Le Yin et le Niang
Longtemps dans l'ombre de Cristal Legs Cissé, Mamadou Niang a profité du passage à vide du Djib' pour devenir la seconde force de frappe de l'Olympique de Marseille, avec en sus ce petit brin de folie douce dont se délectent les supporters du Vélodrome. Un retour de flamme qui coïncide comme par hasard avec le retour vers les sommets du club phocéen. Niang ou l'art d'être constant.
En décembre dernier, Mamadou Niang est élu meilleur footballeur de l’année 2007 par la presse de son pays. Jusqu’alors, les relations avec l’opinion sénégalaise étaient houleuses. Une reconnaissance tardive pour un joueur reparti de zéro à qui tout réussit cette saison.
Né au Sénégal, Mamadou débarque à l’âge de deux ans en France, au Havre. Avant d’intégrer quelques années plus tard le plutôt réputé centre de formation du club doyen.
Parcours classique jusque-là quand intervient le drame : il n’est pas retenu et se retrouve prié d’aller voir ailleurs s’il y est. Rejeté comme un certain Samuel Eto’o. Mais à l’inverse de ce dernier, il décide d’arrêter les frais en stoppant sa carrière, à 18 ans.
Un parcours chaotique
Mais pas encore dégoûté du foot, il se relance en DH. « Quand Carlos Lopez l’a récupéré après Le Havre, il a joué à Saint-André-les-Vergers, club de l’agglomération (!) de Troyes et ça ne devait pas être évident. C’était un vrai challenge » témoigne Mohamed Bradja, coéquipier à Troyes.
Son ancien entraîneur le conseille à Perrin qui lui donne sa chance à l’ESTAC en 2000. Déjà puissant et véloce, il ne crève pas l’écran avec à peine une poignée de rencontres dans l’élite et encore moins de buts.
Le problème n’est pas son talent mais un poil dans la main chronique, comme le reconnaît Bradja. « Aujourd’hui, c’est bien ce qu’il lui arrive ! Ca confirme le bien que l’on pensait de lui. La seule différence avec l’époque de Troyes, c’est d’avoir acquis un comportement professionnel. A l’entraînement, il fallait lui bouger les fesses. Il la jouait tranquille » .
Secoué par Alain Perrin, il se retrouve titulaire la saison suivante mais marque à peine plus. Troyes ne le retient pas quand Metz décide de se le faire prêter.
Retour un cran en dessous, en L2 sous les ordres de Jean Fernandez. Avec Adebayor, ils font remonter le club avec quelques réalisations qui le font repérer par Metsu, alors coach du Sénégal. Il honore sa première sélection le 27 mars 2002, à quelques mois de la coupe du monde asiatique. Mais n’est pas retenu pour celle-ci, inaugurant une série de “Je t’aime-moi non plus” avec les Lions de la Teranga et doublé par Les Diouf, Fadiga et Henri Camara.
Nouvelle déception. Metz ne le garde pas et Niang de partir toujours plus à l’est pour rebondir une fois de plus : ça sera Strasbourg. En Alsace, il forme un tandem prolifique avec Ljuboja en inscrivant 8 pions en 6 mois.
Abandonné par son pote serbe, parti s’enterrer au PSG, Niang boude et ne plante qu’à une seule reprise. Avant de repartir à l’arrivée d’un nouveau camarade de jeu en attaque, Mickaël Pagis. Là, c’est la fête : presque trente buts à eux deux et le dépucelage de son palmarès : la Coupe de la Ligue 2005.
Niang à son zénith
L’OM saute sur l’occasion en reconstituant le duo l’année suivante. Niang, vendu 7 millions d’euros, score à 10 reprises. Progressant de jour en jour, le feu follet olympien fait étalage de sa technique, capable d’un match sur l’autre du meilleur comme du pire mais ne lâche jamais l’affaire. Bradja confirme : « Avec les passages délicats qu’il a vécus, il s’est forgé un mental. Mais sur le terrain, il a toujours été généreux, aimé se faire plaisir. Avec sa puissance et sa vitesse…Son principal défaut étant la faculté à défendre. Là-dessus, il était un peu feignant » .
Nonobstant des remous à l’OM, il est le meilleur buteur du club en 2006-2007 malgré la présence de Cissé à ses côtés en attaque, et porte l’équipe quasiment à bout de bras pendant la méforme de celui-ci. Pour la première fois, il n’a pas besoin d’un compère d’attaque pour briller.
Il devient dès lors incontournable et le club phocéen lui fait signer une prolongation jusqu’en 2012. Il en est déjà à son record de buts marqués (12 buts) alors que la saison n’est pas encore terminée.
Surtout, Mamadou est devenu décisif. Le 12 novembre 2007, il est l’auteur des deux buts de la victoire marseillaise sur l’OL. Si bien que Gerets le nomme capitaine en l’absence de Cana et que le FC Séville garde un œil sur lui en cas de départ de Kanouté.
Et le 7 mars dernier, en coupe de l’UEFA contre le Zénith Saint-Pétersbourg, Niang touche du bois à deux reprises avant de scorer. Blessé lors du dernier match, son retour est espéré pour la seconde manche pour passer l’obstacle russe. Des montagnes russes justement, à l’image de sa carrière.
Vincent Ruellan
Zénith Saint-Pétersbourg – OM, 17h30
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