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Anthony Martial, from Paris with love

Par Nicolas Jucha
Anthony Martial, from Paris with love

Récemment prolongé à Manchester United, Anthony Martial est l'un des nombreux prodiges d'Île-de-France passés à côté des détections au PSG. Le comble serait que le natif des Ulis prive le club de la capitale d'un quart de finale européen. Retour sur le parcours de jeunesse de l'international français.

C’est au rez-de-chaussée de la tour Janvier du quartier des Bergères, près du « Grand Parc Nord » , que vit la famille Martial au début des années 2000. Dans la ville des Ulis, 91, où ont éclos Thierry Henry, Patrice Évra ou encore Noémie Lenoir. La chambre du jeune Anthony donne sur un terrain de foot en herbe. « On y jouait tout le temps : dès qu’on finissait l’école, avant d’aller au foot, après le foot, et cela quelles que soient les conditions climatiques » , raconte Fabrice Tenin, dit « Pépère » , pote du prodige depuis qu’ils ont six ans. « Si on avait soif, on allait boire au robinet de la cave de la gardienne. On s’arrêtait de jouer seulement quand il faisait nuit en hiver, car il n’y avait pas de lumière. » Pas une raison pour laisser de côté les ballons : « On prolongeait sur la dalle avec une gamelle ou n’importe quel autre jeu avec les bancs pour faire office de buts. On pouvait même jouer avec une balle de tennis, dès qu’un truc roulait, c’était parti. » Forcément, au Club Omnisport des Ulis, Anthony Martial est surclassé dès sa première licence, à six ans. « À cet âge-là, les gamins foutent le bordel. L’école de foot, c’est limite une garderie plus qu’un entraînement. Lui, il savait déjà taper dans un ballon, il était plus concentré que les autres » , assure Mahamadou Niakité, éducateur au COU. À croire Fabrice Tenin, Anthony Martial frappait déjà « les coups francs comme Roberto Carlos à 7 ans » . Forcément, avec le COU, le prodige devient indispensable, du genre à disputer deux matchs chaque week-end pour faire gagner sa catégorie et celle du dessus.

Bulletins scolaires en berne

S’ils doivent surveiller un éventuel excès de football, les parents doivent aussi composer avec les émissaires de nombreux clubs pros. Anthony Martial a seulement onze ans quand entre dans sa vie Philippe Lambolley. Ancien entraîneur des U17 nationaux à l’AC Boulogne-Billancourt, reconverti agent, il trouve rapidement un terrain d’entente avec la famille Martial. « On a mis en place une ligne directrice simple : le football devait rester la priorité. Facile à instaurer car Anthony ne s’intéresse qu’au jeu, tous les à-côtés ne le séduisent pas. » Convaincu d’avoir trouvé la perle rare, Lambolley compose le numéro non pas d’un dirigeant du PSG, mais de Gérard Bonneau, du centre de formation de l’Olympique lyonnais, où Lambolley a exercé. « Il m’a dit :« J’ai un jeune qui va te plaire. »En effet, il m’a plu, tout dans son jeu avec le ballon me plaisait. Moins dans le jeu sans ballon, mais on pouvait le travailler » , raconte l’intéressé.

Bonneau fera le déplacement en banlieue parisienne pour rencontrer les parents, et leur expliquer dans un café des Ulis « un projet sportif et un projet scolaire, en soulignant que l’idéal était qu’il soit pris à l’INF Clairefontaine, histoire de rester quelques années de plus dans sa région. » Mais le centre de préformation francilien le recale au dernier tour des sélections, la faute à sa nonchalance chronique et à des bulletins scolaires insuffisants. Lyon laisse Martial un an de plus aux Ulis avec une clause de non-sollicitation et des séjours à Tola-Vologe pendant les vacances scolaires en Île-de-France, « histoire qu’il découvre le club, notre fonctionnement, mais aussi qu’il se fasse des potes » . La fin de l’enfance approche, la destruction du terrain de foot derrière son immeuble vient confirmer qu’il est temps de faire le grand saut : « Avec la disparition du terrain, notre petit groupe s’est dispatché, Anthony est parti à Lyon. » Vers son destin, loin de la région parisienne.

En retard pour le derby

« Si lui ne passait pas pro, personne ne pouvait » , se souvient Armand Garrido, coach des U17 lyonnais. Même si la nonchalance du gosse passait mal : « Il ne jouait pas tous les coups, seulement ceux qui lui plaisaient, se souvient Bonneau. On avait l’impression que s’il avait cinq minutes de retard, ce n’était pas grave. Pareil quand on prenait un but. » La veille d’un derby contre Saint-Étienne en U17, il arrive à la bourre au repas collectif. Son entraîneur le laisse sur le banc le lendemain. « Je regrette encore car on a perdu, et je sais qu’on aurait gagné avec Anthony » , rembobine Garrido. Mais l’enfant des Ulis ne conteste pas et se rachète sur le terrain. Le premier contrat pro est une formalité. « La priorité, c’était qu’Anthony joue rapidement au haut niveau. Certains joueurs sont retardés dans leur progression parce que leur négociation de contrat traîne. Pour Anthony, on savait que s’il était bon, son salaire serait réévalué de toute façon » , se justifie son agent Philippe Lamboley.

