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Pauline Peyraud-Magnin : « J’essaye d’éviter ma colocataire pour ne pas la contaminer »

Propos recueillis par Julien Duez
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Surnommée Hulk sur le terrain, Pauline Peyraud-Magnin parvient à conserver son côté Bruce Banner chez elle à Londres après avoir présenté les symptômes du coronavirus. Pour la gardienne d’Arsenal, ce confinement est l’occasion de remettre de nombreuses choses en perspective, mais aussi de se mettre enfin au ukulélé, sans oublier de vanter les mérites du système de santé hexagonal.

Comment ça se passe avec ta coloc, l’internationale irlandaise Louise Quinn ? Vous vous évitez toujours ?Ça fait de la peine à dire, mais on se voit plus via le groupe WhatsApp des joueuses d’Arsenal qu’en vrai. J’essaye de l’éviter au maximum pour ne pas la contaminer. Heureusement, on a chacune notre salle de bain ! Mais pour ce qui est de la cuisine, je désinfecte tout à chaque passage, parfois deux ou trois fois. Elle n’a jamais autant brillé ! Comme j’ai eu quasiment tous les symptômes du coronavirus, ça m’a rendu un peu parano.

Ça ressemble à quoi, ton environnement londonien ?On est en pleine campagne, mais dans un appartement sans jardin dans le quartier de Colney, à la frontière de la ville, c’est très tranquille. Louise sort une fois de temps en temps pour courir, moi je n’ai plus mis les pieds dehors depuis une douzaine de jours, je ne sais même plus quel jour on est. Pour les courses, le club a mis en place un système d’entraide, donc on se fait ravitailler directement à domicile. Ils ne veulent pas qu’on prenne de risque.

Qu’est-ce que tu penses de la décision de Boris Johnson d’annoncer le confinement général il y a seulement une semaine ?Je ne l’ai pas attendue pour me mettre en quarantaine, car je suivais déjà les infos en France. Et quand ma mère m’a dit que la perte du goût et de l’odorat faisaient partie des symptômes du coronavirus, ça m’a confortée dans ma décision. C’est vrai que les Anglais ont réagi tard, mais la France aussi quand on y pense. Ici, ils ont déjà mis beaucoup de choses en place. À Londres, le palais des congrès ExCel a été converti en un hôpital de 400 lits par exemple.

Comment ça s’est passé pour expliquer ta situation avec les médecins sur place ?J’ai reçu plusieurs avis : celui du docteur de l’équipe de France, de mon médecin de famille… Ici, c’était chaud parce que je ne connaissais pas les termes médicaux en anglais. Et je flippais parce qu’on répète tout le temps que le système de santé français est le meilleur du monde, alors comment ça se passe quand on est à l’étranger ?

C’est vrai qu’en Angleterre, ça peut vite coûter très cher de se soigner.Ce que je vais te dire, écris-le en très gros et souligne-le trois fois en rouge :

Ce que je vais te dire, écris-le en très gros et souligne-le trois fois en rouge : on a vraiment de la chance de vivre en France. Ici, c’est une galère !

on a vraiment de la chance de vivre en France. Ici, c’est une galère ! Je vais te raconter une petite histoire : récemment, j’avais mal à une dent, rien de grave, c’était juste un nerf à vif. Le dentiste m’a facturé 90 livres pour la consultation, mais sans m’opérer. Et il m’a donné rendez-vous pour deux autres séances qui seraient facturées 1700 livres ! Pour une opération bénigne ! Finalement, ça m’a coûté moins cher de prendre l’avion pour rentrer en France et me faire soigner chez ma dentiste habituelle. Quand je lui ai indiqué le prix en Angleterre, elle a demandé comment on justifiait une somme pareille et j’ai supposé que le gars allait m’inviter au resto après. Maintenant, quand on me demandera ce que je veux faire après le foot, je répondrai : dentiste en Angleterre.

Ton père est pompier et ta sœur est infirmière. Ils vont bien ?Ma sœur ne bosse pas en réa, mais elle sait qu’elle peut être appelée à n’importe quel moment et elle est prête pour ça. Mon père, lui, il est habitué à aller au feu et il voit des choses difficiles tous les jours, donc il a tendance à essayer de dédramatiser. J’ai aussi un pote routier et une amie qui a été réquisitionnée pour bosser dans un Intermarché. Ça fait beaucoup de proches qui sont au front…

Tu sors les applaudir à ta fenêtre le soir à 20 heures ?Dans mon quartier, on ne le fait pas encore, mais je pense que ça va venir. En revanche, mon père sort dans son jardin tous les soirs et balance du gros son de circonstance. Des chansons comme I Will Survive par exemple. D’ailleurs, à la fin du confinement, il a prévu d’inviter tout le lotissement dans lequel il habite et d’organiser une soirée pendant laquelle il jouera toute sa playlist. J’espère qu’on saura garder ces petits gestes de solidarité après coup.

