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Driver : « Je voulais être Bruno Bellone »

Propos recueillis par Christophe Depincé
Driver : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Je voulais être Bruno Bellone<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Depuis plus de vingt ans, Driver irradie le rap français de sa bonne humeur. Et si sa réputation de « Père Castor » n'est plus à faire, il y a bien une histoire qu'il n'avait encore jamais racontée : celle de sa passion pour l'AS Monaco. Alors qu'il s'apprête à sortir un nouvel EP - Maintenant j'suis chaud -, rencontre avec celui que l'on appelle aussi à Sarcelles « le maire de la ville ». Un homme qui dédie son interview au regretté David di Tommaso a forcément beaucoup de choses à dire sur son club de cœur.

Comment devient-on supporter de l’AS Monaco quand on a huit ans et qu’on habite à Sarcelles ?La première compétition que je suis, c’est l’Euro 84. Après le nom de Platini, celui que j’entends le plus, c’est Tigana. Mon frère retient son nom et devient supporter de Bordeaux. Moi, je n’ai toujours pas mon joueur fétiche. Vient la finale : le coup franc bizarre de Platini qui glisse sous les bras d’Arconada… Je le trouve dégueulasse ce coup franc, je ne suis pas en train de me dire : « Il faut que je devienne fan de ce mec-là. » Et là, le deuxième but : Bruno Bellone. Il s’échappe, pichenette… Je collectionnais les images Panini de l’Euro. Sous les images de chaque joueur, il y avait un CV. Je vois qu’il joue à Monaco et je me dis direct : « Moi, je suis supporter de Monaco. » J’achète tous les magazines de foot et dès qu’il y a un article sur Bellone ou Monaco, je lis avec attention. Je voulais être Bruno Bellone. À cette époque, quand t’étais gaucher, tu jouais à gauche. À onze ans, je vais m’inscrire au club de foot de Sarcelles. On me demande mon poste : « Ailier gauche. » Sauf que je suis droitier, mon pied gauche est tout pourri !

T’as un peu inventé le pied inversé en fait…Voilà ! (rires) J’étais tellement fan de lui. En plus, il avait une grosse frappe.

J’ai fini stoppeur quand j’ai commencé à grossir. Notre défense, c’était juste quatre barbares qui ne dépassaient pas la ligne médiane.

En banlieue, marquer un but en finesse, on s’en foutait, on voulait juste allumer le gardien, lui faire du mal. Mon entraîneur a vu que je n’avais pas de pied gauche et m’a replacé ailier droit. Je jouais dans le même club que Christanval. Quand j’étais en cadets, il était en minimes. J’ai fini stoppeur quand j’ai commencé à grossir. Notre défense, c’était juste quatre barbares qui ne dépassaient pas la ligne médiane.

Tu regardais les matchs ?Je les suivais à la radio et je les regardais en crypté sur Canal Plus. Le crypté n’était pas aussi dur qu’aujourd’hui, tu voyais quand même. La radio, c’était magique. Ça développait l’imagination. J’étais fan de Saccomano, le mec t’ambiançait à chaque but. Et puis les multiplex…


Quel a été ton joueur préfèré après l’époque Bellone ?Tu vas croire que je le fais exprès, mais encore un ailier gauche : Youssouf Fofana ! Magnifique ce joueur, un dribbleur fou. Après, Weah, évidemment. Mais il avait de sérieux problèmes en hiver, il ne marquait plus. Il avait froid !

Quelle est la première campagne européenne qui te marque ?À l’époque, la réputation de Monaco était d’être bon en championnat, mais nul en Europe. Et puis il y a le quart de finale de C1 (1988/89, ndlr). Je viens d’un quartier où il y avait beaucoup de Turcs. Eux savaient que j’aimais Monaco, ils étaient tous là : « On va vous tuer ! » Moi, je suivais un peu les coupes d’Europe et je n’avais jamais entendu parler de Galatasaray comme d’une grande équipe. Je pensais qu’on allait gagner. Et on perd à Monaco sur une tête de Tanju Çolak.

En 1992, il y a la finale de Coupe des coupes un peu tombée dans l’oubli contre le Werder, notamment en raison de la tragédie de Furiani survenue la veille.Je n’oublierai jamais cette image d’Ettori. Monaco est mené 1-0, il y a un ballon qui va en sortie de but. Normalement, t’es pressé de relancer. Et là je vois Ettori qui va chercher le ballon en marchant. On voit à sa tête qu’il est là sans être là. En tant que Corse, il était encore plus touché que les autres.

Quand vas-tu pour la première fois à Louis-II ?Quand je sors Le Grand Schelem, en 1998.

Je venais de dire à Thierry Henry d’aller se faire enculer !

