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Sterling Alive

Par Maxime Brigand
Sterling Alive

Longtemps, Raheem Sterling a été ce phénomène talentueux, rapide balle au pied, mais incapable de lever la tête et de porter son équipe sur la longueur. Puis, Pep Guardiola est arrivé et a créé un Sterling 2.0. Un Sterling qui est aujourd'hui le meilleur joueur de son pays et le phare des performances de City.

Il paraît que Raheem Sterling a toujours eu un truc en plus. « Des grosses couilles » , pour être précis. C’est Roy Hodgson qui l’a annoncé au monde, il y a cinq ans, à une époque où l’international anglais gobait les records de précocité comme des petits-beurre. À une époque où, surtout, tout le monde était d’accord sur le cas d’un bonhomme dont le talent devait lui permettre de fracasser toutes les barrières posées sur sa route. Et il y en a eu, un tas. « La plupart des gens subissent moins d’épreuves que lui durant leur vie entière » , ajuste même son premier mentor, Clive Ellington. L’histoire de Sterling est un film qui raconte donc la vie suivante : celle d’un môme privé de son père, abattu d’une balle dans la tête, lorsqu’il avait deux ans, et dont la mère a été obligée de quitter son pays, la Jamaïque, et de filer à Londres pour trouver une issue de secours à ses deux enfants. Celle d’un gosse qui a ensuite grandi en voyant cette même maman nettoyer les toilettes et les chambres d’un hôtel de Stonebridge et qui a été dégagé de son école primaire à cause d’un caractère jugé trop trempé. Celle d’un type difficile à classer.

« La seule certitude qu’on avait, c’est qu’il ne pouvait que devenir incroyable, souffle Chris Beschi, l’un de ses anciens instituteurs, qui a connu Sterling lorsqu’il a été placé dans un institut spécialisé, situé à un kilomètre à peine de Wembley. Lorsqu’il avait 10 ans, il était parfois très colérique, et je lui ai dit : « Raheem, si tu continues comme ça, à 17 ans, tu pourras tout aussi bien jouer pour l’Angleterre qu’être en prison. » Il n’allait pas être le genre de mec à finir mécanicien ou ouvrier. » La faute à un talent rapidement décelé – à onze ans, tous les clubs de Londres le voulaient, et Raheem Sterling s’est même payé le luxe d’envoyer bouler les dirigeants d’Arsenal – et à un destin à part, donc. Mais plusieurs lectures se sont longtemps affrontées : Sterling allait-il vraiment devenir l’élu de la nation ? Allait-il se planter comme un paquet d’autres prodiges ? Était-il juste un petit con, benêt, un peu beauf ? Un simple poulet sans tête ? On s’est même dit, pendant un temps, qu’il ferait un bon méchant. Et lui aussi : « Je ne peux rien faire contre ça. Je ressemble à un sale gosse. » Alors, Sterling a ramassé, la presse anglaise sautant, dans la foulée de son transfert énormissime à Manchester City, sur toutes les occasions pour le tacler et s’est dit qu’il ne pourrait jamais être jugé comme les autres. Ce qui est vrai, car Raheem Sterling n’est pas comme les autres. « Moi, je lui disais de se souvenir qu’un roi construit son château avec les pierres qu’on lui jette » , sourit Ellington. Alerte : il n’y a plus de pierre.

« Nous voulions le transformer en menace »

