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Lotito seul au monde
Aujourd'hui à 15h, Cagliari reçoit sur sa pelouse la Lazio. 17èmes avec deux points d'avance sur le premier non relégable, les Biancocelesti semblent plus que jamais en péril. Un homme, un seul, est désigné comme le responsable de cet échec retentissant : Claudio Lotito, le président du club. Portrait d'un génie du mal.
Sa fortune, il l’a d’abord bâtie grâce à des entreprises de nettoyage, de propreté et de santé publique. Logiquement, on l’a surnommé “Monsieur Propre”. Puis, il s’est lancé dans la sécurité. Inlassablement, il a remporté tous les appels d’offre qui se présentaient. Quand il a eu assez d’argent et qu’il a senti que son moment était venu, il a décidé de sauver la Lazio de sa dette et d’en devenir l’actionnaire principal. Le 19 juillet 2004, à 20h45, Claudio Lotito signe un chèque de 21 millions d’euros, sauve un monument du calcio en péril et se lance dans le football. Il est alors au sommet de son art. Plus tard, il achètera d’autres parts, augmentant sans cesse son pouvoir.
Le secret de sa réussite fulgurante d’entrepreneur ? « Parier, miser et prendre des risques. C’est ce que je sais faire de mieux. Dans ma vie, j’ai gagné tous les paris que j’ai faits. Enfin, presque » . De l’audace, donc, un brin de flair et du travail, évidemment. Cela dès le plus jeune âge : « A l’école, les gens de ma classe ne m’aimaient pas car j’étudiais trop. Mais moi, ça me plaisait. Et c’est moi qui ai gagné la bourse d’étude du meilleur élève des lycées littéraires de la région centre-sud, pas eux » . Aujourd’hui encore, Claudio affirme volontiers qu’il travaille souvent vingt heures sur vingt-quatre. Ajouter une touche de religion : « Ce que j’ai fait, je l’ai construit de mes mains, mais c’est la Divine Providence qui m’a mis sur le bon chemin. D’ailleurs, j’ai toujours un évangile et un rosaire dans ma poche » . Et, évidemment, un soupçon de folie quand il s’agit d’haranguer ses joueurs avant un grand match : « Même les armées invincibles succombent souvent contre ceux qui refusent de subir. Comme Napoléon ou Hitler en Russie. Qui aurait dit qu’ils seraient chassés de Russie grâce à un implacable marquage à la culotte ? » .
[page] « Forza Lazio »
Voilà donc Claudio Lotito tel qu’on l’imagine : un peu fou. Au moment d’apposer sa signature en bas du chèque pour acheter ses parts du club, l’homme, drapé d’écharpes aux couleurs des biancocelesti, a crié « Forza Lazio » et a remplacé sa sonnerie de téléphone par l’hymne du club. Avant de faire part de sa vision de la chose : « Un club de foot ? C’est comme une entreprise, il faut gérer ça en tant que manager. Mais je suis prêt à relever le défi. Je suis un tifoso laziale et, en tant qu’entrepreneur, c’est le plus beau jour de ma vie » .
La suite de l’histoire est un peu moins belle. Très vite, Claudio démontre son incompétence à gérer un club de foot, prend un malin plaisir à s’immiscer dans les choix sportifs de ses différents entraîneurs, alors même qu’il n’y connait rien, et détruit petit à petit le club. Seule une maigre Coupe d’Italie et une Supercoupe glanées en 2009 permettent de faire illusion. Aujourd’hui, Claudio Lotito fait l’unanimité contre lui. Les ultras locaux n’ont de cesse de réclamer son départ depuis plusieurs saisons, quand les journalistes romains ont entamé une campagne virulente pour l’inciter à faire ses bagages. L’année dernière, l’homme confessait, un peu goguenard : « Je suis certainement le pire président dans l’histoire de la Lazio, car je n’ai jamais réussi à être aimé de tous les supporters » .
Un mea culpa en forme d’hara kiri ? Pas encore. Dernière idée en date du Président, faire venir Daniele Popolizio, le préparateur mental de la nageuse Federica Pellerini, pour faire office de psychologue lors de la mise au vert de deux jours qui a précédé le départ des Romains en Sardaigne et transformer les joueurs en pitbulls. La réponse du capitaine de l’équipe, Tommaso Rocchi, ne s’est pas fait attendre : « Nous avons décidé de ne pas nous servir de ce coach mental. Nous n’en avons pas besoin. Le groupe a conscience du moment qu’il vit et nous pouvons nous en sortir tous seuls » . C’est désormais officiel : Claudio Lotito est seul contre tous. Combien de temps va-t-il encore tenir ?
Jimmy Fontana
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