Hristo Stoichkov : «Je n’ai pas changé»
Ballon d'or, attaquant de génie, et véritable tète de mule, Hristo Stoichkov l'avoue lui-même : «Je n'ai pas changé». Analyse du Barça-Madrid avec le plus gros ambianceur de l'histoire du Clasico.
Que représentait pour vous le Clasico lorsque vous étiez au Barça ? C’est un match de plus dans la saison, mais il est totalement différent des autres. Personnellement, en début de saison, lorsque nous avions le calendrier des matchs, c’est le premier que je cherchais. Pour moi, ça a toujours été un match spécial. Pour les grands joueurs, disputer un Barça-Madrid, c’est ce qui se fait de mieux en terme de sensations et d’émotions.
Pourquoi c’est si spécial ? Parce que c’est le meilleur match du monde ! Dans le monde, il y a peu de matchs que tu ne peux pas te permettre perdre. En Argentine, il y a le Superclasico entre Boca et River Plate, en Italie le derby milanais, même en France vous avez le petit Clasico entre le Paris Saint Germain et l’Olympique de Marseille Non ? Bon c’est vrai que ce n’est pas pareil question football…
Oui, on n’avait pas Hristo Stoichkov pour foutre le feu… (Rires) C’est bien d’allumer un peu les mèches, histoire de mettre la pression sur ton adversaire, mais ça c’était une autre époque. Ca ne se fait plus aujourd’hui, ou ça ne se fait plus aussi bien que je le faisais. Pour revenir au match de ce week-end, je pense que le Barça a une bien meilleure équipe que le Real Madrid. On a des meilleurs joueurs et on a fait un bon début de championnat, donc pour moi le grand favori, c’est le Barça. Comme d’habitude ! (rires)
C’est un match qui vous a toujours tenu à cœur on dirait… J’adorais ces matchs vraiment ! J’aimais leur faire mal, les humilier et que le Camp Nou nous encourage. C’était vraiment bon. Avec Cruyff, dans les années 90, on avait la meilleure équipe du championnat, les meilleurs joueurs, le meilleur entraineur, d’ailleurs on avait réussi à gagner 4 Ligas d’affilée assez facilement, puisque le Real n’avait pas d’attaque. Contre nous, il passait son temps à défendre dans son terrain.
Pourquoi aimiez-vous autant polémiquer contre le Real Madrid ? Chacun défend son camp, moi mon équipe c’était et ça reste Barcelone. De leur côté, les joueurs de Madrid faisaient pareil.
Aujourd’hui vous avez des amis madrilènes ? (Silence) Moi ? Je m’entends bien avec Hugo Sanchez, Zamorano, Butragueno ; je les salue quand je les vois, rien de plus. Si tous ceux à qui je serrais des mains étaient mes amis, ce serait difficile pour moi ! (rires)
Quel est votre meilleur souvenir du Clasico ? J’en ai disputé beaucoup, mais j’aime bien le 5-0 qu’on leur avait mis. Sinon il y a eu des matchs beaucoup plus intenses entre les deux équipes. Il y a un match où l’on avait gagné 2-1, grâce à un de mes buts. Mettre un but contre le Real, c’était vraiment un grand bonheur pour moi.
Et le pire souvenir ? La défaite 5-0 à Madrid.
Et comment aviez-vous vécu cette déroute ? Bah je n’ai pas eu ce malheur de le vivre beaucoup parce que l’arbitre m’avait expulsé après le 3-0. (Rires)
Quel est votre pronostic ? Le Barça va gagner 3-1. Mais du moment qu’ils gagnent, c’est bien.
Vous etes toujours en relation avec le Barça ? Je ne suis pas vraiment au club, mais j’entretiens toujours d’excellentes relations avec le club. En ce moment, je dirige trois écoles de football, deux à Barcelone et une en Bulgarie. J’essaie d’éduquer les gamins, leur apprendre comment on fait un contrôle, des trucs comme ça.
Quand vous parlez aux gamins, vous leur parlez du Barça ou du Real Madrid ? Moi je ne les influence pas. Ce n’est pas bien de les formater. S’ils veulent jouer attaquant, ils jouent attaquant, s’ils veulent jouer défenseur, ils jouent en défense. J’aime bien que les gamins fassent ce qu’ils veulent sur un terrain, il faut les aider à se forger une personnalité propre, sinon quel est l’intérêt ? Qu’ils soient tous les mêmes et qu’ils jouent tous pareil ?
Vous aimeriez bien entrainer un club français ? J’aime le football donc oui. J’ai une grande amitié avec Michel Platini, donc je pense qu’il saura me conseiller si l’un de vos clubs me contacte. J’aime les Français, ils sont sympas. J’aime Laurent Blanc aussi et j’ai une grande amitié avec ‘Chris Karembiou’. En football, il n’y a rien de nouveau depuis que j’ai raccroché les crampons. Comme dit Maradona, l’eau chaude n’est plus à inventer. Donc être entraineur pourquoi pas ? Et si c’est en France tant mieux. Ce que j’aime chez vous, c’est que vous formez beaucoup de jeunes joueurs de qualité. Pour moi, c’est très important car il n’y a pas que des étrangers dans vos clubs. Les jeunes c’est le futur, et ça, vos clubs l’ont compris. Maintenant il faut qu’ils arrivent à les conserver.
Vous auriez échangé le but d’Emile Kostadinov contre un 10-0 infligé au Real Madrid ? Non ! Pour rien au monde. Ca c’était un exploit pour mon pays. Les deux buts d’Emile contre la France, c’était extraordinaire pour moi et pour toute la Bulgarie. Pour rien au monde, je n’aurais échangé une qualification pour le Mondial 94.
Revenons au Clasico. Vous ne trouvez pas qu’il y a aujourd’hui moins de passion dans les Clasicos ? Peut-être. Moi je faisais les choses à fond et je n’ai pas changé aujourd’hui. Si je devais rejouer un Clasico, j’écraserais à nouveau le pied d’un arbitre (en 1990, dans son premier Clasico, le Bulgare s’était fait expulser pour avoir écrasé le pied à l’arbitre Urizar Azpitarte). Surtout si c’est “Quinou”, parce que c’est un énorme fils de pute.
Qui ça ? Quiniou ? Oui. En France vous avez de grands arbitres, mais lui c’était une catastrophe. Ca doit être le plus grand fils de pute de l’histoire de France. Et peut-être de l’histoire du monde. Embrasse ce batard de ma part, tu me le jures hein ?
Propos recueillis par Javier Prieto Santos
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