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Jérémie Boga : « Des dribbleurs, il y en aura toujours »

Propos recueillis par Léo Ruiz
6 minutes

Alors que le nouveau numéro de So Foot consacre sa Une aux dribbleurs, Jérémie Boga, le manieur de ballon de l’OGC Nice, revient sur son rapport au dribble, de son quartier marseillais au centre de formation de Chelsea. De retour en Ligue 1 depuis trois ans après des expériences en Angleterre, en Espagne et en Italie, l’international ivoirien de 28 ans l’affirme : la France est la patrie européenne du dribble.

Jérémie Boga : « Des dribbleurs, il y en aura toujours »

Quand as-tu compris que le dribble était ton truc ?

Tout petit. J’avais tout le temps le ballon dans les pieds, au quartier, sur la route de l’école, au club (à l’ASPTT Marseille, NDLR), partout. Je faisais des une-deux avec ce que je trouvais. Toutes les occasions de provoquer l’adversaire étaient bonnes pour moi. On habitait dans le quartier Bengale, dans le 9e arrondissement, et à l’époque, il n’y avait pas de city-stade chez nous. On avait donc créé un terrain avec les angles des immeubles. Même avec rien, on savait s’amuser.

Ça ressemblait à quoi, Bengale ?

C’était tranquille. Un vrai quartier de foot, tous les gamins aimaient le ballon. De la génération 1997, on était peu, donc je jouais avec les plus grands. Le dribble était partout, on se taquinait tout le temps. C’était « qui va passer qui ? ». Depuis petit, j’ai ce truc en moi, cette obsession de gagner mes duels.

Tu avais un dribble de prédilection ?

Non, moi, c’était conduite de balle, feintes de corps et crochet. J’ai jamais été un dribbleur qui faisait des passements de jambes, des virgules ou des trucs de fou. Mon style, c’était plutôt simple et efficace. Bon, je gardais un peu trop le ballon, mais je cherchais tout le temps à éliminer mes adversaires le plus vite possible.

Je n’essayais pas d’imiter Ronaldinho. C’est trop compliqué de reproduire ses gestes, donc c’était juste le plaisir de le regarder. Je prenais plus de choses chez les dribbleurs de mon style, comme Hazard.

Jérémie Boga

C’étaient qui, tes modèles ?

Messi, Hazard et Ben Arfa. Et vraiment tout petit, Ronaldinho. La référence ! Mais je n’essayais pas de les imiter, surtout pas Ronaldinho, c’est trop compliqué de reproduire ses gestes, donc c’était juste le plaisir de le regarder. Je prenais plus de choses chez les dribbleurs de mon style, comme Hazard.

Pourquoi il y a aussi peu de Marseillais qui percent, selon toi ?

C’est une bonne question. Paris est beaucoup plus grand, il y a beaucoup plus d’opportunités. Mais à Marseille, il y a beaucoup de talent. Dans ma génération, j’ai croisé plein de super joueurs chez les jeunes, mais c’est vrai que tous n’ont pas eu la chance de percer. Je pense que c’est une question de détails, de mentalité, d’opportunité… Mais pas de manque de talent. En France, des bons dribbleurs, il y en a dans toutes les villes. Dans les quartiers, tout le monde aime jouer avec le ballon, prendre des risques, faire des beaux gestes. Ça vient naturellement. En tout cas, chez moi, le dribble a toujours été ma force, et je pense que c’est ce qui a tapé dans l’œil des recruteurs de Chelsea (où il signe en 2008, à 11 ans, NDLR).

 

Riyad Mahrez et d’autres joueurs disent que les centres de formation français avaient tendance à brider les dribbleurs, en leur imposant le jeu à une ou deux touches de balles, notamment. Tu as senti ça, toi, à Chelsea ?

