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Ghana melonite vs Guinée Ebola !
Les Black Stars partent favoris ce soir dans cette première demi-finale à Malabo. Mais on espère pour eux qu'ils soient plus vaccinés contre leur suffisance légendaire que contre Ebola, ce mal qui a honteusement stigmatisé le Sily National…
Un Ghana hollandais ou allemand ?
On ne présente plus le Ghana, cador continental aux quatre CAN (1963, 1965, 1978 et 1982) et étoile bienveillante du foot africain à la Coupe du monde. On va juste rappeler à son sujet ce complexe de melonite aiguë qui accable ces Black Stars, au point de s’être vus surnommés les « Néerlandais de l’Afrique » . Pour bien évaluer l’étendue de cette posture hautaine, il n’y a qu’à se référer aux deux dernières CAN qui leur tendaient les bras, mais qui leur ont échappé en demies. En 2012, ils partaient favoris face à la courageuse Zambie, mais ils se firent surprendre par Mayuka à la 79e (0-1) avant que Derek Boateng ne prenne un rouge. Car les Ghanéens pourtant disciplinés perdent parfois les pédales quand leur supériorité bute sur un os… Rebelote en 2013, où ils rencontrent un Burkina Faso évidemment présenté comme challenger. Après avoir mené 1-0, il se feront égaliser, puis battre à la surprise générale (1-1 a.p et 2 tab à 3). Preuve ultime de cette melonite incroyable, ces grands seigneurs du ballon rond ne s’abaissent même pas à décrocher le bronze de la troisième place : en 2012, le même Mali les tape une première fois 2-0 (avec un rouge pour Vorsah), puis 3-1 en 2013. Pour rappel, au dernier Mondial brésilien les Black Stars avaient payé d’une élimination au premier tour leur défaite initiale contre des USA (1-2) qui étaient pourtant à leur portée… Vous voyez venir le topo ? Ce soir à 17 heures, le Ghana vainqueur de l’Algérie au premier tour part avec les pronostics favorables face à la « petite Guinée » , qualifiée in extremis au tirage au sort en laissant sur le carreau les pauvres Aigles du Mali.
Le Ghana devrait donc gagner. D’ailleurs, les deux équipes s’étaient affrontées en éliminatoires et le Sily s’était incliné 1-3 à Accra et avait nullé 1-1. Sauf que… Le Ghana est encore capable de se projeter déjà sur la demie en oubliant de prendre le quart. Ce sera tout le boulot de son coach Avram Grant, de dégonfler les melons avant la rencontre. Objectivement, si ses joueurs n’ont pas vraiment impressionné lors du premier tour d’un Groupe C où ils ont fini leaders, ils ont montré des ressources mentales qui, outre des qualités de jeu indéniables, les situent toujours au rang de co-favoris avec l’Algérie ou la Côte d’Ivoire. Après le Sénégal (1-2), ils se sont repris avec sang-froid et justesse face à l’Algérie (1-0, Gyan à la 92e), puis face à l’Afrique du Sud (2-1) alors qu’ils avaient été menés. Avec son 4-4-2 compact, ce Ghana peut compter sur ses leaders offensifs qui ont bien répondu présent jusqu’alors, Asamoah Gyan et surtout André Ayew (2 buts). On note des faiblesses dans l’axe central de la défense qui a été mise en difficulté dans ses trois matchs de poule (même contre l’Algérie). Du coup, Grant devra choisir entre Armatay (20 ans) ou Boye pour faire la paire avec Jonathan Mensah. Dans les cages, Braimah n’offre pas non plus toutes les garanties de sécurité. Aux Ghanéens de jouer à « l’allemande » , une autre comparaison plus flatteuse dont on les affuble parfois pour leur réalisme froid. Après tout, un bon 1-0 sérieux suffira…
La revanche des pestiférés ?
Comme dans toutes les compétitions, un facteur irrationnel fait parfois émerger des équipes imprévues qui se hissent au plus haut niveau. Et c’est le cas de la Guinée, formation objectivement limitée comme on a pu le voir au premier tour, mais qui a su tirer sa force d’une adversité carabinée. On parle bien sûr du virus Ebola, très circonscrit sur le territoire guinéen, et qui a conduit le Sily National à jouer tous ses matchs des éliminatoires « à domicile » au Maroc (à Casablanca). Le coach français Michel Dussuyer a souvent rappelé que si son équipe avait joué à la maison, à Conakry, elle aurait fait mieux que le 1-1 à Casa contre ce Ghana qui l’a reléguée à la deuxième place… La stigmatisation générale (littéralement « l’équipe Ebola » ) qui a valu à ses internationaux d’être traités en pestiférés (avec mise en quarantaine par certains clubs européens) a donc renforcé l’esprit de corps d’un groupe bien décidé à aller le plus loin possible. Et à ce stade de la compétition, la Guinée a déjà gagné. Même si le miracle du tirage au sort qui lui a permis « d’éliminer » le Mali a mis en évidence leurs limites dans le jeu (trois fois 1-1, zéro victoire). Un péno lamentablement manqué par Seydou Keita explique aussi la présence du Sily dans le Grand Huit continental. Car autant la Guinée a très bien joué sa chance face à la Côte d’Ivoire (1-1, à 11 contre 10 en deuxième mi-temps), autant elle a paru inférieure au Cameroun et au Mali.
Ce soir à Malabo, Ghanéens et Guinéens se retrouveront donc pour disputer la belle et ces derniers devront d’abord rester maîtres d’eux-mêmes et ne pas se désunir comme ils l’ont fait jusqu’à présent. Leur 4-3-3 modulable en 4-4-2 (selon le positionnement du milieu offensif Conté) devra rester solide. Au milieu, on attendra donc beaucoup du taulier Kevin Constant (29 ans) pour tirer vers le haut les jeunes Naby Keita (19 ans) et Boubacar Fofana (la pointe basse de 25 ans). Car pour les Ghanéens, le temps qui passe sans avoir pu marquer face aux équipes dites « inférieures » , leur fait perdre leurs moyens et ils s’énervent au point de déjouer. Ceci dit, la Guinée ne pourra pas non plus se contenter de subir en reculant comme elle l’a trop fait face au Cameroun et au Mali : avec les frères Ayew, Gyan ou Atsu, le Ghana a les armes pour punir… Le Sily devra donc procéder sans complexe comme face aux Ivoiriens et trouver ses attaquants, tels l’opportuniste Lyonnais Mohamed Yattara, et le gaucher foudroyant Ibrahima Traoré. La Guinée n’a rien à perdre et elle devra se montrer digne d’avoir été « élue » au détriment du Mali qui n’avait pas démérité. On leur souhaite enfin de ne pas subir un arbitrage qui privilégierait une des grosses cylindrées du continent…
Par Chérif Ghemmour