On a suivi Mulumbu et Mabiala à l’Urban Football

Puni ! Kristen, 9 ans, a la moue boudeuse. Exclu de la salle de conférence pour s’être chamaillé avec un camarade, il se rassure. « Je faisais que répondre à la question d’un autre. En fait, j’ai cru que c’était toi le joueur, alors j’étais dégoûté, mais j’ai regardé le nom et je me suis dit que ça devait plutôt être un Africain » bougonne-t-il.

En vrai, avant de revenir parmi ses camarades, il concède ne pas savoir qui sont Youssouf Mulumbu et Larrys Mabiala. Les deux joueurs du banc du Paris Saint-Germain viennent répondre ce mercredi 30 octobre aux questions, un brin ingénues, d’une trentaine de marmots. L’opération se déroule dans le centre historique d’Urban Football, à Puteaux, dans le neuf deux.

« Ouah, la classe ! » . Les mômes ont leur idée de la classe. Mulumbu, survêtement gris qui met à l’aise, et Mabiala, version jean tee-shirt et sorte de chapelet autour du cou, font leur entrée. S’en suit une heure de questions-réponses auxquelles le duo se soumet avec pédagogie et bonne humeur. Entre quelques banalités d’usage avec les enfants – « Il faut travailler dur chaque jour » , « Important d’être à l’écoute des éducateurs » – les compères s’envoient une vanne ici et là. Genre :

Question : Quelle est votre principale qualité ?

Mulumbu : Ma technique, comme je suis petit, ça me permet de me défaire des grands. Je suis rusé.

Mabiala : Moi, c’est le mental.

Mulumbu : Normal, tu sais pas dribbler.

Opération séduction

Mieux qu’un anniversaire chez Ronald McDo, les gamins sont ravis d’approcher deux professionnels, même s’ils ne les connaissaient pas auparavant. En association avec la PSG Academy, Urban Football organise régulièrement ce genre de rencontres pendant les vacances scolaires – Alonzo, Ngog, Sakho se sont déjà prêtés au jeu. Pas l’exercice le plus compliqué dans l’emploi du temps d’un joueur de foot et une façon pour la société de se faire connaître.

C’est ici même qu’a débarqué l’Urban Football. Un ancien complexe de tennis, habillé d’orange et vert, les couleurs de l’Urban Foot, qui accueille depuis plus de trois ans huit terrains synthétiques de cinq contre cinq in et outdoor. « Ça devenait trop difficile de jouer au foot à Paris, de trouver un terrain ou tout simplement 22 joueurs. Et en club, il faut trouver le temps de s’entraîner deux fois par semaine pour espérer pouvoir jouer le dimanche. Le principe, c’était d’amener des infrastructures dans des zones de vie qui en manquaient » déroule Aymeric De Tilly, le papa du projet en France. Un concept financé par des actionnaires, des fonds privés et sponsorisé par les géants Nike, Konami et Powerade, ramené d’Angleterre, où il rassemble plus de 4,5 millions d’adeptes, répartis dans des centaines de centres. Illustration de la popularité de cette pratique outre-Manche, le mensuel FourFourTwo a longtemps consacré une rubrique sur le “5-a-side” à Arsène Wenger dans ses pages. Ce qu’on appelle aussi peut-être un pays de football…

Là où le Jorkyball, un deux contre deux sauvage en cage, rame à faire succomber les adeptes du ballon rond, l’Urban Football conserve l’aspect collectif et tactique du onze contre onze, en proposant une accessibilité que n’offre pas le Futsal de la Fifa. Une autre idée du jeu, qui a quand même un coût : entre 50 et 100 euros le terrain, divisés par le nombre de joueurs, selon le créneau horaire souhaité. D’où l’importance de décider avant qui jouera gardien… C’est d’ailleurs sur ce point qu’appuient les détracteurs de l’Urban Football. Comme ce client, un ado posté dans le hall d’entrée près de la borne Playstation 3, qui s’interroge sur son pouvoir d’achat : « Vous êtes journalistes ? Dîtes bien que c’est un truc pour les gens qui ont de la maille. Vous avez vu les prix, ils sont sérieux là ? » .

En tout cas, l’idée séduit et les chiffres de la fréquentation gonflent chaque semaine. « C’est une discipline où ça pulse beaucoup, ça va très vite. Nous aussi, à l’entraînement, on fait des petits matchs basés sur ce modèle. Là j’avoue, c’est trop bien fait, c’est des super installations » admet Mulumbu. « C’est clair, nous, petits, on s’arrachait la peau sur le bitume ! Là, ça te permet d’enchaîner les phases offensives et défensives, de travailler le physique et la technique » appuie Mabiala.

Trois autres centres sont ouverts au public à Meudon, à Orsay, ainsi qu’à Nantes et un petit dernier verra bientôt le jour à Lille. Le bébé se porte bien donc et Aymeric de Tilly espère le voir grandir puis se multiplier dans l’Hexagone. Avec en rêve inaccessible, « une équipe composée de Buffon, Mexes, Messi, Robinho, Cristiano Ronaldo et Ben Arfa sur le banc ».

En attendant, Kristen n’en demande pas tant. 16 heures, il a fait le plein d’autographes et fanfaronne au bord du terrain sur lequel tout ce petit monde est descendu prendre la pose : « Eh Mulumbu ! Check, man ! » .

Pierre Maturana, à Puteaux – Photos : Lucie Le Tiec

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