¡Que visca Catalunya!
Les footballeurs de Catalogne rêvent de porter leurs couleurs en match officiel. En attendant, la revendication de la catalanité par les sportifs embarrasse sacrément Madrid.
L’herbe est source d’inspiration. Lorsque la Catalogne a remporté le championnat du monde B de hockey sur patins en octobre, à Macao, la nouvelle n’a pas ému grand monde à Madrid ni arraché un sourire au morne Raul. L’évènement était pourtant capital pour le sport catalan.
Quelques semaines plus tôt, la Fédération internationale de hockey sur patins reconnaissait officiellement la Fédération de Catalogne. Les vieux dirigeants de la Fédé espagnole ont frôlé l’apoplexie, menaçant de retirer leur propre équipe de la compétition. Pour la première fois, le sport catalan était reconnu par une fédération sportive. Depuis, cette décision a été révoquée, provoquant une énorme polémique en Catalogne, qui a trouvé un écho lors d’une manifestation de grande ampleur, le 29 décembre.
Chaque année entre Noël et le Jour de l’An, le Camp Nou est le théâtre d’un match entre les meilleurs footballeurs catalans, choisis par Pichi Alonso, et une sélection étrangère. Une rencontre dont l’intérêt sportif est inversement proportionnel à l’enjeu politique. Sur la pelouse, l’Argentine a rapidement plié l’affaire (3-0) mais l’important n’était pas là. Perchés dans le palco, Pasqual Maragall, le président de la Communauté autonome et Rafael Nubio, le secrétaire des sports de Catalogne, goûtaient une nouvelle occasion de faire avancer la cause indépendantiste.
Deux chantres de la catalanité prêts à enfiler les patins pour faire avancer le palet sur le terrain politique. Et revendiquer encore un peu plus fort la légitimité des sélections sportives catalanes. De toute façon, l’équipe d’Espagne est nulle, alors… Pour beaucoup de joueurs catalans, porter le maillot de la seleccion ne signifie rien, et depuis longtemps. « Si, un jour, la sélection catalane est reconnue, chacun sera libre de choisir ses couleurs, a déclaré Puyol, capitaine et patrimoine vivant du FC Barcelone. En dehors de Catalogne, on nous traite bien d’étrangers. » (2) Oleguer, le défenseur catalan du Barça a fait un pas de plus pour la reconnaissance de la Catalogne comme entité sportive à part entière, en prévenant qu’il refuserait de rejoindre la sélection nationale au profit de la seule sélection de Catalogne. Une position jamais prise publiquement par aucun footballeur catalan ! Et un énorme pavé dans la marre de José Luis Zapatero, le chef du gouvernement, à l’heure de faire ratifier la Constitution européenne dans son pays.
Les rencontres des sélections régionales autonomes sont devenues une tradition en Espagne. Alors pourquoi la Catalogne est-elle plus revendicative que le Pays Basque, également engagé sur la voix de l’autonomie politique ? « La multiplication des matches dans les dix-sept communautés autonomes est un dessein politique de la part de Madrid, pour tuer l’identité et l’essence même de l’évènement chez nous » avance Rafael Nubio. (1) En Catalogne, la sélection dispute des rencontres « internationales » (non reconnues par la FIFA) depuis près d’un siècle. A la mi-temps du match, Ivan Tibau, le capitaine des hockeyeurs, a déclaré : « La Catalogne a toujours été un pays favorable à la liberté. Les catalans ont droit de posséder leurs propres sélections sportives, de forme officielle et d’un point de vue simplement sportif. » Dans les tribunes, les 67 000 spectateurs vêtus de sang et or formulaient un vœu pieux : « Catalogne, une nation, une sélection » . – M. C., avec R. U.
¡Que visca Catalunya! : « Vive la Catalogne » , en catalan
(1) l’Equipe, 29 décembre 2004
(2) Don Balon, 29 novembre 2004Exergue
Oleguer refuserait de jouer pour l’Espagne au profit de la sélection de Catalogne !
Texte : Mickaël Caron, avec Ramon Usall
Photos : Panoramic
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