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Hernán Crespo : « Impossible de renier mon identité de jeu »

Propos recueillis par Georges Quirino-Chaves, à Buenos Aires
Hernán Crespo : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Impossible de renier mon identité de jeu<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

En Argentine, derrière Marcelo Gallardo ou Gabriel Heinze, il est l’un des entraîneurs qui montent. Après un court passage en Italie, Hernán Crespo (45 ans) est rentré au pays pour apprendre son nouveau métier. D’abord à Banfield puis aujourd’hui à la tête de Defensa y Justicia, l’ancien attaquant de l'Inter ou Chelsea n’a pas changé. Même sur un banc, il veut être une machine à buts. Son objectif ? Se faire les dents, avant de revenir en Europe par la grande porte. Deuxième partie d'un entretien avec un passionné en pleine réinvention, « El Profe » Crespo.

Pour (re)lire la première partie de l’interview avec Hernán Crespo, c’est par ici.

Que ce soit lors de ton court passage à Banfield ou maintenant à Defensa y Justicia, tes équipes ne passent pas inaperçues. Tu as par exemple réussi à chaque fois à bousculer le River Plate de Gallardo, qui est sûrement la meilleure équipe du continent. Une formation que tu as mise en difficulté en jouant, car même contre les grosses cylindrées, ton idée de jeu semble se maintenir avec ce mot que tu utilises constamment : le protagonisme.

Je peux m’adapter, mais pas changer. C’était la même chose quand j’étais joueur.

Je veux être, sur le terrain comme dans la vie, maître de mon destin. Je veux tout tenter avec mes capacités, et j’attends la même chose de mes joueurs. Je ne veux pas attendre de voir ce qu’il va se passer. Non ! Allons-y ! (Il se tape dans les mains, et son débit de paroles s’accélère.) Soyons protagonistes ! Je veux que nous ayons une identité, je veux respecter le jeu. Mon intention est de toujours être dans le camp adverse, créer beaucoup d’occasions de buts et empêcher le rival d’en avoir. Au milieu de tout ça, il y a un jeu et la qualité des joueurs à développer. Durant un match, un rival peut m’obliger à défendre, mais je ne vais jamais penser à mettre un bus devant ma cage. Non, non et non ! Créons une supériorité numérique, des situations de but et soyons offensifs. C’est ça, l’identité ! C’est ce que je suis ! Traitons bien le ballon ! C’est notre façon de respecter ce pour quoi nous jouons au football. Quand tu tombes amoureux du foot lorsque tu es petit, qu’est-ce qui est beau ? Se passer le ballon, marquer des buts et s’embrasser ! C’est ça, que je veux respecter ! Jouons au football, jouons ensemble, jouons pour marquer des buts et ne pas en prendre ! Parfois tu perds, l’adversaire est supérieur, mais je ne veux pas qu’on refuse le défi. Dans ma vie de joueur, j’ai joué toutes les finales possibles à part celle de la Coupe du monde. Ligue des champions, Ligue Europa, Jeux olympiques, Copa Libertadores, Coupe d’Italie… Dans toutes les finales, j’ai marqué. Est-ce que je les ai toutes gagnées ? Non, mais j’ai la sérénité d’avoir à chaque fois tout donné. Ce sentiment d’avoir été à la hauteur de l’évènement est pour moi une fierté, je veux que mes équipes soient comme ça. Je veux qu’elles donnent tout en respectant le rival, le jeu et les supporters. Est-ce que ça va suffire pour obtenir un résultat ? Je ne sais pas, mais je crois que c’est la meilleure manière d’obtenir un résultat positif. Aucun entraîneur au monde ne peut garantir un résultat, aucun. Ce que je peux garantir, c’est que mon équipe va avoir une identité. Le supporter va aller au stade, et pouvoir dire : « Mon équipe joue comme ça. »

Pour mettre en place une philosophie, ça demande souvent du temps. Non ?

Je veux que mes équipes soient ordonnées et disciplinées comme une équipe italienne, mais où le talent peut s’exprimer tranquillement.

Construire demande plus de temps que détruire, ce que je construis en un mois peut être détruit en un jour. Avec mon staff, on pense que notre identité peut se mettre en place en 25-30 entraînements. Si tu me demandes si on va gagner, je ne peux pas te répondre. Mais celui qui vient me chercher, je suis très clair avec lui. Ma façon de voir les choses, c’est comme ça. Est-ce que les dirigeants veulent soutenir ce projet, ou pas ? Il peut arriver que tout se passe super bien, il n’y a pas de problème. Quelqu’un doute ? Pas de souci, mais je ne vais pas changer ma philosophie. Je peux m’adapter, mais pas changer. C’était la même chose quand j’étais joueur. Je peux jouer avec Drogba, Claudio López, Shevchenko. Je peux m’adapter à l’autre, et je peux garantir que Crespo va marquer des buts. Tu comprends ? Maintenant, comment est-ce que j’arrive au but ? Avec Drogba, je faisais ça. Avec Robben, une autre chose. Avec Salas ou Shevchenko, c’était encore différent. Mais ce qui ne changeait pas, c’était mon identité. Comme entraîneur, c’est pareil. Je veux être offensif, gagner le match et attaquer de cette façon. Ça ne marche pas ? Tentons autre chose. Ce qui ne change pas, c’est l’identité. Je m’appelle toujours Hernán Crespo ! Et ce n’est pas parce que je joue avec Didier Drogba que je vais m’appeler Ricardo Ruben. (Personnage issu d’une chanson d’un groupe de rock argentin « Los Twist » , N.D.L.R.)


