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L’Étoile rouge, la passion comme pétrole

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L’Étoile rouge, la passion comme pétrole

Belgrade, c’est le royaume de Serbie, l’Empire ottoman, l’Empire austro-hongrois, le royaume de Yougoslavie, la Yougoslavie communiste et enfin la nouvelle Serbie. C’est la victoire en Ligue des champions en 1991 et le bombardement de l’OTAN huit ans plus tard. C’est l’affaire Brice Taton, le drame, mais aussi le recueillement de toute une ville pour dire non à la violence. C’est à la fois « Hellgrade » et « le New York slave ». C’est complexe, donc. Et de cette complexité est en train de naître un nouveau Belgrade. Une capitale où les terrasses des cafés sont remplies du matin au soir, où les masses parlent anglais et où la jeunesse, par la force d’un entrepreneuriat osé et d’un enthousiasme dévorant, prend le pouvoir. Une ville où vit l’un des clubs les plus prestigieux de l’histoire du football européen : l’Étoile rouge de Belgrade. Rencontre, à la veille du « Derby éternel » qui l’opposera demain au Partizan.

« Nous, l’Étoile rouge, on se compare au Real Madrid, à Manchester United, à l’Inter Milan… »

Sur la route qui mène de l’aéroport au stade, les affiches de Novak Djokovic sont omniprésentes. On demande au taxi pour quelle équipe vibre Novak. « Qu’est-ce que vous croyez ? Son cœur est rouge et blanc. Comme celui de tout le monde à Belgrade. C’est logique. » La voiture s’arrête devant le « Marakana » , officiellement le Stadion Crvena Zvezda et on entre dans le Red Café, perché au-dessus de cette enceinte historique. Il y a quelques années, 110 000 supporters venaient vibrer pour l’Étoile rouge, un chiffre que seuls les plus grands clubs au monde peuvent rêver d’atteindre. La visite du musée du club balaye d’ailleurs les derniers doutes : le prestige reste intact. Au sommet d’une montagne de trophées, la coupe aux grandes oreilles et la Coupe intercontinentale règnent comme reine et roi. Sur les murs, d’innombrables photos de joueurs légendaires : Dejan Stanković, Sinisa Mihajlović, Savićévić, Prosinecki, Pančev… Et Novak Djokovic.

Le sujet du « Derby éternel » et de la rivalité avec le Partizan Belgrade, dont le stade se trouve à quelques mètres d’ici, est inévitable. « Le Partizan, c’est seulement un autre club serbe, qui joue à Belgrade. Mais nous, l’Étoile rouge, on se compare au Real Madrid, à Manchester United, à l’Inter Milan, au FC Barcelone, au PSG. » Une fois que l’on entre dans la classe des grands, on ne la quitte plus. Pourtant, cela fait cinq années de suite que le Partizan gagne le championnat. Et si le titre est remporté cette saison par le voisin, les deux clubs se retrouveront à égalité en terme de palmarès national. Une inquiétude ? Marko Nikolovski, responsable relations publiques, et Stefan Pantović, secrétaire général du club, balayent le moindre soupçon d’un rire grave : « En moyenne, en championnat, nous avons 26 000 supporters présents dans ce stade. L’autre jour, le Partizan jouait en Europa League. Ils étaient 12 000. Ils offraient des places dans la rue pour essayer de remplir le stade… » Avant d’ajouter : « Et puis, la Champions League, ils ne l’auront jamais. »

L’Ajax comme modèle, le mental comme solution

La discussion vire sur les objectifs du club. À la question du modèle du club, la réponse ne souffre d’aucune hésitation : « Nous aimons ce que fait l’Ajax Amsterdam, qui a aussi changé de division par rapport au passé. C’est un club avec une grande histoire et un remarquable centre de formation. Quand ils ont une génération de bons joueurs, ils peuvent la conserver trois ou quatre années. » Limpide. Seulement, l’Ajax peut compter sur un championnat relativement riche, un stade énorme et surtout un centre de formation des plus réputés. « Le club essaye de faire en sorte que toutes les équipes de jeunes jouent avec le même système de jeu, un 4-4-2 qui exige à la fois des qualités physiques et techniques. Mais on dépend beaucoup des caractéristiques des joueurs que nous avons, vous savez, avec des Zigić… »

