Deux jours après un exploit en Coupe de France contre une équipe de Ligue 1, on se sent comment dans sa tête ?
Vraiment bien parce qu’on a vraiment savouré ce week-end. Toute l’équipe a eu l’occasion de revoir sa famille qui était présente au stade, un super moment. Mais, aujourd’hui, lundi, on pense quand même déjà au match de vendredi en championnat.
Juste après la victoire, t’as eu envie de faire quoi ?
Le club avait organisé une réception après la rencontre, donc en fait, on est restés pas mal de temps avec tout ce qui est sponsors, dirigeants et bénévoles du club. Et il y avait bien sûr nos familles. On ne s’est pas fait de soirée particulièrement arrosée même si une partie de l’équipe s’est retrouvée par la suite.
Et du coup, c’était comment avec tes partenaires ?
Grosse ambiance, en même temps, on a célébré l’un des plus beaux moments de notre carrière. Pour ma part en plus, c’est la première fois que je passe le cap des 32es de finale. J’en avais déjà fait trois avec l’US Avranches auparavant sans jamais me qualifier. L’an dernier, on s’était fait sortir par Lens qui jouait en Ligue 2, on avait perdu 3-1 à domicile.
T’as un père entraîneur en la personne de Pascal Théault (ex-Caen), comment ça s’est passé avec lui ? Il t’a dit des choses particulières ?
Il était présent dans les tribunes et il ne m’a rien dit de particulier avant la rencontre, c’est surtout après qu’il s’est exprimé. Avant le match, on s’envoyait des messages, et je le sentais très fier de moi. Après, il m’a évidemment dit qu’il était content pour moi, qu’il fallait savourer et que c’était pas tous les jours dans une carrière qu’on élimine une Ligue 1.
Parlons un peu du match, c’était ta première contre une Ligue 1, ça fait quoi ? Quand t’arrives sur le terrain avec l’ambiance qui monte, t’as une émotion spéciale ?
Bizarrement non, pas de stress particulier, pas les yeux qui brillent. On ne s’est pas trop attardé là-dessus. C’est après, en revoyant le match, qu’on se dit : « Ah ouais, ces mecs jouent quand même en Ligue 1 tous les samedis. » C’est à force de revoir les images, je pense, qu’on se rendra compte de ce que nous avons accompli.
Vous êtes sortis vainqueurs, mais quand une équipe de National rencontre une Ligue 1 en Coupe, sur un match, tu l’as quand même ressentie, la différence de divisions ?
Oui, évidemment. Sur le plan technique, dans les redoublements de passes et dans certains principes de jeu, y a des trucs qui vont vraiment beaucoup plus vite que ce qu’on fait nous ou ce qu’on peut rencontrer en National. Sur le plan physique en revanche, l’équipe de Lorient nous ressemblait pas mal avec des petits gabarits, donc sur ce point, ça ne nous a pas trop frappés.
Tu t’es dit que t’allais jouer différemment par rapport à d’habitude ?
Pas du tout. Justement, c’est ça qu’on voulait éviter. On voulait vraiment jouer notre partition comme on essaie de le faire chaque vendredi soir en National. Et ça a plutôt bien marché. À la base, on ne voulait clairement rien changer. C’est peut-être au niveau de l’exigence défensive et de la concentration qu’il fallait se mettre à 200%. Mais offensivement, fallait que ça reste fidèle à nos habitudes.
Ben, c’est tout simple : il y a 7500 habitants à Avranches, y en avait 5000 au stade. Tout est dit.
Et Lorient dans tout ça, tu les as sentis comment après votre ouverture du score ?
J’ai forcément senti qu’ils voulaient réagir immédiatement, ils ont continué à pousser. Après, Lorient, c’est aussi un style de jeu bien particulier. Peu importe le score ou ce qui se passe dans le match, ils essaient toujours de produire du jeu avec leurs principes consistant à passer par les côtés. Ils ont continué à insister, insister, mais on a su tenir et répondre présent dans les duels. Au final, on avait peut-être un peu plus envie qu’eux.
Oui, et il y a la qualif au bout, mais est-ce que tu es également comblé sur le plan personnel ?
Oui, oui. Je suis vraiment très content. Après, j’ai quand même quelques regrets sur la première mi-temps parce qu’individuellement, on a tous perdu quelques ballons qui nous auraient permis de nous créer des occasions. Mais on a fait vraiment une grosse deuxième période. Sur le plan personnel, j’étais content de faire la passe décisive pour Maguette (Diongue, ndlr). Ça me restera.
En dehors de ta carrière de joueur, tu es éducateur au sein du club…
Oui, on est pas mal dans l’équipe – à peu près un tiers – à œuvrer pour le bon fonctionnement de l’US Avranches. Que ce soit avec les petits ou les plus grands. Moi, j’encadre notamment la section féminine.
Tu es revenu quand au club ? Ce lundi matin ? C’était comment l’ambiance ?
En fait, on est revenu au club dès dimanche. Il y avait le match de l’équipe B qui évolue en DH. Franchement, j’ai ressenti beaucoup de fierté parce qu’on a pu côtoyer beaucoup de supporters qui étaient là la veille. Ils avaient plaisir à venir nous voir. Ils nous ont posé beaucoup de questions sur le match, sur l’après-match et sur ce qu’on ressentait. C’était beaucoup de plaisir, on a vraiment senti que les gens attendaient ça depuis un long moment et c’était génial de les voir si contents.