Petit à petit, Martial prend une place plus importante à Lyon, mais c’est sous le maillot bleu qu’il réalise la mesure de son potentiel. « Son vrai déclic, c’est quand on a commencé à aller en sélection, avec Jean-Claude Giuntini en U18 » , analyse Romaric N’Gouma, pote de formation à l’OL. « Il lui gueulait dessus, exigeait beaucoup d’Anthony qui se plaignait discrètement en disant « ça me fait chier », mais finalement il a su s’en servir. » Le technicien emmène Martial à l’Euro U17 2012, de son aveu « pousse Anthony à être plus dans le combat, alors qu’avant il évitait les contacts » . Il prend alors le temps de beaucoup discuter avec lui, « sur ses déplacements, son positionnement, ses prises de balles » . Un an plus tard, lors de l’Euro U19, le talent explose avec Francis Smerecki. « J’étais sur le côté gauche avec lui, et franchement, ce que je le voyais faire dans les prises de balle, les éliminations en un contre un… C’était Ronaldo, le Brésilien, à son époque barcelonaise, le mec capable de prendre le ballon et d’aller marquer un but tout seul » , témoigne Steven Moreira, aujourd’hui à Toulouse. Tout s’accélère pour lui durant l’été. L’OL a besoin de liquidités pour boucler son budget, l’AS Monaco met en place un projet ambitieux pour titiller le PSG – qui a perdu Kingsley Coman l’été suivant, mais ne se positionne pas sur cet autre prodige francilien –, alors Jean-Michel Aulas se résigne à lâcher son diamant brut. Il souhaitait continuer à Lyon, mais se fait une raison, « comme le mec qui se fait larguer par sa copine, mais passe rapidement à autre chose » , illustre Lamboley.

Passage en Gambardella, électrochoc et montée en puissance

À Monaco, il découvre un nouvel univers. Le calme de Louis-II « lui permet de faire tranquillement ses gammes en Ligue 1, ce qui aurait été plus difficile au Parc » , dixit Fabrice Tenin. Mais son agent déchante parce que son plan ne se passe pas comme prévu car « Ranieri ignore Anthony pendant quatre mois alors qu’il plantait des buts en CFA » . Pendant sa disette, il fait le bonheur de Frédéric Barilaro, l’un des éducateurs U19 de l’ASM, qui utilise le prodige en Gambardella sans états d’âme en quarts de finale contre Metz. « Il nous qualifie, si on l’avait eu aussi pour le tour suivant, on allait au bout. » En coulisses, Lamboley a écrit à Vadim Vasilyev pour s’étonner noir sur blanc de la situation de son poulain. L’exercice suivant, sous les ordres de Leonardo Jardim, Martial le commence encore sur le banc. Et quand il entre, le Portugais le fait ressortir un quart d’heure plus tard contre Nantes le 24 août 2014.

Divorce consommé ? Frédéric Barilaro pense que l’électrochoc a aidé « Anthony à être moins nonchalant, ce qu’on lui reprochait encore et toujours » , quand Lamboley, une fois de plus, se mue en avocat. « Après son remplacement contre Nantes, il n’a pas pété un câble. Pour l’anecdote, il était censé partir à Valence le lendemain. Le deal a été annulé, car Falcao faisait le forcing pour aller à Manchester United, mais je n’avais pas prévenu Anthony pour qu’il puisse faire son match. Il n’aurait même pas dû jouer. » Resté à quai, le gamin prend son mal en patience, et à partir de décembre, il commence à enchaîner les matchs, ainsi que les passes décisives et buts qui vont avec. La bascule se fait le 25 février à l’Emirates Stadium, où le jeune attaquant contribue à la destruction de la défense d’Arsenal. Suivent huit buts en Ligue 1 sur la seconde partie de saison, et l’impression que le natif des Ulis vient de passer un nouveau cap.

La traversée de la Manche

La suite de l’histoire s’accélère au mois d’août, quand Martial sort deux matchs de très grande classe contre le FC Valence en barrages pour la Ligue des champions. Manchester United se cherche une pointure devant, échoue à recruter Thomas Müller et se heurte aux durs négociateurs monégasques. Les planètes sont alignées.

Son transfert à MU ne l’a pas bouleversé. Quand il en parlait, on avait l’impression que tout était normal, même le montant.

50 millions d’euros et 30 de bonus plus tard, le joueur formé à Lyon change encore d’univers. « Son transfert à MU ne l’a pas bouleversé. Quand il en parlait, on avait l’impression que tout était normal, même le montant » , se souvient son autre pote de formation Zakari Labidi. Depuis 2015, le jeune attaquant est passé par toutes les émotions en Angleterre : des débuts fracassants, une arrivée en sélection, un Euro 2016 raté, et des conflits récurrents avec José Mourinho. De quoi réalimenter à chaque mercato des rumeurs de transfert vers le PSG, une destination tellement logique pour un talent de la région parisienne.

Sauf que l’Ulissien a profité à plein du changement d’entraîneur à Old Trafford, et a récemment prolongé dans le nord anglais. Sa touche « banlieue parisienne » ne subsiste aujourd’hui que dans son goût pour la vanne. « Son truc, c’est d’attaquer sur le physique, il te vanne sur la taille de tes oreilles ou des choses dans ce genre parce que lui, avec sa coupe house-afro, il se prend pour un beau gosse » , explique Moreira, qui a connu les saillies de Martial en sélection. Un Martial qui doit essuyer des répliques conséquentes, notamment de Zakarie Labidi : « Anthony Martial était tellement timide avec les meufs que même s’il est noir, on le voyait rougir. » Au PSG de calmer son humeur taquine le 6 mars prochain au soir.

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Par Nicolas Jucha

Tous propos recueillis par Nicolas Jucha. Propos de Mahamadou Niakité extraits d'un précédent article sur sofoot.com

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