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La Ruhr, terre de derbys

Par Sophie Serbini
5 minutes
La Ruhr, terre de derbys

Schalke 04 / Borussia Dortmund. Depuis toujours, cette rencontre qui oppose les deux géants de la Ruhr déchaîne les passions, à tel point qu'on en oublierait presque que la région possède de nombreux clubs importants et donc des rivalités à tous les étages. Car ici, là ou bat le cœur du football allemand, pas question de délaisser le club de sa ville pour supporter un des deux mastodontes.

Ce n’est qu’un match amical de pré-saison et pourtant les supporters du VfL Bochum donnent de la voix. Quelques insultes commencent même à fuser du côté des ultras en direction de l’adversaire. Et pour cause, en ce samedi 18 juillet 2015, c’est le Borussia Dortmund qui est en visite. Le BvB, c’est le club de la ville voisine et qui vient vous rappeler de temps à autre qu’il a mieux réussi que vous. Surtout ces dernières saisons. Alors que Dortmund squatte depuis six ans le haut du classement de la Bundesliga, Bochum est empêtré dans le ventre mou de la 2e division. De derby entre ces deux équipes, il n’y en a donc plus. On pourrait dès lors supposer que les supporters de Bochum (surtout les plus jeunes) s’enthousiasment pour les résultats de Dortmund, voire de Schalke, les deux monstres de la Ruhr. Et bien non. Car ici, dans une région où chaque grande ville a un club qui est passé par l’élite, pas question de supporter par défaut le club voisin, même lorsque celui mène mieux sa barque. On naît à Bochum, on supporte Bochum. Rares sont ceux qui osent déroger à cette règle. C’est une question de fierté. Sa fierté, chaque ville de la Ruhr y tient. Car même si toutes les villes semblent se ressembler, elles ont toutes pour ceux y vivent leurs spécificités. À Essen, malgré les mauvais résultats (le Rot-Weiß est aujourd’hui en 4e division), on continue à venir au stade et en masse. Le club possède la plus grosse affluence de toute la Regionalliga West avec 8208 spectateurs de moyenne. Il n’y a donc pas désamour en vue et encore moins de translation. On ne rend pas sa carte à Essen pour en prendre une à Schalke. Dans la Ruhr, on ne s’invente pas une vie qui n’est pas la sienne. Julia, fan du MSV Duisburg depuis toujours, insiste sur ce point : la fidélité envers et contre tout. « Ici, les gens sont vrais, authentiques. Ils supportent leur équipe jusqu’au bout des ongles, quels que soient les résultats. Il n’y qu’à voir, ici, à Duisburg : quand le MSV est descendu en 3e division , les fans sont venus aider leur équipe. Ils ont acheté tout ce qu’il y avait dans les fan-shops pour ramener de l’argent au club. Ils ont organisé des collectes, des fêtes… Et puis depuis que le club a connu la 3e division, il y a beaucoup plus de membres. Les gens sont encore plus attachés à leur MSV » , assure-t-elle. Supporter malgré tout sa ville est un des fondements de la région. Que cela passe par le foot ou autre. L’idée est de ne jamais délaisser sa maison.

Le folklore des derbys

Chacun supporte son équipe donc, et encore plus lorsqu’il s’agit d’affronter les voisins. L’an passé lors des derbys contre Oberhausen et Wattenscheid, le stade du Rot-Weiss Essen a accueilli 12 000 spectateurs en moyenne. Pas mal pour de la 4e division. Et pour comprendre cet engouement pour les nombreux derbys qu’offre la région, il suffit de regarder sur une carte la géographie du bassin de la Ruhr. Pour traverser la région, 30 minutes en train régional suffisent. Certaines villes comme Bochum et Dortmund ne sont même éloignées que de 10 minutes de transport. Par ailleurs, le S-Bahn 1 (équivalent du RER parisien) traverse toutes les grandes villes de la Ruhr, les unes après les autres de Duisburg jusqu’à Dortmund, les deux extrémités de la région. « Ici, toutes les villes sont collées, du coup quand il y a des derbys, il y a plein de monde qui se déplace. Tout le monde se retrouve dans le train » , explique Julia. Les derbys commencent dans les gares. Tout le monde s’y retrouve avec sa caisse de bière et son écharpe autour du cou. On observe les supporters adverses et on chante déjà à tue-tête pour impressionner l’autre. On est évidemment loin des affrontements parfois violents entre supporters lors des Dortmund / Schalke. L’ambiance est plus à la « chamaillerie » assure Julia. Mais la rivalité est là et quand un derby pointe le bout de son nez, l’impatience gagne la région. Ces petits derbys permettent aussi aux autres clubs de la Ruhr de faire un peu parler d’eux. Car depuis 10 ans, aux yeux des médias allemands, il n’y en a plus que pour le S04 et le BvB, les seuls rescapés en première division. La saison dernière, la rencontre entre Essen et Oberhausen (finale de Coupe du Niederrhein, ndlr) avait eu le privilège d’être diffusée sur la grande chaîne régionale WDR et un streaming était disponible sur Youtube. Une exposition bien venue pour ces clubs en mal d’amour en dehors des limites de leur ville et qui essayent de survivre à l’ombre du Schwarzgelb et du Königsblau.

La Ruhr avant tout

Malgré ses rivalités nombreuses, la Ruhr sait faire preuve de bon-sens et surtout de solidarité. « Quand il s’agit de montrer au reste de l’Allemagne ce qu’est la Ruhr, on s’unit. Quand le MSV est descendu en 3e division, il y eu une action de la part des fans de tous les clubs de la région. Une action qui avait pour titre « séparés par les couleurs- unis dans la cause » . Des gens de toutes la Ruhr sont venus soutenir le MSV » , se souvient Julia. Avant d’ajouter : « C’est ça la mentalité ici » . Et c’est là que repose toute la complexité du football dans cette région. Soutenir son club est primordial pour des raisons de suprématie régionale mais aussi pour montrer à une Allemagne qui se moque souvent d’elle que la Ruhr n’est pas uniforme mais plurielle. Que non, Esssen et Bochum, ce n’est pas la même chose. Que le grand Revierderby ne représente pas toute la région. Mais s’unir, lorsqu’une occasion en vaut la peine, c’est démontrer que le football dans la Ruhr n’est pas qu’affrontement et querelles d’anciens mineurs. En 2011, alors que Duisburg se faisait laminer par Schalke 5-0 en finale de Pokal, les supporters des Zèbres se sont mis à entonner des chants à la gloire de leur équipe durant tout le dernier quart d’heure. Une performance applaudie par les fans du Null-Vier. Les supporters des deux camps sont même allés boire des coups ensemble après (dans une ville de Berlin déjà acquise à la cause bleue et blanche, par ailleurs). Histoire de montrer au reste de l’Allemagne et à sa capitale de quoi la Ruhr est faite.

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