Del Bosque : « Le Clasico, le plus bel évènement sportif du monde »
Entretien avec le sélectionneur espagnol Vicente Del Bosque, accessoirement ancien joueur et entraîneur du Real Madrid, à l'approche du Clasico.
Qu’est-ce que représente le Clasico pour vous ? C’est un match de football différent. Toutes les émotions sont multipliées par dix. Malgré ce que tout le monde peut penser, les Clasicos sont des fêtes du football. Il s’y passe toujours quelque chose, que ce soit dans les tribunes, sur le pré ou sur les bancs des remplaçants. C’est et ça restera toujours le match de l’année en Espagne.
Mais pourquoi autant de passion autour de cet affrontement ? Quand deux clubs avec autant d’histoire et de titres se rencontrent, ça fait des étincelles ! Le Barça et le Real Madrid sont les plus grands clubs espagnols et peut-être du monde. Ces équipes ont les plus beaux stades d’Europe, les meilleurs joueurs… Messi, Casillas, Iniesta, Eto’o, Cannavaro, Ramos, Robben… C’est magnifique ! Le public va prendre beaucoup de plaisir, j’en suis sûr. Après, ce n’est pas simplement un match où l’on gagne trois points à la clé, c’est une question d’honneur, d’orgueil et de dignité. Celui qui gagne met une pression énorme à celui qui perd. Personnellement, je considère le Clasico comme le plus bel évènement sportif du monde ; seulement comparable avec des finales de coupe du monde ou de Ligue des champions. C’est une publicité incomparable pour la Liga. Médiatiquement, c’est même plus fort que des Inter-Milan, des Juve-Milan ou des rencontres du Big four. C’est un match au parfum particulier, voilà pourquoi c’est la meilleure vitrine du foot espagnol.
C’est aussi un affrontement entre Catalans et Castillans ? Je ne pense pas qu’il existe encore une dimension idéologique ou politique dans les Clasicos. Ça a peut-être été le cas à une époque, mais plus maintenant. Les Catalans et les Castillans s’entendent bien. Il y a deux heures, j’ai mangé avec des anciens joueurs barcelonais, on s’est rappelé des souvenirs de matchs dans la bonne humeur. La plupart des joueurs se connaissent, se respectent et s’apprécient. Le titre de champion d’Europe de l’Espagne montre d’ailleurs qu’il n’y a pas de clans pro-Catalans ou pro-Castillans.
C’est quoi le mieux : être sur le banc de touche du Real ou regarder le match tranquillement en tribune ? Le mieux, c’est de le jouer. Pour un joueur, c’est le summum. A l’époque où j’étais joueur, c’était déjà le match le plus important. Ce que j’ai ressenti sur un terrain lors des Clasicos est très différent de ce que j’ai pu éprouver dans mon rôle d’entraîneur. Le joueur prend du plaisir, l’entraîneur souffre sans rien pouvoir faire. L’adrénaline n’est pas la même.
Pourquoi vous dites qu’un entraîneur ne peut rien faire lors des Clasicos? C’est difficile de parler ou d’écouter dans une ambiance aussi électrique. En plus, ce n’est pas un match qui se gagne tactiquement. C’est à l’envie que ça se passe. Celui qui a le plus de tripes, de mental et qui gère le mieux ses nerfs l’emporte.
Quel est votre meilleur souvenir de Clasico ? Les deux demi-finales de Ligue des Champions remportées face au Barça. On avait fait des matchs incroyables, il y avait eu des beaux buts, et puis ça nous avait permis d’aller en finale et de remporter la coupe d’Europe.
Comment expliquez-vous la série incroyable du Real Madrid lors de la deuxième partie de la saison ? C’est vrai que depuis l’arrivée de Juande Ramos, tout est différent. Tout le monde pensait que la Liga était destinée à Barcelone, mais c’est encore loin d’être le cas. Le Clasico va livrer le verdict du championnat. Si le Barça l’emporte, le titre est presque assuré, en revanche, si le Real fait un bon résultat, tout est relancé. Je pense que les Madrilènes seront plus motivés pour le match de samedi. Ils sont sur une lancée incroyable, et le fait que les Barcelonais disputent le retour de la demi-finale contre Chelsea peut avoir son importance.
Vous supporterez qui ce week-end ? En tant que sélectionneur espagnol, je supporte tout le monde. Je n’ai aucune préférence quant au vainqueur. Je désire juste que ce soit un beau match.
On a un peu de mal à vous croire ? (Rires) C’est pourtant la vérité ! J’ai été joueur et entraîneur du Real mais aujourd’hui, c’est fini, je suis passé à autre chose…
Et comment vous voyez le Clasico depuis votre fauteuil de Sélectionneur ? Je connais tous les joueurs qui seront sur le terrain samedi, donc je ne vais pas faire de découverte incroyable… Ce genre de match sert à jauger les capacités mentales des joueurs, c’est ce côté-là que je vais observer. J’aborde le match avec une certaine inquiétude cependant, car je sais que ce sont des rencontres parfois violentes, qui peuvent laisser beaucoup de traces. J’estimerai que c’est un bon match si aucun de mes joueurs ne se blesse.
Vous serez dans les tribunes du Bernabeu. Qu’est-ce que vous direz à Florentino Perez si vous le croisez ? Rien de particulier. C’est du passé.
Ça vous inspire quoi son possible retour ? Rien, encore une fois. Je ne sais rien, et je n’ai vraiment pas envie d’en parler.
Quels conseils donneriez-vous aux deux entraîneurs Ramos et Guardiola ? De profiter du spectacle sans avoir peur de l’enjeu. Je leur souhaite bonne chance à tous les deux !
Un pronostic ? Aucun. Merci.
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