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Super Darijo Bros

Par Mathieu Faure
4 minutes
Super Darijo Bros

Le capitaine croate pensait se faire un Euro tranquille à la "maison". Titulaire et âme du Shakhtar Donetsk depuis neuf ans, Darijo Srna devra se contenter du voisin polonais pour mener les siens le plus loin possible. Une habitude pour ce mec très attaché aux valeurs familiales.

Dès les premiers braillements de sa vie, Darijo Srna aimait la complexité. Né en Croatie d’un père bosnien musulman et d’une mère croate, le capitaine actuel de l’équipe de Croatie est un homme qui se partage. Génial patron de la meilleure équipe d’Ukraine (Shakhtar Donetsk), club dans lequel il évolue depuis neuf piges, Srna – 30 ans depuis un mois – est un mec de l’ombre. Pourtant, quand on se penche sur son cas, les louanges ne se font pas attendre. Son coach au Shakhtar, Mircea Lucescu, dit d’ailleurs de lui que « sa présence sur le terrain rassemble l’équipe. C’est un vrai capitaine. » Un meneur d’hommes. Un patron. Il faut dire que l’enfance du milieu de terrain croate est tout sauf un moment de paradis. Il y a d’abord son paternel, Uzeir. Un mec qui a tout traversé. Surtout les saloperies que la vie a bien voulu lui déposer sur la route. Né peu avant la Deuxième Guerre mondiale dans la Bosnie actuelle, le pater familias Srna voit sa mère enceinte se faire brûler par des nationalistes yougoslaves sous ses yeux. Ensuite, il atterrit dans un camp de réfugiés où il est séparé de son père qui meurt, plus tard, d’une balle perdue. Enfin, il s’envole pour un orphelinat où il sera adopté par un flic slovène. Un parcours qui laisse des traces. Darijo ne s’en est jamais caché, d’ailleurs. Pour lui, c’est une force. Une source de motivation. « Mon père a vraiment eu une vie difficile et je suis très fier qu’il puisse maintenant mener une vie calme. Mais je sais qu’il est impossible de rendre à mon père tout ce qu’il m’a donné » , explique Darijo au Telegraph.

Élevé dans la religion musulmane, il faut toute la persévérance du daron pour que le club de l’Hajduk Split accepte d’enrôler Darijo chez les jeunes. Une fois sur le pré, le mec éclabousse les autres de son talent. Latéral, milieu, ailier, Srna sait tout faire. Il centre à merveille, possède un pied de velours sur les phases arrêtées et ne rechigne jamais à engloutir les kilomètres. Sans parler de son mental. Outre l’historique de son père, Srna joue également pour son frère Igor, atteint de trisomie. Histoire de se donner de la force, Srna s’est fait tatouer le prénom du frangin sur son coeur. Lors d’un match contre la Macédoine, Srna prend plaisir à montrer le tee-shirt qu’il porte sous sa liquette et sur lequel est inscrit « Igor, nous sommes tous là pour toi » . À côté de ça, Srna envoie souvent des places de matches aux orphelins de Donetsk (on raconte qu’il a invité plus de 900 marmots pour un seul et même match) et paye une boulangerie à son père. Voilà, il est comme ça, Darijo Srna. Mais, comme tout le monde, il a une part d’ombre.

Il épouse sa copine du lycée

Comme en 2006, où il se fait virer de la sélection croate avec Boško Balaban et Ivica Olić pour avoir traîné ses guêtres en discothèque lors d’un rassemblement. Un Balaban qui n’est pas n’importe qui dans la vie de Srna. Amis d’enfance, les deux mecs ont épousé leurs copines de lycée, elles aussi BFF (Best Friend Forever). Fidèles en amour et en amitié. Une espèce rare dans le football moderne. Dès lors, rien d’anormal à voir le mec porter le brassard autour de son bras depuis quelque temps en sélection, une équipe dont il demeure un cadre avec ses 91 capes. Un pilier qui boude, aussi. Depuis l’annonce officielle du camp de base croate durant la compétition, Darijo tire la tronche. Normal, les avatars de Lustucru ont posé leurs valises à Warka, au cœur de la Pologne. Bien loin de son Ukraine, où il vit depuis bientôt dix ans. « Je suis vraiment triste de ne pas jouer dans mon Ukraine. Surtout que le premier choix, pour notre camp de base, était le centre d’entraînement du Shakhtar. Je suis chez moi, là-bas. Mais c’est vraiment trop loin, ce n’est pas possible. C’est dommage, on aurait eu un environnement absolument parfait à Donetsk » , épluche le milieu sur le site de l’UEFA.

Qu’à cela ne tienne, il en faut plus pour ébranler un mec avec un cerf tatoué sur la guibole (« Srna » signifie « cerf » en croate) et insensible aux sirènes des grands clubs européens depuis plus de cinq ans. Constamment annoncé chez les cadors du continent (dernièrement, le Barça et City étaient encore sur son paletot), Srna a pour le moment juré fidélité au club de la ville minière. Une position logique pour un homme resté proche des siens. De sa femme à ses frangins, en passant par son pater et le Shakhtar. Finalement, Darijo n’était pas fait pour le XXIe siècle. Heureusement pour nous, ses parents en ont décidé autrement.

Un derby, deux grands corps malades

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