Le magazine L’Affiche écoute mon album, le trouve original et veut donc faire une interview originale. Moi, en grand gamin, je dis : « Ouais, ce serait bien si on allait à Monaco, voir un match… » Je n’y étais jamais allé. J’en profitais à l’époque de mon premier album, je réalisais tous mes rêves comme ça. Il y a une fille que j’aimais bien à la télé. Je demandais à ce qu’elle soit dans l’album ou dans un clip juste pour la rencontrer. La France venait d’être championne du monde : Barthez, Trezeguet, Henry… Les mecs de L’Affiche me disent : « On s’occupe de tout. » Je suis en pleine promo, je ne calcule plus. Un jour, je suis à la maison de disques en train de parler avec ma directrice artistique et je reçois un coup de fil : « Allo, c’est qui ? » Le mec répond : « Ouais, c’est Thierry Henry » ; « C’est ça, c’est qui ? » ; « C’est Thierry Henry » ; « Bon, va te faire enculer… » Je raccroche. Je me dis que c’est une blague d’un pote. Je n’ai pas le temps, je suis en pleine réunion. Vingt minutes plus tard, un mec de L’Affiche m’appelle : « Alors, c’est bon, tu l’as eu !? » ; « Qui ? » ; « Bah Thierry Henry ! » Je venais de dire à Thierry Henry d’aller se faire enculer ! Bon, ils ont réussi à rattraper le coup. Le match auquel on a assisté après l’interview, c’était un Monaco-Lens, 2-0. Un remplaçant est entré, je me suis dit : « Putain, lui, il est trop fort… »

C’était qui ?Giuly ! Le match se termine, Henry et Christanval m’appellent : « Viens, on va au vestiaire… » Il y avait Barthez, Ikpeba, Gava, Sagnol… Giuly me voit et dit à Philippe : « Ah tes copains de Sarcelles sont venus, c’est pour ça que t’étais pas trop concentré aujourd’hui ! » Philippe était vraiment fort, il avait beaucoup de classe dans son jeu, comme dans la vie. J’étais comme un gamin, tout ce que je voyais en crypté chez moi, j’étais dedans ! Tu vois ces arcades derrière le but ? Sur Canal Plus, avant chaque match, ils montraient ça. Quand je les ai vues en vrai, j’ai eu envie de pleurer. On est en 1998, il y a toute ma jeunesse de supporter qui défile dans ma tête. Alors quand je me retrouve après le match dans le vestiaire…

Tu as fait le gamin à demander des autographes ? J’étais dans un autre trip. Au milieu du vestiaire, il y avait une grosse corbeille où ils jetaient leurs maillots sales. J’étais là dans ma tête : « Putain, si je pars avec ce caddy-là… Nan, fais pas n’importe quoi… » Le lendemain, décrassage à La Turbie. Je veux une photo avec Tigana et Ettori. Je le dis à Thierry, il appelle Ettori, pas de soucis. Mais pour Tigana, il me dit : « Attends, lui, c’est pas pareil… »

Il avait un mauvais caractère…C’est ce que j’ai compris à ce moment-là. Thierry me dit qu’il faut qu’il aille lui demander d’abord. Il y va : « Oui, il y a mon ami, il vous aime bien… » Tigana : « Bah alors, il a bon goût ! Ramène-le ! »

Tu n’as jamais fait partie d’un club de supporters ?La première fois que je vais à Louis-II, je croise un mec : « Oh Driver ! J’écoute tes chansons, qu’est-ce que tu fais là ? » Je lui raconte et il me demande de devenir président d’honneur de son club de supporters. J’ai failli verser une larmichette ! J’ai dit oui, mais je ne me suis jamais retrouvé en Pesage avec eux et ça me faisait mal au cœur. Il me disait : « Je comprends, t’es Driver, tu dois avoir de super places, mais j’espère qu’un jour, tu viendras apprendre les chansons avec nous. » Et j’en avais envie, mais j’avais un pote qui me logeait et m’obtenait de super places à chaque fois que j’allais à Monaco. Et, à un moment, mon pote a commencé à avoir les loges, petits fours, champagne… Là, c’était fini. Mais j’adorerais faire un vrai déplacement avec les supporters. Mes seuls « déplacements » , c’était au Parc. Il y a un PSG-Monaco où Gallardo met une frappe incroyable (2001/02, 2-1 pour l’ASM, ndlr). Au milieu des supporters du PSG, j’essayais de rester stoïque, mais j’étais fou dans ma tête, ça débordait de moi. Ils me regardaient tous véner.

Tu es allé à Louis-II pour la Ligue des champions 2003/2004 ?

J’ai vu un des plus grands matchs de l’histoire de l’ASM : La Corogne, 8-3. Rien que la musique d’avant-match, j’avais des frissons. J’ai été béni des dieux de me retrouver à Monaco ce jour-là.

