Victor Valdes, un peintre chez les artistes
A des années lumières du niveau de ses coéquipiers, Victor Valdes est pourtant le joueur qui paraît le moins menacé par l'actuelle mauvaise dynamique du Barça. Comme si avoir une tanche dans les bois était le quotidien du club catalan.
Et voilà qu’on nous rabâche que Juninho (lala lalala) est le meilleur tireur de coups francs de la planète foot, que l’ouverture du score des Lyonnais à Gerland face au FC Barcelone est soi-disant un chef d’œuvre. Bref, à entendre les spécialistes, le Brésilien pourrait limite être punter pour les New England Patriots. Même Guardiola a emboîté le pas. Le coach blaugrana a argué que « sept gardiens sur dix auraient encaissé ce but » , lorsqu’on l’a interrogé après le match sur le degré de responsabilité de Victor Valdes sur ce coup pas très franc. Soyons honnêtes : la frappe de Juninho n’avait rien d’exceptionnel, même Claude Barrabé aurait vraisemblablement arrêté le ballon d’une seule main.
Le fait est là : Victor Valdès est le tendon d’Achille du champion d’Europe 2006. Pas du genre à solidifier une défense déjà en carton et qui aurait bien besoin d’un ou deux exploits de temps en temps lorsqu’elle passe à travers, comme ce fut le cas à Vicente Calderon la semaine dernière. Si Valdes n’est pas responsable de la déconvenue du Barça face à la Bande à Aguero (défaite 4-3 des Catalans, qui ont pourtant mené à la marque les trois quarts du match), il est en revanche clairement fautif sur le second but encaissé face à l’Espanyol au Camp Nou une semaine plus tôt (défaite 1-2 du Barça). Un dégagement au ras du sol après une passe en retrait d’un coéquipier, directement dans les pieds d’Ivan de la Peña à 25 mètres des buts, qui ne se priva pas d’humilier Valdes au passage. Little Bouddha aurait pu mettre une mine dans le soupirail. Il préféra placer un petit piqué dans la lunette histoire de bien enfoncer le portier du club rival, resté les pieds dans le ciment sur ce coup.
Logiquement pointé du doigt après cette défaite lors du derby, puis une nouvelle fois remis en question trois jours plus tard face au septuple champion de France, Valdes n’apparaît pas pour autant dans le viseur de son coach. « Victor est indiscutable, a déclaré Guardiola le week-end dernier. Il a démontré sa valeur et peut se permettre toutes les erreurs qu’il veut tellement j’ai confiance en lui » . Où Guardiola se montre faussement serein dans la mauvaise passe actuelle d’un Barça qui pourrait bien tout perdre après avoir enflammé l’Europe pendant six mois, ou bien il sait qu’il n’a pas de roue de secours – plus probable.
Victor Valdes n’est pas fiable, Victor Valdes fait des bourdes, et surtout, Victor Valdes n’a pas de style. Même Fabien Cool était plus esthétique. Bref, c’est un gardien moyen qui évolue dans un club au-dessus de ses capacités. Aujourd’hui, s’il déclare vouloir le combler, le gouffre qui le sépare de Casillas est énorme. Pas un hasard si Aragones a préféré emmener Reina et Palop – pourtant pas des monstres – pour suppléer San Iker lors du dernier Euro. La différence entre l’équipe qui mérite de gagner et celle qui gagne se fait souvent là-dessus et le Barça ne semble pas l’avoir compris.
Car au final, Victor Valdes ne fait pas tache dans l’histoire de son club. Le FC Barcelone a toujours entretenu cette tradition de gardiens middle class, même lorsque l’équipe comptait trois stars par ligne. Zubizarreta avait tout juste le niveau pour jouer à Santander, Dutruel n’est une idole que dans le Calvados, Rustu était un escroc, sans parler de Bonano, l’incarnation humaine du bug de l’an 2000. Pas étonnant alors que Valdes soit le plus jeune gardien de l’histoire du Barça à avoir dépassé la barre des 200 matches en Liga. Pas étonnant non plus que le Barça compte aujourd’hui autant de Ligue des Champions que Nottingham Forrest.
Marc Hervez
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