Honnêtement, non. On nous a toujours laissé la liberté de s’exprimer. C’était top. Après, on a aussi essayé de m’inculquer l’intelligence de jeu : savoir où dribbler et où jouer simple. C’est ça que j’ai dû apprendre à mettre en place là-bas. En France, j’ai entendu ça oui, qu’on empêchait parfois les jeunes de s’exprimer, mais je pense que ça dépend des clubs, et que comme à Chelsea, on essaye aussi de faire davantage réfléchir les dribbleurs, pour en faire des joueurs plus intelligents sur le terrain.

Nous, quand on avait du temps libre, on allait sonner chez nos potes pour descendre jouer, il n’y avait rien d’autre. S’il y a moins de dribbleurs purs aujourd’hui, c’est probablement dû à ça.

Jérémie Boga, déjà ancien

Tu as joué dans quatre grands championnats européens. Ils sont où les meilleurs dribbleurs ?

En France ! Sans hésitation. Il y a beaucoup plus de technique et de talent pur ici, même si comme on disait tout à l’heure, tous ne réussissent pas à faire une carrière. Je pense que ça s’explique encore une fois par le fait de grandir dans les quartiers, de passer des heures dehors le ballon dans les pieds avec tes potes et tes voisins. Ça te fait progresser sans même t’en rendre compte, tu tentes des nouveaux trucs tous les jours. Ça, je l’ai moins vu en Angleterre, où j’ai aussi passé une partie de ma jeunesse.

On dit justement que ce foot de rue a tendance à disparaître. Que les jeunes ne jouent plus dehors jusqu’à la tombée de la nuit, qu’ils ont d’autres occupations ou centres d’intérêt.

Je suis totalement d’accord avec ça. Aujourd’hui, les jeunes sont plus fixés à l’écran, entre la Playstation, les séries, les applications. Nous, quand on avait du temps libre, on allait sonner chez nos potes pour descendre jouer, il n’y avait rien d’autre. S’il y a moins de dribbleurs purs aujourd’hui, c’est probablement dû à ça. Même si des dribbleurs, il y en aura toujours.

 

C’est qui, le meilleur dribbleur avec qui tu as joué, toi ?

Il y en a pas mal… Eden Hazard, que j’ai eu la chance de côtoyer aux entraînements à Chelsea. Ousmane (Dembélé), à Rennes. Et en troisième, je dirais Paul-Georges Ntep ou Mohamed Ali Cho.

Il y a deux ou trois ans encore, je t’aurais dit que je préfère dribbler un joueur que marquer un but, mais aujourd’hui, ce qui compte le plus, c’est d’être décisif.

Jérémie Boga

Depuis le début de saison, c’est en Ligue 1, un championnat longtemps réputé pour son football défensif et ses équipes frileuses, qu’on tente et qu’on réussit le plus de dribbles. Ça te surprend ?

Non, parce qu’au-delà de ce qu’on se disait sur le talent pur, c’est ici qu’on trouve le plus de un-contre-un et de duels dans les matchs. Je suis revenu en France il y a trois ans maintenant, et je vois de plus en plus d’équipes venir presser haut, essayer de faire du jeu, de créer des occasions. Tout dépend des coachs et des systèmes de jeu, bien sûr. Par exemple ici à Nice, j’ai toujours eu des entraîneurs qui aiment attaquer.

L’autre ennemi des dribbleurs serait la data, ou l’omniprésence des stats, susceptibles d’inhiber la prise de risque. Ça a un impact sur ton jeu ?

Non. Les stats, je les regarde pas. Ça ne m’a jamais bridé ou mis une pression supplémentaire, même si comme tout le monde, j’essaye de marquer plus de buts et de faire plus de passes décisives. Il y a deux ou trois ans encore, je t’aurais dit que je préfère dribbler un joueur que marquer un but, mais aujourd’hui, ce qui compte le plus, c’est d’être décisif. Donc je m’adapte, même si je pense que c’est très important de ne jamais perdre le plaisir. C’est pour ça qu’on a tous kiffé le foot, qu’on est allé au stade et qu’on a rêvé de devenir footballeur.

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Propos recueillis par Léo Ruiz

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