La raison est simple : à bientôt 25 ans, Sterling a réussi l’exploit d’éteindre toutes les étincelles qui l’entouraient et est surtout devenu un autre footballeur, une version 2.0 de celui qu’il était avant l’arrivée de Pep Guardiola à Manchester City. Le même Guardiola qui a un jour avoué que l’ailier anglais l’avait fait « évoluer dans [son] approche du métier » . Replaçons le cadre. Lorsque Guardiola arrive en Angleterre, Sterling sort d’une saison assez tristoune en club – six petits buts marqués en Premier League, une place de titulaire perdue lors de la deuxième partie de saison -, vient de vivre un Euro 2016 destructeur et est frappé de tous les côtés à cause du prix de son transfert (49 millions de livres). Le Catalan téléphone alors longuement au joueur et décide de lui mettre son nouvel assistant, Mikel Arteta, dans les pattes, avec un double objectif : soigner psychologiquement Sterling et faire de lui un autre joueur. Dans le livre Pep’s City : The Making of a Superteam, Arteta explique la démarche : « On voulait qu’il soit beaucoup plus présent dans la surface. À l’époque, c’est comme si Raheem avait peur du but, alors qu’on voulait faire de lui un joueur capable de nous apporter un but à chaque match, ou même de rater deux ou trois occasions par match. Nous voulions le transformer en menace permanente. Et qu’il n’ait plus peur. Pour ça, il fallait qu’il prenne confiance en lui et dans le fait qu’il pouvait devenir le meilleur. »

Un modèle nommé Romário

Il fallait aussi gommer certains aspects du jeu de Sterling, qui avait tendance, au début de sa carrière, à attendre statiquement le ballon et à conduire en permanence son ballon avec l’extérieur du pied, tête baissée. Partant, Pep Guardiola a pris deux modèles : Romário, pour travailler l’inclinaison du corps et les appels, et Messi, pour bosser l’accélération sur les premiers mètres. Le Catalan raconte : « Lorsque je jouais dans l’équipe de la Dream Team, je ne donnais jamais le ballon à Romário lorsqu’il était dos aux centraux. Mais dès que je voyais qu’il était à moitié tourné, avec une épaule inclinée – la droite s’il voulait le ballon sur le pied droit, la gauche s’il préférait le recevoir sur le gauche -, je savais qu’il pouvait faire exploser son marquage. Là, à cet instant précis, je lui donnais le ballon. À chaque fois. J’ai aussi compris qu’il avait toujours un œil pour contrôler la distance entre lui et le but et l’autre œil pour surveiller le ballon. » Vieille leçon : l’appel doit provoquer la passe, et non l’inverse, ce que Raheem Sterling a bien compris aujourd’hui, lui qui est passé maître dans ce domaine. La suite est une affaire d’accélération – et non de vitesse – sur les premiers mètres, ceux où le joueur fait la différence. Au contact d’Arteta et Guardiola, l’Anglais a ainsi appris à déclencher son appel au bon moment et à tuer, à la manière de Messi, son adversaire direct grâce à une qualité de sprint rare. Mais aussi de placement, Pep Guardiola ayant d’abord utilisé Sterling à droite, avec Leroy Sané et Sergio Agüero lors de sa deuxième saison (2017-2018, 67 buts marqués à eux trois), avant de le faire glisser côté gauche. La raison ? Installé sur ce côté, Raheem Sterling peut davantage créer d’espaces, rentrer dans le cœur du jeu et libérer de l’espace pour le latéral (ce que fait aussi Bernardo Silva de l’autre côté), et est davantage décisif. Car oui, en plus, il n’a plus peur.

Plus peur du tout, même, au point de désormais banaliser le but, désormais. Brillant : cette saison, Sterling a déjà planté dix-huit buts en vingt matchs toutes compétitions confondues, dont deux triplés (ce qui est important étant donné que l’Anglais envoie les ballons de ses hat-trick à sa mère, en Jamaïque), et a marqué dans 65% des rencontres qu’il a disputées. Il a aussi glissé cinq passes décisives sur la période. Il est surtout, de loin, le meilleur élément d’un City moins dominateur et qui a parfois eu besoin de s’en remettre au talent d’un type pour se sortir de quelques situations (par exemple à l’aller face à l’Atalanta, en Ligue des champions, où Sterling a relancé les Citizens à lui tout seul et a même inscrit un triplé en onze minutes). Assez pour satisfaire Guardiola ? Pas le genre du mec, et le technicien ne lâche toujours pas Sterling, qui est également aujourd’hui le phare de sa sélection et une voix centrale dans la lutte contre le racisme, d’une semelle, notamment sur l’aspect défensif du jeu, où l’Anglais peut encore progresser. Mais ça, ça sera pour la version 3.0.

Par Maxime Brigand

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