Et pourtant, l'Algérie, mieux organisée que face à l'Afrique du Sud, n'avait pas démérité. Sans être flamboyante, elle a plutôt mieux maîtrisé la partie, mais a connu un relâchement coupable sur une balle longue vers Asamaoh Gyan qui a pris de vitesse Carl Medjani. Les Algériens auraient dû se souvenir que Gyan appartient à la génération de cracks continentaux tels Eto'o ou Drogba… Ce revers n'est en soi pas déshonorant face à un ténor habituel de la CAN, mais il a déplu à tout un pays, frustré et mécontent de ne pas retrouver « l'EN » (l'équipe nationale) qui l'avait tant fait rêver au Brésil. Et comme de bien entendu, la presse algérienne ne s'est pas privée d'en remettre une couche en discutant les choix tactiques de Christian Gourcuff. Pire ! Les médias nationaux ont relayé des « tensions » au sein du groupe… Le genre d'attaque sournoise propre à désunir un vestiaire et de tentative tendancieuse à trouver des explications extra sportives à la défaite face au Ghana. Il a fallu que Christian Gourcuff et certains cadres démentent ces rumeurs mal intentionnées. Car au pays, on se moque bien de la difficulté de ce réel groupe de la mort, des conditions climatiques difficiles pour les « Verts de France » et de la piètre qualité des terrains qui, à l'évidence, nuit à leur bonne circulation du ballon. L'indulgence atteint difficilement un sélectionneur et quelques joueurs - comme Mandi - qui disputent tout simplement leur première CAN. Christian Gourcuff n'est pas Claude Le Roy, vieux routier du football africain. Pas encore…
L'éclate au Sénégal ?
Un bon point pour les joueurs algériens : ils ont remisé dans un coin un statut de favori qui leur pesait et qu'ils ne revendiquaient que du bout des lèvres. Problème… Comme contre l'Afrique du Sud et le Ghana, le Sénégal est paré pour jouer un gros match contre une « grosse » équipe algérienne, toujours considérée comme un des favoris du tournoi ! C'est pourquoi son coach Alain Giresse avait mis de côté cinq joueurs face à l'Afrique du Sud (1-1) pour mieux préparer cette mini-finale ce soir face aux Maghrébins. Et ce Sénégal motivé et très costaud va forcer l'Algérie à deux exigences pas évidentes : aller au combat physique (alors que les organismes ont souffert) et déployer un jeu rapide et précis (alors que les pelouses ne s'y prêtent pas trop). On a aussi noté que les Lions de la Téranga finissent mieux leurs matchs, comme ils l'ont montré face au Ghana grâce à un 2-1 tardif là aussi, après avoir été menés 0-1. Face aux Bafana Bafana, avec une équipe remaniée, ils sont également revenus au score et ont même failli l'emporter (1-1 au final). Pour « s'éclater au Sénégal » , l'Algérie devra déjà faire sans Slimani, buteur massif qui pèse sur les défenses, mais indisponible pour blessure. La tuile…
Mais on prête à Gourcuff l'intention de reconduire son 4-4-2 avec quatre joueurs à vocation offensive. On parle de Soudani en pointe (choix logique, en remplacement de Slimani), Mahrez et Feghouli sur les côtés et Brahimi à la manœuvre, derrière son attaquant axial. Du beau monde en avant sur le papier, mais on est à la CAN, où les forces s'égalisent sous l'effet climatique et sur l'état de piètres pelouses. On comptera aussi sur le boulot des latéraux Mandi et Ghoulam, au rendement encore insuffisant. Mais c'est surtout l'axe défensif général milieu-défense qui devra tenir aussi bon que face au Ghana (a priori Taïder-Bentaleb devant Bougherra-Medjani). Malgré le but de Gyan, l'Algérie avait plutôt bien tenu les offensifs Ghanéens, et c'est donc bien devant que l'Algérie va devoir faire la différence : marquer, planter, tirer, « tirailler » … Aujourd'hui, on ne sait pas si les Verts ont le mental aguerri des sélections qui savent passer l'obstacle. On ne sait pas non plus s'ils peuvent se reposer vraiment sur une identité de jeu encore trop récente qui a fait merveille au Brésil et lors des éliminatoires. Même peut-être un peu lourd en défense, ce Sénégal apparaît comme une montagne difficilement franchissable, en plus d'être bon dans le jeu aérien offensif et puissant en attaque… Mais il faudra bien en passer par là pour rééditer l'unique succès algérien à la CAN, en 1990 à Alger. Les Verts ne devront donc compter que sur eux-mêmes… et sur la suffisance ghanéenne face à l'Afrique du Sud ?
Par Chérif Ghemmour
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