J’ai vu l’un des plus grands matchs de l’histoire de l’ASM : La Corogne, 8-3. Rien que la musique d’avant-match, j’avais des frissons. J’ai été béni des dieux de me retrouver à Monaco ce jour-là. C’est que La Corogne en vrai. C’était au-dessus de Monaco à l’époque, mais tu ne te dis pas : « Oh, La Corogne ! Faut absolument que j’aille voir ce match ! » Cette équipe était magique. Pršo m’avait impressionné la première fois que je l’avais vu à La Turbie. J’avais demandé à Philippe qui c’était, il n’arrivait pas à dire son nom. Son égalisation contre Nancy qui nous donne le titre, c’est l’un de mes plus beaux souvenirs (1999/2000, 2-2, ndlr). Au lycée, j’avais un pote fan du PSG : Siramana Dembélé. Le samedi matin, sur les tables, on faisait nos Loto Foot et on voyait qui avait raison le lundi. Lui est devenu pro. Il est parti au Vitória Setúbal. Et qui il a comme coéquipier ? Grégory Lacombe ! Il n’arrêtait pas de lui dire : « Mon pote fan de Monaco, il t’aimait trop ! » Le mec était content, il ne devait pas avoir beaucoup de fans. Mon pote a terminé sa carrière au Standard et est retourné au Portugal pour être l’adjoint de Conceição. Aujourd’hui, il est entraîneur adjoint du FC Nantes !

Tu étais dans quel état quand Monaco élimine le Real Madrid ?J’ai fini par terre sur la moquette. Je te dis la vérité : j’ai pris un maillot de Monaco, j’ai appelé un pote qui est supporter de l’OM et je lui ai dit : « Tu m’emmènes aux Champs-Élysées. » Je marchais tout seul sur les Champs. J’étais avec mon maillot que je ne pouvais même pas mettre parce que j’étais énorme. Les gens me regardaient comme un fou. Un mec me dit : « Ah j’ai vu le match, mais t’es le seul supporter de Monaco sur les Champs ! » J’ai dit : « Je m’en fous, on a sorti les Galactiques. »

Entre le titre de champion et un dernier carré en Ligue des champions, tu choisis quoi ?Le titre de champion. Ça fait trop longtemps qu’on n’a rien gagné. On en a fait des derniers carrés de LDC, on connaît. Je veux qu’ils la gagnent, moi. Monaco a un lien spécial avec la Coupe d’Europe. En 98, on sort Manchester et on tombe en demi-finales contre la Juve… Christanval m’avait dit : « Zidane, ça va trop vite, j’ai pas vu le ballon, il faisait des trucs bizarres, je comprenais pas… » Tout ce qu’ils réalisent cette année en championnat… Tu ne peux pas faire tout ça pour rien.

City, ça va être le match de Falcao, je le sens.

City, ça va être le match de Falcao, je le sens. Je suis parti en Colombie pour un clip l’été où James et Falcao signent à Monaco. Je me retrouve à Carthagène et je parle de foot avec un jeune : « Ça me ferait plaisir que tu viennes tourner une partie de ton clip dans mon barrio… » Le mec vient d’un vrai ghetto, mais je sens que je vais être en sécurité. Et je suis reçu royalement. Le mec m’explique : « Tu vois, ce quartier, c’est là où a grandi Juan Pablo Pino. » Je suis fou, je demande s’il est là. « Oui, il est en vacances » ; « Je veux qu’il soit dans mon clip, on va à la plage et on fait une scène où on joue au foot ! » Il me dit : « Pas de problème, tu vois lui ? C’est son meilleur ami ! » Ils l’appellent : « C’est incroyable, un supporter de Monaco est là à Carthagène en ce moment, il est même à Barrio Chino ! » Et en fait, Pino vient de partir le jour même. J’étais dégoûté. C’était un génie en vrai, mais il aurait fallu qu’il soit sérieux. Ils me l’ont dit là-bas : il s’en fout, il boit… Quand j’ai vu où il a grandi, j’ai compris.

Ton onze de rêve de l’ASM ?(Après moult tiraillements) Ettori – Amoros, Thuram, Roger Mendy, Valéry – Hoddle, Zikos, Bernardi, Gallardo – Weah, Trezeguet.

Le banc ?Roma, Ibarra, Márquez, Scifo, Nonda… Il y a un joueur, tu vas me dire que je vais trop loin parce que plein d’attaquants passent avant lui dans l’histoire du club, mais c’est le cœur qui parle. Il marquait des buts importants, qui donnaient un peu d’espoir quand Monaco allait mal. Malheureusement, il s’est blessé. C’est Alexandre Licata. Je sais que tout le monde l’a oublié. Putain, j’ai oublié Bellone. Henry bordel… Giuly ! Il était marrant en plus. Une fois, j’étais à La Turbie, je le vois sortir du vestiaire avec une grande binouze à la main, normal ! Genghini… Je ne peux pas faire cette équipe en vérité. Si on la refait dans cinq minutes, elle sera complètement différente.

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Propos recueillis par Christophe Depincé

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