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Fort Chievo

Par Valentin Pauluzzi, dans la forteresse
Fort Chievo

Voilà treize ans que les ultras du Chievo ont établi leurs quartiers généraux dans cet ancien fort autrichien. Un siège original pour les North Side 1994 qui correspond finalement à leurs idéaux qui diffèrent de ceux de leurs homologues.

C’est l’un des symboles du quartier, et il porte d’ailleurs son nom. Le Forte Chievo a été construit entre 1850 et 1852 lorsque l’empire austro-hongrois dominait encore cette partie de l’Italie. Finalement peu utilisé, il a ensuite été occupé par l’armée italienne jusque dans les années 40. À l’abandon, mais encore très bien conservé, la commune a décidé de le louer aux associations locales afin qu’elles y installent leur siège. En 2002, les North Side ont donc tout défriché, nettoyé et rafistolé, y installant eau et électricité, tables, bar, télé et même cuisine en extérieur. C’est ici que les ultras du Chievo se retrouvent pour déguster quelques bières et se remémorer leurs bons moments, avec un mot d’ordre : « Pas d’affrontements ni de politique, on est là pour s’amuser. » Ce n’est d’ailleurs pas pour rien s’ils reçoivent régulièrement le Trophée Gaetano Scirea récompensant les supporters les plus fair-play d’Italie.

« Ceux de l’écluse »

« Je suis un des membres fondateurs, j’avais onze ans à l’époque, c’était en 1994 après la première montée en Serie B » , raconte Mirko, lunettes de soleil visées sur le nez et bière Moretti en main. « Je suis tombé amoureux du Chievo lors d’un match de Serie C contre Pescara que j’étais venu voir avec des copains. À l’époque, il y avait à peine 10 mecs qui chantaient. Ma mère, elle, était ultra du Hellas et a même écopé de plusieurs IDS. » Un vrai pionnier donc. Accompagné de ses comparses Cristiano, Manuel et Gigi, il fait la visite des lieux dont la fraîcheur contraste avec les 35 degrés en extérieur. Écharpes, drapeaux et photos souvenirs tapissent les murailles. Le personnage Marvin des Looney Tunes n’est pas un symbole choisi par hasard, « parce que nous sommes des martiens comme lui ! » Et il ne s’agit pas là d’une exagération. Jusqu’à il y a 30 ans, le Chievo était une commune à part entière de 1500 habitants, puis le Borgo Nuovo a été construit et la jonction a été faite avec la ville de Vérone. Régulièrement, l’inscription « frazione di Verona » est barrée sur le panneau à l’entrée du quartier.

En toute logique, l’ascension des North Side 1994 est liée à celle de leur club : « Désormais, 80% des habitants du quartier supportent le Chievo, mais cela a mis du temps. Il y a encore un bar de supporter du Hellas ici. Très souvent, les « Clivensi » sont d’anciens supporters des rivaux, et lorsque ces derniers sont revenus en Serie A il y a deux ans, on a perdu des « butei » (mot de patois local signifiant « mecs » , ndlr), qui étaient de chez nous. Malheureusement, le supporter moyen suit l’équipe qui marche le mieux. » D’ailleurs, le déplacement à Carrare en mai 1994 pour fêter l’historique promotion en Serie B avait été organisé par le kop du Hellas. Mais depuis, les contours de l’identité se sont dessinés : « Nous sommes ceux de l’écluse » , lance fièrement Manuel tout en dévoilant le tatouage sur son biceps.

Hellas, entre rivalité et admiration

Les rapports avec les « Veronesi » ont longtemps été cordiaux, mais les onze années passées parmi l’élite en leur absence ont changé la donne : « Lorsqu’ils étaient à deux doigts de finir en 4e Division en 2007, ils ont sorti l’histoire des symboles et des couleurs qu’on leur aurait piqués. Ce sont surtout les journalistes locaux qui supportent tous le Hellas qui ont monté cette polémique. » Mirko se lance alors dans un cours d’histoire : « Si vous prenez la photo la plus ancienne, la « scala » (une petite échelle, ndlr) est déjà cousue sur le maillot des joueurs… » Les rapports sont alors parfois tendus, et par deux fois des ultras rivaux sont venus au Fort pour tenter de s’expliquer, mais malgré tout, Cristiano assume : « En tant queclivense, je peux dire sans aucun souci que j’admire le spectacle qu’ils offrent en tribunes. » Du Hellas dérivent aussi les rivalités avec d’autres kops italiens : « La Samp, la Lazio et la Fiorentina pour leur jumelage » , tandis que les amitiés nouées rappellent les années Serie B et C : « L’Albinoleffe, Monza ou encore la Pro Sesto. »

Mais si tous les ultras de la Botte se moquent volontiers du petit nombre de Clivensi, ils les respectent également. « Parce que, peu importe le déplacement, on l’organise toujours et on est toujours une cinquantaine, une excellente proportion par rapport aux 2000 abonnés. » Tout en décapsulant une autre bière, Manuel se rappelle un joli périple pour les matchs de préparation l’été dernier. « Tout en bus, à 10h, on était à Altach en Autriche. À 3 heures du mat’, de retour à Vérone et on a repris la route direct pour Marseille où il y avait un amical contre l’OM. On y était à 10h30. » Les années passent et si les rangs ne se gonflent pas, des sections se créent dans d’autres villes. « Lors d’un dep’ chez la Samp, on tombe sur des jeunes génois qui nous ont dit : « On vous admire, on peut venir avec vous ? » » raconte Mirko dont chaque phrase est rigoureusement ponctuée par un « Dio can » .

Le Fort Chievo enfin en Curva Nord

À chaque fin de saison, les North Side organisent leur fête au Fort, mais aussi un tournoi de football. « Le capitaine Pellissier nous appelle pour demander s’il peut venir jouer, vous en connaissez beaucoup des comme ça ? » Tandis que Roberto Guana a marqué les esprits malgré son court passage : « Il venait boire des coups ici et c’était le premier à mettre l’ambiance. » Toutefois, les petits poucets pullulent en Italie avec les récentes montées de Frosinone, Carpi ou Sassuolo, mais le « capo » met de suite le holà : « Ce sont des villes de plusieurs dizaines de milliers d’habitants, rien à voir avec nous qui sommes un quartier de 2000 âmes. Ce n’est pas comparable. Nous sommes uniques et inimitables. » Mais détrompez-vous, ici, on garde bien les pieds sur terre : « On sait très bien qu’un jour, on repartira d’où l’on vient. D’ailleurs, la relégation de 2008 sonnait comme le début de la fin. Heureusement, on est vite revenus parmi l’élite » , réplique Cristiano. Derrière lui, Gigi émerge sur sa chaise et raconte la mésaventure qui l’a rendu célèbre sur le net :

Vidéo

L’été 2015 est une autre date qui marquera l’histoire des North Side. Les « butei » du Chievo vont enfin quitter la Curva Sud du Bentegodi, qu’il partageait jusqu’alors avec les ultras rivaux, pour aller en face, dans la Nord. « Il est difficile de combattre face aux institutions locales qui sont toutes dirigées par des supporters du Hellas. D’ailleurs, le Véronais est très territorial, les supporters de la Juve, de l’Inter et du Milan sont des marginaux ici » , conclut Mirko. Et quand on lui demande de définir ce que signifie être « clivense » , il répond : « Avoir une grosse paire de couilles. Petit, tu souffres beaucoup, car tu dois te défendre face à la masse. » Et ce, même si les remparts de Forte Chievo sont là pour les protéger des assauts adverses.

Par Valentin Pauluzzi, dans la forteresse

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