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- Mondial Mexico 86
Danemark dynamite
Révélation de l'Euro 1984, le Danemark va poursuivre sur sa lancée lors du Mundial mexicain, où Laudrup, Larsen, Olsen et consorts, vont marquer les esprits en mettant un set à l'Uruguay (6-1).
La confiance en soi n’a jamais vraiment fait défaut aux Danois. « Nous allons remporter nos trois matches du premier tour, avait d’emblée annoncé Jan Molby, alors milieu de terrain des Reds de Liverpool. L’adversaire qui devrait nous poser le plus de problème est l’Allemagne, mais nous avons la conviction de pouvoir les battre. Quant à l’Uruguay, on a disputé quelques matches face à des sélections sud-américaines lors de notre préparation en Colombie et nous savons à quoi nous attendre » . Pour sa première participation à une Coupe du Monde, c’est en invité arrogant que semble se présenter la sélection dirigée par l’Allemand, Sepp Piontek. Tombé dans une poule présentée comme le groupe de la mort, avec l’Ecosse d’Alex Ferguson, l’Allemagne, finaliste de la dernière Coupe du Monde, et l’Uruguay de Francescoli, dernier lauréat de la Copa America, ce Danemark déborde de talent et se prépare en toute décontraction, loin des concentrations quasi-militaires, lot commun des sélections mondialistes.
« L’ambiance dans ce groupe était extraordinaire, se remémore Enrique Porta, qui suivait la sélection viking pour le quotidien mexicain Esto. Ils vivaient une vie normale, avec leurs épouses, à prendre le soleil au bord de la piscine, certains fumaient même, mais ils savaient se concentrer au moment idoine » . Le Danemark proposait surtout un football au mouvement continuel, chorégraphié par Michael Laudrup, Elkjaer Larsen, ou Jesper Olsen, esthètes à la technique effilée. Un football qui rappelait la Hollande de Cruyff. En apéritif du groupe E, les Rouge et Blanc avait fait entrevoir une partie de leur savoir-faire face à une Ecosse surclassée individuellement et collectivement, sans que le score ne reflète leur indéniable supériorité (1-0). Viendra ensuite la fameuse démonstration face à l’Uruguay (6-1), où la Celeste, qui tuait le temps en disputant des matches de tennis face aux joueurs de la sélection belge, prendra un set sec. « On venait de faire match nul contre l’Allemagne,
et on pensait pouvoir maîtriser le Danemark » se rappelle José Batista, le latéral gauche charrua,.
De la dynamite
Côté danois, outre de nouvelles déclarations où le doute ne s’invite pas, le sélectionneur, Sepp Piontek, avait mis la pression sur l’arbitre : « Leur football est violent et l’arbitrage sera déterminant. J’ai regardé une vidéo d’Allemagne-Uruguay, ce fut dément » . Dès la 19e minute, la Celeste se retrouve à 10 après l’expulsion de Miguel Bossio. Déjà mené 1-0, l’Uruguay va toutefois contrarier les Danois jusqu’au bout de la première période, avec un pénalty du « Principe » Francescoli (2-1). Au retour des vestiaires de l’Estadio Neza, les dynamiteurs danois vont, cette fois, faire voler en éclat le champion du monde 1930 et 1950. Le jeu à ras terre rapide et dynamique de l’équipe européenne étourdit les tenants d’un football bien plus rudimentaire. « Si le surnom de notre sélection est dynamite ce n’est pas parce qu’on donne des coups mais plutôt pour l’explosivité de notre jeu » pouvait clasher Sepp Piontek.
Cette démonstration danoise envoyait Laudrup et consorts en huitièmes de finale. Mais cela n’était pas une nouvelle pour les Rouge et Blanc qui avaient déjà entièrement planifié leur premier tour, comme les bureaucrates du Politburo anticipaient les chiffres de production. « Dans notre groupe, l’Allemagne et le Danemark passeront, avait prophétisé Michael Laudrup, et je ne crois pas que l’Uruguay soit dangereux. On saura vraiment jusqu’où l’ont peut aller après notre quatrième match … » . En huitièmes, les Danois, qui au passage avait mangé la RFA (2-0) pour s’assurer la première place du groupe, sauront : ils chuteront lourdement face à l’Espagne (1-5), le pays qui les avait déjà écarté en demi-finale de l’Euro 84. Le pays où finira par triompher Michael Laudrup, au Barça puis au Real. Enrique Porta expose sa thèse sur la débâcle danoise : « Ils sont d’abord tombé sur un super Butragueño, mais surtout, le départ de leurs épouses, la veille du match, les a déprimés, j’ai même vu un joueur pleurer » . Qualifié, le Danemark avait voulu se préparer comme les canons du genre l’exige. Les nordiques flamboyants étaient (re)devenus une équipe comme une autre.
Marcelo Assaf et Thomas Goubin, au Mexique
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