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Nounkeu : « En Turquie, les avantages fiscaux sont réels »

Propos recueillis par Alexis Billebault
5 minutes
Nounkeu : « En Turquie, les avantages fiscaux sont réels »

L’ancien défenseur de Toulouse et de Metz Dany Nounkeu évolue depuis huit ans en Turquie (Gaziantepspor, Galatasaray, Beşiktaş, Bursaspor, Karabükspor), en dehors d’une saison passée à Grenade (Espagne) puis Évian Thonon Gaillard en 2014-2015. L’international camerounais (32 ans), qui évolue désormais à Akhisarspor, a vu ce championnat évoluer et devenir un des plus attractifs d’Europe. Ce mercredi soir, il se déplace au Galatasaray en demi-finale retour de Coupe de Turquie (défaite 1-2 à l'aller).

Il y a huit ans, en août 2010, vous quittiez Toulouse pour Gaziantepspor, un modeste club turc. Que saviez-vous du championnat de Turquie ?Pas grand-chose. Je connaissais bien sûr de noms les principaux clubs que sont Beşiktaş, Fenerbahçe et Galatasaray, mais c’était à peu près tout. D’ailleurs, je n’avais pas eu trop le temps de me renseigner. À Toulouse, j’avais compris qu’on ne comptait plus sur moi, et je n’avais pas beaucoup de temps pour me retourner. On m’a parlé de Gaziantep et je n’avais pas beaucoup d’offres. C’était la plus concrète. Évidemment, si on m’avait proposé la Turquie un ou deux ans plus tôt, j’aurais sans doute hésité. Mais à cette époque, ma femme était enceinte, il fallait donc que je trouve un club rapidement. Je savais qu’il y avait pas mal de joueurs étrangers en Turquie. Je ne débarquais pas n’importe où.

Quelles furent vos premières impressions ?Il faut un peu de temps pour s’adapter. Quand je suis arrivé, j’étais le seul francophone. Je communiquais donc en anglais, comme les autres étrangers. Le coach, au début, ne me faisait pas beaucoup jouer. Je pouvais me faire une idée du niveau du championnat. Je ne comprenais pas ceux qui disaient que le championnat turc était exotique, que c’était pour y terminer sa carrière tranquillement, en prenant un peu d’argent. Il y avait de très bons joueurs étrangers, comme les Portugais Hugo Almeida et Ricardo Quaresma au Beşiktaş, Mamadou Niang et le Brésilien Alex à Fenerbahçe… Et puis, les Turcs sont fous de foot. J’ai vite compris que la pression était énorme.

En quoi avez-vous vu le championnat turc progresser ?Les clubs sont pour la plupart bien structurés. Bien sûr, les trois grands d’Istanbul sont au-dessus, car ils ont de très gros moyens.

Bien sûr, les trois grands d’Istanbul sont au-dessus, car ils ont de très gros moyens. Il y a parfois un fossé entre eux et d’autres équipes, mais c’est le cas partout ou presque en Europe, non ?

Il y a parfois un fossé entre eux et d’autres équipes, mais c’est le cas partout ou presque en Europe, non ? Évidemment, avec les arrivées de joueurs encore plus confirmés, le niveau s’est amélioré. Techniquement, mais aussi tactiquement. C’est un point sur lequel les équipes ont vraiment progressé. Pas physiquement, car il y a huit ans, c’était déjà un des points forts du championnat. Si un pays parvient à attirer des joueurs comme Van Persie, Drogba, Gomis, Belhanda, Valbuena et d’autres, ce n’est pas par hasard. Un jour, Didier Drogba m’avait avoué être surpris de l’intensité lors des matchs et de la qualité du jeu. Pour moi, la Süper Lig fait partie des dix meilleurs championnats européens, derrière bien sûr l’Angleterre, l’Allemagne, la France, l’Espagne et l’Italie.

Vous parliez de la passion et parfois des excès des supporters turcs. Les récentes mesures prises pour lutter contre la violence ont-elles partiellement vidé les stades ?Ça dépend. Il y a parfois un peu moins de monde qu’avant dans certains stades. Pour les grosses affiches, en revanche, c’est toujours plein. Et l’ambiance reste incroyable. Un derby à Istanbul, c’est quelque chose. Il y a beaucoup moins d’incidents dans les stades aujourd’hui, et c’est tant mieux. Les abords des stades sont très sécurisés. Mais en Turquie, la pression est quotidienne. Après une défaite, il vaut mieux ne pas trop se montrer pendant deux ou trois jours. C’est parfois un peu étouffant. Et même dans la vie de tous les jours, quand tu es joueur, tu es très sollicité. Parfois, tu sors avec ta femme et tes enfants et tu vois trois ou quatre mecs arriver vers toi, et tu ne sais pas vraiment ce qu’ils veulent. La plupart du temps, c’est bon enfant, ils n’ont pas de mauvaise intention.

Les clubs turcs ont aussi une mauvaise réputation, celle qui consiste à payer les salaires avec retard…Il peut y avoir des problèmes de temps en temps. Mais c’est devenu très rare. Si des joueurs comme Gomis, Belhanda, Kameni, etc., sont venus ici, c’est aussi parce qu’ils avaient des garanties. Si tu ne payes pas dans les temps, ça va se savoir et les étrangers hésiteront à venir. Moi, j’ai parfois connu des retards dans le versement de mes salaires, mais aujourd’hui, tout va bien.

Financièrement, la Turquie reste-t-elle une destination intéressante ?Oui, car c’est du net d’impôt. Les avantages fiscaux sont réels.
Cet afflux de joueurs étrangers ne devrait donc pas se tarir…Non. La Turquie a fait évoluer le quota des joueurs étrangers autorisés par club. Il est passé de six à neuf, puis de neuf à quatorze. Plus il y a de très bons joueurs qui ont décidé de venir, plus il y en aura ! C’est logique. À partir du moment où le championnat est d’un bon niveau, que les clubs sont bien structurés et que les salaires sont bons, cela va obligatoirement en attirer d’autres.

La Turquie a été la cible de plusieurs attentats et le climat politique interne est tendu, depuis le coup d’État de 2016. Ces questions sécuritaires ont-elles pu dissuader des étrangers d’y venir ou d’en partir ?Il y a bien sûr eu de l’inquiétude face à ces évènements.

Beaucoup de pays ont été frappés par les attentats. La Turquie l’a été. Mais où est-on vraiment en sécurité aujourd’hui ?

Beaucoup de pays ont été frappés par les attentats. La Turquie l’a été. Mais où est-on vraiment en sécurité aujourd’hui ? Je ne sais pas si cela a dissuadé des joueurs de venir poursuivre leur carrière ici, mais quand on voit ce qui est arrivé l’été dernier, je ne le pense pas. Peut-être que d’autres ont pensé partir. Mais je ne ressens aucune crainte de la part des joueurs étrangers avec qui je parle. Ici, la vie est normale, on ne se sent pas en danger. Le risque zéro n’existe pas.

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