplace la joie que tu avais imaginée toute la semaine. C’est une tristesse collective très contagieuse, puisque la plupart du temps, tu te sens réellement connecté à ceux qui sont assis à tes côtés, et connecté au maillot que tu portes. Mais cette frustration et cette douleur sont éphémères, puisque deux jours après ou parfois quelques heures plus tard, il faut oublier ce qu’il s’est passé et préparer le match suivant. Mais quand les mauvais matchs s’enchaînent continuellement et que les objectifs collectifs ne sont pas atteints, le joueur perd beaucoup plus que cette éphémère et intense tristesse.

Dans notre cas, ne pas atteindre cet objectif collectif suppose descendre en deuxième division. Et la relégation apporte des conséquences négatives qui signifient un net recul pour nos carrières et par ricochet pour nos vies : entre autres, jouer devant un public moindre dans des stades en moins bon état, moins de couverture télévisuelle, une perte de prestige, des salaires considérablement réduits. Et même quand tu as la possibilité de partir, tu devras quitter une ville qui te plaît et tu seras dans une situation défavorable pour négocier un nouveau contrat. Cela posé, je répète ma question : est-il possible que quelqu’un désire davantage la victoire que le joueur lui-même ?

Sans aucun doute, certains pensent que oui, puisque sinon ils ne nous couvriraient pas d’insultes injustes que nous et surtout nos familles doivent subir. L’exemple parfait de la disproportion avec laquelle est jugé le travail du footballeur est l’interdiction tacite de sortir pour aller boire un verre un soir de défaite. Si je devais à nouveau prendre un exemple, c’est comme si tu disais à un vendeur de téléphones qu’il ne pouvait pas sortir un vendredi soir parce qu’il n’avait pas vendu suffisamment pendant la semaine, et qu’il devait rester à la maison pour ressasser tout ce qu’il aurait pu faire pour changer cela. Ou si tu demandais à un agent immobilier comment il avait osé sortir dîner alors qu’il n’avait pas pu conclure la vente d’un appartement dans l’après-midi.

Ce que je veux manifester à travers ces quelques lignes, c’est simplement que le footballeur est le principal intéressé à gagner, simplement parce que sa vie tourne autour de cela et que son futur et celui de sa famille en dépendent. C’est pour cela que je juge injustes et disproportionnées les réactions que nous devons parfois supporter. Évidemment, c’est un sujet bien plus profond que ce que je viens d’exposer. Mais je vous laisse ici ma brève opinion.

Émerse Faé : « J'ai juste fait mon travail »

Par Fernando Aristeguieta

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