Malheureusement en France, on commence à voir fleurir des lettres anonymes qui demandent aux personnes exposées de déménager de chez elles…C’est inadmissible et complètement déplacé qu’on puisse dire des choses comme ça. D’autant plus que ce sont les infirmiers qui prennent le plus de précautions pour se protéger et protéger les autres. Finalement, on sait à qui on continuera de parler ou non quand tout ça sera fini. C’est souvent quand on est face au mur qu’on révèle son vrai visage.

Dans le même temps, on constate une énorme recrudescence de la pratique du footing.(Elle tousse, puis éclate de rire.) Mais qu’est-ce que c’est que ces gens qui s’inventent un sport ? J’ai l’impression de n’avoir jamais vu autant de personnes courir que depuis qu’on est confinés ! Honnêtement, ça va commencer à m’énerver cette histoire : restez chez vous ! En Italie, les gens meurent seuls, et l’armée les déplace pour les incinérer ailleurs. Comment on peut ne pas être effrayé par ça ? Les gens ne se rendent pas compte qu’ils peuvent être porteurs sains et mettre en danger celles et ceux qui sauvent des vies au péril de la leur.

Malgré le caractère exceptionnel de la situation, le foot ne te manque pas un peu, en tant qu’athlète professionnelle ?Si, énormément.

Parfois, j’ai envie de sortir dans la rue et de hurler au football à quel point je l’aime.

Parfois, j’ai envie de sortir dans la rue et de lui hurler à quel point je l’aime. Je pense que tous les sportifs ressentent la même chose, peu importe la discipline. Pour l’instant, on est dans l’incertitude concernant la fin de la saison. Plusieurs scénarios sont envisagés, mais les championnats amateurs ont déjà été annulés. Pour ma part, j’espère que la compétition reprendra, mais si elle doit s’arrêter… Comme tu l’as dit, la situation est exceptionnelle, ça permet de remettre les choses en perspective. Tu sais ce que j’ai fait depuis le début du confinement ?

Tu joues à FIFA ?Non, je suis une daube à ce jeu-là. Mon truc, c’est plutôt Uncharted et Assassin’s Creed. En solo, sinon j’insulterais tout le monde. Plus sérieusement, je me suis fait une liste de tout ce que je veux faire quand ce sera terminé. Attends, je la cherche… Voilà. Premier truc : revoir ma famille. J’en ai aux quatre coins de la France, c’est la rose des vents. J’ai aussi le projet de faire visiter Marseille de fond en comble à tous mes potes, d’aller à Amsterdam, faire un road-trip aux États-Unis, prendre un brunch dans un resto, n’importe lequel, dire aux gens que je les aime… Je trouve que la période est propice pour renouer les liens avec des gens à qui on n’a pas parlé depuis des années ou avec qui on est en embrouille pour des broutilles. C’est un peu utopique, mais j’ai envie d’y croire.

C’est bien de voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide.

J’ai envie de dire aux gens qui le voient à moitié vide d’en prendre un plus petit et de le remplir. Honnêtement, avec ce confinement, je ne me suis jamais sentie aussi optimiste de toute ma vie.

J’ai envie de dire aux gens qui le voient à moitié vide d’en prendre un plus petit et de le remplir. Honnêtement, avec ce confinement, je ne me suis jamais sentie aussi optimiste de toute ma vie. Ça colle bien avec une phrase que je me suis fait tatouer il y a quelques mois : Ce qui ne te tue pas te rend plus fort. Cette détermination, ça me vient de mon entourage qui a toujours regardé vers l’avant. Ma mère par exemple, elle est repartie de zéro à une époque où ce n’était pas évident pour elle, et aujourd’hui, elle gère son institut de beauté à Marseille. Pour eux, je ne peux pas abandonner. J’ai beau être encore un peu malade, j’ai ma tête, mes deux bras et mes deux jambes.

Et tes deux mains aussi. C’est pratique quand on se lance dans l’apprentissage du ukulélé.(Rires.) Tout a commencé quand j’ai rencontré un pote musicien qui s’appelle Teddy. Il joue de la guitare, donc je voulais me mettre au ukulélé, qui est plutôt un instrument d’accompagnement. En plus, il n’y a que quatre cordes au lieu six, donc ça me paraissait plus facile pour jouer en duo un jour avec lui. Mais dix ans après, ce n’est toujours pas le cas !

Ça donne quoi ton niveau à l’heure actuelle ?Je connais quelques accords, mais sans plus… Le plus dur, c’est la rythmique. En général, je m’exerce en jouant par-dessus la musique que je mets en fond. Il y a un morceau que je maîtrise, c’est I’m Yours, de Jason Mraz. Mais maintenant, j’ai au moins 45 jours pour m’y mettre à fond, donc on finira par faire de grandes choses avec Teddy.


Tu as des coéquipières qui partagent cette fibre musicale ?(Elle réfléchit.) Lisa Evans (internationale écossaise, N.D.L.R.), elle chante trop bien, elle a un vrai grain de voix. La mienne, elle déconne à force d’envoyer sur le terrain.

Propos recueillis par Julien Duez

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