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Un homme, un stade : Léo Lagrange

Par Mathieu Faure
Un homme, un stade : Léo Lagrange

Souvent, derrière le nom d’un stade, se trouve celui d’un homme. Une figure éminente de la ville, du club ou, plus simplement, du sport en France. C’est le cas à Nice avec Leo-Lagrange même si, avec le temps, le nom de l’ancien sous-secrétaire d’État aux sports sous le Front populaire a été remplacé par le « Ray ».

À Nice, il faut s’y prendre à deux fois pour se faire indiquer la route du stade Léo-Lagrange. Normal, au cœur de la cité azuréenne, on l’appelle plutôt le « Ray » . Mais pour beaucoup d’anciens, « Léo-Lagrange » n’est pas qu’une simple adresse où Baratelli, Bjeković ou Langers ont fait leurs gammes, c’est un personnage. « Il n’est pas possible que la malédiction s’abatte éternellement sur les déshérités » , lançait Léo Lagrange. Une citation qui résume assez bien sa vie, son œuvre. Né en 1900 et mort sur le front de l’Aisne en 1940, durant la Seconde Guerre mondiale, l’homme fut le premier sous-secrétaire d’État de la Jeunesse et des Sports dans le gouvernement du Front populaire en 1936. Un parcours presque logique pour ce jeune avocat, proche de la gauche parisienne de l’époque (Malraux, Guéhenno, Prévos ou Bloch). En 1932, il monte en grade avec ce poste de député de Fourmies, dans le Nord. Quatre ans plus tard, Léon Blum le transfère au Front populaire à un poste novateur et inventif. Tel une sentinelle des temps modernes, il doit innover et garder une certaine technique au sein d’un demi-ministère sans locaux ni crédits.

Pis, Lagrange est d’abord rattaché à la Santé, puis à l’Education nationale. Trimbalé à plusieurs postes, il ne se fixe pas immédiatement malgré les soutiens infaillibles de la SFIO – dont il est issu –, mais aussi des communistes et des gauchistes. Très vite, son style de jeu détonne, il veut imposer aux compagnies ferroviaires le fameux « billet Léo Lagrange » qui contient une réduction de 40% pour les congés payés. Il va plus loin en mettant sur pied le brevet sportif populaire, l’organisation des loisirs, l’essor des congés payés, des auberges de jeunesse, des sports de masse et les subventions pour les petits équipements sportifs, notamment pour les sports de plein air. Son dogme, il le résume assez vite : « L’État doit être un guide pour l’utilisation des loisirs et pour le développement, sur le plan individuel et sur le plan social, de la santé et de la culture. » Mais la guerre va tout changer. Lui qui s’était déjà engagé en 1918, décide de retourner au front en 1939. Lors de ses correspondances avec sa femme, Madeleine, il annonce la couleur pour la suite : rejoindre le gouvernement De Gaulle. Sauf que l’homme est fauché en plein vol, par un obus, le 9 juin 1940. En dix-neuf mois dans le onze de départ, Lagrange aura changé beaucoup de choses puisqu’il est à l’initiative de la création d’un Conseil supérieur des sports où sont représentées toutes les associations.

Nice et un stade au nom d’un socialiste…

Bien que courte, son œuvre restera dans les mémoires collectives, à tel point que, dans les années 50, certains élus socialistes, dont Pierre Mauroy, ont créé la Fédération Léo-Lagrange basée sur la pratique du sport et de la culture pour tous. À Nice, comme partout en France, on pratiquait le football. En 1927, quand le stade du Ray sort de terre, Lagrange est très loin de la Baie des Anges. À l’époque, l’OGC Nice joue en Division d’Honneur et sa star s’appelle André Merle. Pourquoi le Ray ? C’est du niçois « rai » ou « ray » qui signifie en patois local « petit ruisseau » , car l’endroit où le stade est sorti de terre en comptait énormément. Après la guerre, on a pourtant associé au Ray le nom de Léo-Lagrange, tel un hommage. C’est le début de la belle période de l’OGC Nice même si, en 1946, le club n’avait plus de dirigeants.

Les joueurs en personne vendaient les billets avant le match. Mais l’arrivée de « Léo-Lagrange » , par décision municipale, va propulser le club dans la cours des grands, sans lien de cause à effet, bien entendu. Les années cinquante furent des années glorieuses. Quatre titres de champion de France (1951, 52, 56, 59), deux Coupes de France (1952, 54), deux quarts de finale de Coupe d’Europe face au Real Madrid : le Gym était devenu un grand du football au stade Léo-Lagrange. Un socialiste, au fond. Dans une ville qui a toujours penché à droite, ça ne plaisait pas. Alors tout le monde disait « le Ray » . Et c’est donc au Ray que Nice a acclamé ses amours : Baratelli, Adams, Huck, Jouve, Eriksson, Molitor, Van Dijk, Guillou, Katalinski, Bjekovic, Bravo, Langers…

Comment aurait pu s’appeler le stade Leo-Lagrange

Le stade Jean-Pierre Adams : le Marius Trésor des Alpes-Maritimes. Comme Nice, il est éternel. Le stade Pancho Gonzalez : joueur et entraîneur du club pendant près de quinze ans, une légende vivante qui a placé le Ray dans les livres de géographie de toutes les écoles d’Argentine. Le stade Victor Nurenberg : meilleur canonnier du club, auteur d’un triplé contre le Real Madrid en Coupe d’Europe, « Vic » était la principale raison d’aimer le Ray. Le stade Jacques Médecin : « Jacquou » comme on aime l’appeler. Maire de la ville pendant vingt-quatre ans, une moustache, des lunettes avec des verres fumés et des ennuis judiciaires. Le bagage parfait pour avoir un endroit à son nom. Le stade Albert Spaggiari : le braqueur du siècle, avec un slogan parfait au-dessus de l’entrée principale du stade : « Sans arme, ni haine, ni violence » .
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