L’équilibre, tu t’en fiches ?Je viens du football argentin, où tu joues du milieu de terrain vers l’avant. Offensif, en mode « Vamos ». J’ai joué 22 ans en Italie, milieu de terrain vers l’arrière. Donc, qu’est-ce que je pense ? Le football argentin, je l’ai dans le sang depuis que je suis gamin. Je me suis dit que j’avais besoin de savoir comment pense un défenseur, connaître une culture défensive. J’ai donc décidé d’étudier en Italie à Coverciano, pour comprendre. Avec tout ça, il y a besoin d’équilibre. Je veux que mes équipes soient ordonnées et disciplinées comme une équipe italienne, mais où le talent peut s’exprimer tranquillement. Exemple. Si je suis ordonné et discipliné, je peux défensivement me permettre de perdre un ballon parce que j’ai tenté un dribble. Si je perds le ballon, il ne se passe rien de grave car on est bien en place. Mais j’ai besoin de cet ordre et cette discipline sans le ballon, pour que le talent puisse s’exprimer. Ce n’est pas grave, si tu perds le ballon ! Reste tranquille, joue ! Dribble, tire ! Si ça n’a pas marché, ce n’est pas grave parce que ton coéquipier va être là pour t’appuyer.

J’ai donné un coup de main extérieur à Carlo au PSG, on s’était mis d’accord pour qu’il m’intègre ensuite à son staff au Real Madrid.

Comment tu intéresses les jeunes joueurs à avoir cette culture tactique, cette intelligence dans le jeu ?Pour moi, c’est très simple. J’essaie de faire en sorte que les exercices soient ludiques et qu’ils soient compréhensibles pour tous. Avec le staff, on leur envoie un jour avant sur WhatsApp ce qu’on va faire et pourquoi on va le faire. De cette façon, ils arrivent préparés mentalement. Quand on commence l’exercice, ils savent déjà tout.

Pour l’instant, tu continues de te développer comme entraîneur en Argentine. Tu as un plan de carrière, en tête ?Je n’en sais rien du tout, je vis au jour le jour. Dans ma vie privée, je m’étais marié pour toute la vie. Depuis un an et demi, je suis divorcé. Tout a changé, mes filles sont en Italie et moi en Argentine. Qu’est-ce que je me dis ? Calme, essaie d’être heureux et de t’améliorer chaque jour qui passe. Les choses vont arriver toutes seules, je ne veux pas tout programmer. J’ai des objectifs, des rêves et je travaille tous les jours pour ça.

Tu as failli être adjoint d’Ancelotti, quand il était au PSG et ensuite au Real Madrid…

Je crois que quand tu as deux grands joueurs comme moi et Batistuta, ça vaut la peine de tester l’association aux entraînements.

J’étais encore en train d’étudier, à ce moment-là. J’ai donné un coup de main extérieur à Carlo au PSG, on s’était mis d’accord pour qu’il m’intègre ensuite à son staff au Real Madrid. Le truc, c’est que quand il est arrivé là-bas, Florentino Pérez lui a dit : « À ce poste où tu veux mettre Crespo, je veux mettre Zidane. » Il ne s’est pas trop trompé ! En plus, Carlo avait eu Zizou à la Juventus. Comme ça ne s’est pas fait, j’ai commencé de mon côté.

Maintenant que tu es entraîneur, tu as fini par comprendre pourquoi Bielsa ne vous a jamais fait jouer ensemble avec Batistuta à la Coupe du monde 2002 ? (L’Argentine est éliminée au premier tour après avoir fait la meilleure campagne éliminatoire de son histoire et Crespo est à chaque fois entré sur le terrain en remplacement de Batistuta, N.D.L.R.)

Ce serait opportun de demander à Bielsa s’il referait les mêmes choix avec moi.

Il faudrait lui poser la question. Je crois que quand tu as deux grands joueurs comme nous étions à ce moment-là, ça valait la peine de tester aux entraînements. En même temps, je comprends que dans un schéma de jeu qui avait si bien fonctionné pendant les éliminatoires, il ne voulait pas créer des doutes en changeant. Avec tout le respect que j’ai pour tout le monde, je pense que j’aurais dû jouer. J’avais été le buteur de tout le cycle Bielsa, et je marchais sur l’eau en Italie. Je pense que je ne pouvais pas plus le mériter que ça, mais je n’ai aucune rancœur. Il y a des moments où je l’admire, mais ce serait opportun que quelqu’un lui pose un jour cette question : « Marcelo, est-ce que tu referais le même choix et qu’as-tu appris de ça ? » Ce serait super qu’il l’explique !

Pour (re)lire la première partie de l’interview avec Hernán Crespo, c’est par ici.

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Propos recueillis par Georges Quirino-Chaves, à Buenos Aires

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