La ville a dû s’arrêter pendant quelques heures…
Ben, c’est tout simple : il y a 7 500 habitants à Avranches, y en avait 5 000 au stade, donc tout est dit. Je pense que toute la ville s’était prise au jeu, et c’était la septième fois qu’Avranches arrivait en 32es sans jamais avoir réussi à passer le cap. Pour les supporters fidèles qui avaient suivi ces matchs, c’était forcément énorme.
Le public a été exemplaire derrière vous, y a un truc qui t’a plus marqué que le reste dans les gradins ?
Ma mère. En fait, à un moment donné, il y avait un blanc dans le stade, les gens ne disaient plus grand-chose, et tout à coup, elle s’est mise à crier « Allez les Bleus ! » J’ai immédiatement reconnu sa voix, c’était marrant. Sur le coup, ça fait forcément plaisir et ça me donne encore plus envie de m’arracher, car elle te fait sentir que tout le monde a envie d’y croire. À ce moment-là, je me dis que l’exploit n’est plus très loin.
Tu te dis pas que c’est quand même un peu dingue le foot ?
Oui. Y a que le sport pour déclencher ça et procurer de telles émotions. Y a même des gens dans le stade, ils n’avaient certainement jamais vu de match de football dans leur vie. Ils étaient présents samedi soir, ils ont adoré et ils étaient quand même beaucoup émus. C’est dingue. Y a vraiment que le sport et le foot en particulier pour générer ce genre de choses.
Ce lundi soir à 18h30, c’est le tirage au sort. Vous comptez vous réunir ou ce sera chacun chez soi ?
Non, on compte évidemment se réunir. On a entraînement ce lundi après-midi et donc après, on a prévu de regarder le tirage tous ensemble.
Évidemment que le Mont-Saint-Michel appartient à la Basse-Normandie
Maintenant que vous abordez les 16es de finale, c’est quoi votre souhait ? L’autre club normand Quevilly, l’OL ou un autre club breton vu que ça vous a bien réussi jusqu’à présent ?
La priorité, c’est clairement de recevoir. Après, on n’en a pas discuté, je ne sais pas trop ce qu’on voudrait ni ce que je voudrais personnellement si ce n’est jouer à la maison. Revoir un stade avec 5000 personnes à Avranches, ce serait magnifique. En fait, faudrait pas tirer un trop trop gros parce qu’on serait obligés de délocaliser le match et d’aller jouer à Caen, Rennes ou un autre stade. L’idéal, ce serait le plus petit adversaire possible ou de recevoir un nouveau club pro, mais pas trop gros.
Donc un Avranches-PSG (si Paris se qualifie), ça te ferait pas envie ?
Ah ben, c’est sûr que ce serait quelque chose de formidable. Après, ça ne serait certainement pas dans l’optique de passer le tour, mais pour l’affiche, le prestige et les souvenirs, ce serait quelque chose de fou.
Toi qui es bas-normand de naissance, ça fait quoi de sortir un club breton en arborant le Mont-Saint-Michel – que les Bretons ont tendance à revendiquer – sur l’écusson de ton maillot ?
(Rires) Évidemment, le Mont-Saint-Michel appartient à la Basse-Normandie, ça permet de le rappeler, donc c’est une fierté. En plus, quand j’y pense, on chambre souvent des potes dans l’équipe à propos du Mont-Saint-Michel, vu qu’il y a trois ou quatre gars dans l’effectif qui viennent de Bretagne. Donc on arrive à bien rigoler.
Vous avez réalisé quelque chose de grand. Preuve en est, vous avez fait la Une de L’Équipe. Tu t’es dit quoi quand t’as eu le journal en main ?
J’ai ressenti beaucoup de fierté, forcément. À ce propos, j’ai quand même un petit regret. Sur la photo, je suis juste derrière Maguette Diongue en train de célébrer son but. On ne voit que mes chaussures, mes cuisses et un peu mon bras (Rires). C’est le seul regret que j’ai par rapport à ça. Cela reste beaucoup de fierté parce qu’on se rend compte de ce qu’on a fait la veille. Pas mal de personnes que je connais qui ont acheté le journal dimanche m’ont envoyé la photo, et ça a fait beaucoup réagir sur les réseaux sociaux. Je vais le conserver ce numéro.
En National, vous êtes cinquièmes avec le podium à portée de main, vous allez forcément avoir envie de surfer sur la vague. Après tout, vous venez de battre une Ligue 1, alors on se dit que la Ligue 2, c’est jouable, nan ?
(Rires) Je crois que ça ne reste qu’un match de foot, sur un moment donné. Un championnat entier, c’est quand même largement plus compliqué. Maintenant, en National, il nous manque trois-quatre victoires pour aller décrocher le maintien le plus rapidement possible. Après, pour une éventuelle montée, ça fait envie et ça fait peur parce que le club n’est pas préparé à ça. On n’est pas prêts à envisager le monde pro. Personne ne s’attendait à ça, on n’était pas programmé pour lutter pour la Ligue 2. Mais il faut quand même profiter de ce qu’on fait et surfer sur la vague. Mais on doit s’attendre aussi à vivre des moments plus compliqués. Gardons les pieds sur terre.
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