Et la marque de fabrique de l’Étoile rouge en 2012 ? « Le mental. C’est l’aspect le plus important. Très tôt, on leur apprend à « aller au trou », en les amenant notamment dans le tunnel des joueurs. » Une solution logique, tant il est impossible de miser sur les plus talentueux. Jovetić est parti du Partizan à 17 ans. Vidić, formé à l’Étoile rouge, à 23. Et Stanković, à 20 ans. « Dejan ne voulait pas partir, il voulait continuer à aider le club. Mais face à une telle proposition (12 millions d’euros de la Lazio) et dans le contexte de crise économique de l’époque, nous ne pouvions pas dire non. Aujourd’hui, il serait impossible de conserver les joueurs de la génération 1991. Dites vous que Sinisa Mihajlović est le dernier gros transfert réalisé par le club… »

« Nos relations avec les ultras sont bonnes, dans le sens où nous aimons le club autant qu’eux »

La faute à des difficultés financières récurrentes. Mais peu importe, semble-t-il. À Belgrade, après que les clubs se sont fait retirer leurs points UEFA en 1997, ce qui plongera le football serbe dans les bas-fonds du football européen (25e au classement UEFA), les priorités ont été réévaluées : en clair, si les titres viennent et repartent, il faut prendre soin de la passion, de l’âme, de l’esprit du club. « La passion est tout ce qui reste à la fin. Les années 1990 nous ont fait rendre compte que la grandeur d’un club ne dépend ni du nombre de ses stars, ni des titres, mais bien de la passion qu’il dégage. » Du coup, un système de socios à l’espagnole est progressivement en train de se mettre en place pour que les supporters soient au centre des décisions prises par le club.

D’une part, pas question de toucher aux supporters. « Nos relations avec les Delije ( « les Héros » , ultras historiques) sont bonnes dans le sens où nous aimons le club autant qu’eux. Et nous sommes fiers de leurs animations. Lorsqu’il y a des incidents où certains ultras sont concernés, nous faisons notre possible pour que les autorités policières visent à punir les individus impliqués, et non les associations de supporters ou l’institution même de l’Étoile rouge. » Tout le contraire du plan Leproux, en somme. D’autre part, cette passion vit dans les tribunes, mais aussi sur la pelouse. « L’effectif du Red Star, c’est non seulement 30 joueurs, mais surtout 30 supporters. On y veille… » Et même dans les bureaux : « Vous pouvez aller demander à n’importe qui ici, à part quelques secrétaires, tout le monde vit pour ce club. On se lève tous les matins pour faire remporter la Ligue des champions au club de notre vie. C’est le plus beau métier au monde. »

« Laisser son cœur sur le terrain »

« Nous ne voulons pas vivre d’un prestige ancien. Notre objectif est de construire les bases pour se qualifier chaque année en Europe. Mais pour cela, nous devons compter principalement sur l’esprit qui anime cette équipe, faire en sorte que tous les joueurs laissent leur cœur sur le terrain. Et nous avons confiance en ce créneau. » À long terme, s’il y a bien un élément qui ne dépendra pas de l’argent dépensé dans le club, c’est bien ce mental de guerrier. « Quand nous avons perdu à Bordeaux, nous sommes longuement restés dans les vestiaires, la tête haute. Nous étions fiers. Montrer que nous pouvons battre n’importe qui, malgré les différences énormes de budget, c’était important. » Et ce, même si cette élimination aurait pris la forme d’un échec national il y a une vingtaine d’années.

Cette extra-motivation se ressent partout à Belgrade. Dans chaque rue, sur chaque immeuble, dans chaque cage d’escalier, les lettres « ЦЗБГ » sont peintes en rouge. Le rouge du sang. De la vie. De l’amour. Et de cette passion, toujours. À force d’essayer de la contrôler, l’Europe estampillée foot-business prend le risque de la perdre. À Belgrade, où on a déjà perdu beaucoup, on la soigne. Même quand il s’agit d’entrer dans la modernité. « Nous voulons le meilleur pour nos supporters. Nous réfléchissons donc à un projet de nouveau stade. Cela s’appellerait Star City, un énorme complexe qui serait utilisé tous les jours par nos fans, au lieu d’une fois toutes les deux semaines. Des cafés, hôtels, des restaurants, cinémas, coiffeurs, etc. Évidemment, le stade sera construit à l’emplacement historique du stade actuel. » De l’histoire, de la passion et de l’amour : la Serbie a beaucoup de football à offrir, à commencer par le Derby de demain.

Par Markus Kaufmann, à Belgrade

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