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Emmanuel Macron, une chance pour le foot français ?

Par Nicolas Kssis-Martov
Emmanuel Macron, une chance pour le foot français ?

Le peuple de France a donc choisi un jeune premier centriste plutôt qu'une héritière d'extrême droite. Emmanuel Macron sera notre nouveau président de la République. Et comme à chaque fois que l'Élysée change de locataire, le petit monde du football se demande si le passage de témoin se révélera bénéfique pour lui. Cette fois, il a de bonnes raisons, plus que légitimes, de penser qu'il a tiré le bon numéro.

Il ne faut pas se mentir, à l’instar d’une grande partie du pays, le football français s’est senti pour le moins soulagé dimanche soir. Son inquiétude ne l’avait pourtant pas dans son ensemble poussé à sortir de sa prudente réserve – seules quelques personnalités avaient appelé à faire barrage au FN (Blaise Matuidi ou Frédéric Thiriez, comme quoi !) –, il n’empêche que le programme de la présidente frontiste – plutôt amoureuse du rugby viril de nos terroirs – ne semblait guère correspondre à ses attentes. Même l’annonce de la nomination d’un « coach français » comme ministre des Sports – qui doit prier désormais le ciel que son nom ne sorte jamais, à moins qu’il s’agisse d’une énième fake news de cette campagne – n’avait pas franchement suffi à le rassurer. Les intonations protectionnistes et Maurassiennes de Marine Lepen sur le sujet – « soutenir les petits clubs afin de permettre la présence d’un maximum de joueurs français dans les clubs professionnels et lutter contre la financiarisation du sport professionnel » – s’avéraient de facto peu en accord avec un foot pro qui ne cesse d’entendre l’appel du large et se convertit de plus en plus aux rites économiques du foot international.

Usines à gaz administratives

Certes, une fois la République sauvée, il faudra maintenant voir et composer avec Emmanuel Macron. Et sans sortir les cotillons et le champagne, les cœurs chantent sûrement du côté de la FFF et surtout de la LFP. Toutefois, commençons par expédier les évidences. Le foot se moque gravement de la plupart des idées contenues dans la partie « sport » du programme d’En Marche. Ces mesures phares, que les candidats trimbalent auprès de chaque secteur de la société concernée, mais qui, surtout dans le domaine sportif, débouchent rarement sur le moindre article de loi. Que dire, par exemple, de l’idée tellement dans « l’air du temps » de fonder un grand ministère « des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques » – preuve que les usines à gaz administratives ont de beaux jours devant elles –, quand le ballon rond n’éprouve plus aucun frisson depuis une éternité devant les précieux anneaux.

Par ailleurs, la Fédération aussi bien que la Ligue savent que, dès que les choses deviennent sérieuses, c’est au palais que tout se joue et certainement pas dans les réunions de cabinet d’un secrétaire d’État. Quant aux belles déclarations sur le sport santé ou même le sport à l’école – alors que le foot a depuis longtemps rompu les amarres avec l’EPS et réciproquement –, elles risquent peu de soulever les foules dans les districts. Le foot amateur dans son ensemble ne devrait effectivement guère sentir la différence. Il sera peut-être bien davantage touché par la réussite ou les échecs de politique générale (relance de la croissance, chômage, pouvoir d’achat,..) que par la mise en œuvre d’un énième plan de valorisation du bénévolat.

Un foot français qui gagne des matchs de Ligue des champions

S’il faut chercher des raisons de se réjouir, il faut lever les yeux vers la Ligue 1. Certes, dans l’immédiat, rien ne paraît de nature à modifier l’équilibre actuel. Toutefois, l’humeur politique et le fond culturel d’Emmanuel Macron – puisque sa ligne idéologique reste pour le moment indéfinissable – ouvrent de nouvelles et passionnantes perspectives. Il existe presque une convergence, une contemporanéité, entre un foot pro en pleine révolution copernicienne dans sa façon de penser le capitalisme sportif mondialisé et un Emmanuel Macron qui veut faire de la France un tycoon européen. De ce point de vue, la saison 2016-2017 a démontré que les clubs français, avec des modèles divers, peuvent encore briller en Europe, donnant presque l’impression de conforter, sinon d’avoir anticipé, le résultat du 7 mai.

N’oublions pas, au passage, que le conseil d’administration de la LFP a adopté le 20 avril 2017 un « plan stratégique » pour son quinquennat 2017-2022, avec pour ambition de se hisser parmi le Big Four européen, en s’appuyant sur les mêmes armes et recettes que ses concurrents du Vieux Continent (formation, marketing, etc.). Une démarche qui ne peut que plaire à ce Picard amoureux de l’OM et dont la passion pour ce sport conjugue sans fausse pudeur l’attrait du produit marketing et la qualité du contenu culturel. Une certaine façon de penser le foot, fort éloigné d’un François Hollande sortant de sa manche la carte du romantisme à crampons avec son penchant affirmé pour le Red Star devenu, par son atypisme, gage de son ancrage à gauche. Macron veut un foot français qui gagne des matchs de Ligue des champions sur beIN Sports autant qu’il parle à notre mémoire nationale.

Exemple pour la jeunesse

En accord avec cette visée, le futur chef de l’État ne fera probablement pas revivre à nos clubs le douloureux épisode de la taxe à 75%, et l’humiliation d’une grève avortée qui a laissé de douloureuses traces entre l’État et la ligue. « Nos clubs professionnels souffrent d’un manque de compétitivité. Pour leur permettre d’attirer les meilleurs, d’obtenir l’organisation des grandes compétitions, j’agirai au niveau européen, notamment pour rapprocher les règles fiscales qui diffèrent trop d’un pays à l’autre. » Nul doute que les discussions seront fécondes à ce propos, d’autant plus que Jean-Michel Aulas, désormais quasi vice-président de la FFF, pourra profiter des contacts privilégiés des réseaux lyonnais (Collomb et Braillard notamment) auprès d’Emmanuel Macron, pour construire une relation de confiance entre les instances du foot et l’Élysée.

Dernier point, peut-être le plus sous-jacent : la place qu’Emmanuel Macron accorde au football dans notre architecture sociale. Son attention pour le foot ne se réduit pas à observer des champions dont le principal rôle consisterait à servir d’exemple à notre jeunesse. Si leur destin le passionne, c’est qu’ils sont d’abord un exemple de réussite professionnelle contre la fatalité de la discrimination et de l’échec scolaire, avec la compétence et le travail comme seul critère. « Avec les centres de formation, les clubs ont embauché des jeunes de ces quartiers sans se soucier d’où ils venaient tout simplement parce qu’ils étaient les meilleurs au ballon. On a fait pareil avec les comiques. Pourquoi ce serait interdit dans le monde de l’entreprise ? » Épousant un paradigme surtout anglo-saxon et fort peu coubertinicien, Macron regarde le marché du travail avant les chartes éthiques. Karim Benzema ne s’y est pas trompé en envoyant un tweet de félicitations.

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