Y.Kaboul : Entretien
Chouchouté par Martin Jol, négligé par Juande Ramos, Younes Kaboul soigne désormais le mal par le mal : l'ancien Auxerrois squatte le banc des Spurs en regardant tous les matches de Ligue 1. Tottenham-Kaboul, sans Renaud ni Axelle Rouge, c'est encore mieux.
Tu es né à Saint-Julien-en-Genevois, c’est presque en Suisse (à une dizaine de kilomètres de la frontière). Est-ce que tu penses que cet été, tu seras aussi « presque en Suisse » ? Nan, j’pense pas…J’pense pas du tout à ça. En ce moment, c’est surtout ma situation en club à laquelle je pense : j’essaie de travailler, de ne pas me relâcher.
De toute façon, Domenech n’aime pas les défenseurs passés par Auxerre. Le sort de Boumsong ou de Mexès ne te fait pas peur ? Nan, ça ne veut rien dire du tout. Chacun a sa trajectoire. Ce n’est pas parce que Mexès et Boumsong ne jouent pas qu’il n’y aura jamais d’ancien Auxerrois en équipe de France. Il n’y a pas de syndrome…
A deux journées de la fin du championnat, Tottenham est la 4e attaque de Premier League (65 buts), devant Chelsea et Liverpool notamment. A côté de ça, les Spurs ont la 3e défense la plus perméable (59 buts encaissés). Pour s’épanouir sous le maillot des Spurs, il faut forcément être attaquant ? C’est sûr, on a passé une saison difficile. Il y a eu pas mal de buts marqués, mais c’est clair qu’on en a trop pris. Plus de la moitié des buts encaissés ont été inscrits sur coups de pied arrêtés. Donc voilà, le spectateur ne s’embête pas, mais nous, ça nous embête un peu puisque ces erreurs nous ont coûté pas mal de points.
Tu étais titulaire indiscutable en début de saison jusqu’au licenciement de Martin Jol. Depuis l’arrivée de Juande Ramos, ton temps de jeu a diminué, puis carrément disparu. Est-ce que ton coach espagnol t’a expliqué les raisons de ses choix ? J’ai joué toute la première partie de saison et depuis le changement d’entraîneur, je ne joue pas. Je n’ai pas eu d’explications de sa part. Il ne parle pas, avec personne. La communication n’existe pas avec lui. Il ne me fait pas jouer ? C’est son choix, je le respecte, je suis professionnel. Je suis jeune, c’est la première fois que ça m’arrive dans ma carrière, mais je ne suis pas surpris car quand on est footballeur, on doit être préparé à ça, aux bons et aux mauvais moments.
Tu n’as été titularisé qu’à deux reprises sur les seize journées de championnat disputées en 2008. Même Woodgate joue plus que toi… Ouais, mais Ramos ne m’a pas vraiment donné ma chance. Quand un joueur ne sent pas la confiance de son entraîneur, il ne peut pas faire grand chose sur le terrain. Mais quand un entraîneur te donne sa confiance, tu lâches le frein à main et tu fonces.
Quelles sont les différences entre Ramos et Jol ? Tactiquement, ça a changé un petit peu ouais, peut-être. Ensuite, au niveau de la personnalité, ça n’a rien à voir. Martin Jol, c’était un personnage. Pour nous, c’était un père, alors que Ramos, c’est juste la tactique et point final, y a rien du tout. A l’entraînement, on fait beaucoup de onze contre zéro et de tableau noir pour travailler notre progression avec le ballon. Ramos nous a apporté ça, mais rien d’autre. Ce qui nous sauve la saison c’est la Carling Cup. On dit qu’on a gagné la Carling Cup parce que Ramos est arrivé au club, mais ça n’a rien à voir. On l’aurait gagnée avec Martin Jol.
Pour ta première saison à l’étranger, tu as connu ce que d’autres rencontrent en dix ans de carrière : place de titulaire, changement d’entraîneur, victoire en Coupe de la Ligue, coussin à ton nom sur le banc, etc. Comment te sens-tu aujourd’hui ? J’ai beaucoup appris cette saison. Tout ce qui s’est passé m’a endurci au niveau du jeu mais surtout au niveau de ma personnalité. En arrivant, j’ai prouvé à l’entraîneur et au club que j’étais capable de me hisser au niveau. Après, avec le changement de coach, j’ai répondu présent quand on a fait appel à moi, soit en donnant satisfaction défensivement, soit en marquant des buts (4 au total, ndlr). Au final, je n’ai jamais baissé les bras, donc rien à regretter.
C’est quoi le plus compliqué à l’entraînement : les petites jambes de Keane ou les grands membres de Berbatov ? Les deux joueurs sont complémentaires, c’est incontestable. Il y en a un qui fait le jeu et l’autre qui termine. Quand on joue tous les jours à l’entraînement avec des mecs comme ça, c’est clair que défensivement, on ne peut que progresser.
Qui est le joueur le moins fashion de l’effectif de Tottenham ? Jamie O’Hara. Il s’habille classique, un peu pépère on va dire.
Quelle musique on écoute dans le vestiaire des Spurs ? Que du rap, que du ricain !
Quel est le joueur de Premier League qui a le plus petit buzz par rapport à son réel niveau ? Il y a beaucoup de joueurs sous-estimés, mais je vais dire un mec qui joue avec moi : Steed Malbranque. Bah oui, ça fait sept années qu’il joue en Angleterre, c’est un joueur qui n’est pas du tout reconnu en France, et pourtant il le mériterait. Quand tu vois les matches qu’il fait ici, tu comprends vite pourquoi c’est la coqueluche du club.
Tu suis les matches de Ligue 1 ? Bien sûr, tous les week-ends. En fait, je regarde tout, du match du samedi à 17h jusqu’à celui de 20h55 le dimanche. J’avoue que le championnat de France commence à me manquer un petit peu. Quand on regarde comme ça, on a envie d’y retourner. Mais après, quand on met les pieds ici dans un stade (en Angleterre, ndlr) on n’a plus envie d’en sortir.
C’est quoi ton programme là? Là, ça fait un mois que je n’ai pas joué mais bon… je m’entraîne bien comme il faut, je me tiens toujours prêt, je redouble d’efforts à l’entraînement. Pour le reste, je vais voir ça cet été.
Propos recueillis par Matthieu Pécot
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