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Batista : «Mon histoire se résume à ce tacle»
Le 13 juin 1986, l'Uruguayen José Batista est entré dans l'histoire de la Coupe du Monde en étant expulsé après 56 secondes de jeu contre l'Écosse. Un quart de siècle plus tard, il désespère toujours de trouver un kamikaze pour effacer sa marque. Interview.
Quels souvenirs gardez-vous de votre expulsion ?
Ce fut un choc entre joueurs et rien d’autre. En plus, cela arrive lors d’un match capital pour la qualification. Ça a été une décision précipitée de Joël Quiniou. Il y a quand même des fautes largement plus graves qui n’ont pas même été sanctionnées pendant le dernier Mondial. Je pense notamment à la finale.
Plus précisément, pourriez-vous nous détailler cette action entrée dans l’histoire bien malgré vous ?
Je jouais latéral gauche, et le ballon arrive sur le côté droit à un endroit que je pensais pouvoir couvrir. J’accours donc car je pense pouvoir avoir le ballon, je suis d’ailleurs mieux placé que l’Écossais, mais il me passe devant au moment où je tacle. J’arrive avec l’intention de dégager le ballon alors que l’Écossais voulait simplement faire une passe, notre différentiel d’engagement a rendu la faute très spectaculaire. Je suppose que Quiniou a cru que j’ai intentionnellement taclé l’Écossais et m’a expulsé pour cela. A la limite, il pouvait me mettre un jaune pour me calmer, et j’aurais été sur mes gardes le reste du match. J’ai la vidéo de la faute, et ça ne méritait évidemment pas un carton rouge.
Alors, auriez-vous payé pour la réputation de l’Uruguay ?
Je crois, un peu. L’Uruguay était connue mondialement pour son jeu dur, agressif. La première rencontre face à l’Allemagne avait d’ailleurs été heurtée et on nous avait à l’œil. Face au Danemark, Miguel Bossio se fait d’ailleurs expulser dès la 19e, et cette fois c’est moi qui ai payé. Mais j’ai l’esprit tranquille, car tous mes coéquipiers et le staff m’avaient soutenu sur le moment. Aussi, depuis, je n’ai jamais entendu quelqu’un dire que cette expulsion était justifiée. Enfin, sur le moment, je me sentais vraiment mal car j’abandonnais mes coéquipiers dans un match crucial. Et au final, j’allais manquer le huitième de finale face à l’Argentine.
Votre marque historique vous pèse-t-elle ?
Un peu. On dirait que mon histoire se résume à ce tacle. J’ai pourtant joué en Argentine, en Uruguay, mais où que j’aille on m’interroge sur ce sujet. Je vais à une fête, et j’entends des « C’est Batista, celui qui a été expulsé pendant le Mondial » . C’est pesant, quand même. A chaque Coupe du Monde, j’espère qu’un joueur me passe devant, mais ce n’est pas évident d’être expulsé si rapidement (rires).
Si vous rencontriez Joël Quiniou, que lui diriez-vous ?
Je n’éprouve aucun ressentiment, c’est du passé. Vraiment, tout le monde peut se tromper. D’ailleurs, ça m’enchanterait de pouvoir discuter avec lui, mais je ne sais parler qu’espagnol. En revanche, je ne me rappelle pas du nom du joueur que j’ai taclé.
Propos recueillis par Thomas Goubin
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