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Silence et vie de Bobby Zamora

Par Maxime Brigand
5 minutes
Silence et vie de Bobby Zamora

Une tête à la Jason Statham, une silhouette immense, une réputation alternative, mais un nom qui restera à jamais collé au foot anglais de la première décennie des années 2000. Le 9 décembre dernier, Bobby Zamora a annoncé la fin de sa carrière sportive après plusieurs mois de silence, une cinquantaine de buts en Premier League et un retour logique à Brighton. Là où tout avait explosé.

Dans les couloirs du Withdean Stadium de Brighton, la voix du vieux Craig Brown casse le silence : « Ne le laissez pas aller sur son pied gauche, à aucun moment. » Ce jour d’avril 2003, le mythe écossais n’a que cet objectif : bloquer, empêcher, éviter. Il sait qu’il est « plus facile de le dire » que de l’exécuter une fois sur le terrain, mais il a confiance en ses hommes. Et il a raison : un peu plus d’une heure et demie plus tard, Preston North End s’imposera sans trop tembler sur la pelouse de Brighton (2-0) et plongera encore un peu plus les quelque 6600 personnes présentes dans le doute. Alors, les supporters des Seagulls profitent des derniers instants avant de retrouver une troisième division nationale quittée un an auparavant. Sauf qu’ils ne profitent pas d’un groupe, mais plutôt d’un homme.

Une silhouette immense, une forme qui ne cesse de répéter les mêmes gestes toutes les semaines avec la même finalité, et ce, depuis maintenant trois saisons. Depuis son arrivée en 2000, Bobby Zamora est le meilleur buteur de Brighton & Hove Albion et tourne autour de vingt-cinq buts par exercice. Il n’a que vingt ans à peine, mais est déjà une légende chantée : « When the ball hits the goal, it’s not Shearer or Cole, it’s Zamora. » C’est aussi un gosse que l’on regarde différemment. Pour son physique d’abord, pour son efficacité ensuite, au point de voir Glenn Hoddle s’abonner pendant toute la saison 2002-03 aux rencontres des Seagulls alors coachés par Steve Coppell pour l’observer. Dave Beasant, gardien au club à l’époque, raconte : « Certaines personnes doutaient de lui quand il jouait en quatrième ou troisième division, mais, à cette période, il jouait bien en seconde. J’ai su à cet instant qu’il pouvait aller très loin. » Sa route aura finalement duré dix-sept ans.

« Ma hanche m’a lâché »

Zamora a toujours avancé ainsi, alors tout ne pouvait se terminer que comme ça : sans bruit. Par un tweet, brut. Vingt-cinq mots et quelques caractères. « Merci pour tous vos incroyables messages. Oui, j’arrête. Les clubs, les partenaires, les supporters, tous vont me manquer. Merci à tous pour votre soutien pendant toutes ces années. »

Bobby Zamora et le foot, c’est donc fini. Sans honneur, sans véritables adieux, mais simplement autour d’une interview donnée sur le site officiel de Brighton & Hove Albion avec un ancien partenaire, Adam Virgo. « Mes vingt ans à jouer au foot m’ont rattrapé. Ma hanche m’a lâché. » Bon, à trente-cinq ans, il fallait s’y préparer, mais perdre du paysage un joueur comme Zamora, éphémère international à la fin de la première décennie des années 2000, est toujours un pincement.

Pourquoi ? Car le gamin de Londres incarnait une certaine idée du foot, celle qui n’est pas toujours spectaculaire, pas forcément efficace, qui sait répondre aux critiques, mais qui avance avant tout à la passion. Gosse, Zamora rêvait de jouer un jour pour West Ham lorsqu’il mettait des coups dans les équipes de jeunes du Senrab FC aux côtés de John Terry, Ledley King ou encore Paul Konchesky. Des mecs qui se retrouveront chez les espoirs et même un temps chez les grands. Puis, Bobby a réalisé son rêve entre 2004 et 2008 lorsque West Ham était en Championship avant de faire remonter le club en Premier League dès sa première saison chez les Hammers en inscrivant le but vainqueur en finale d’accession contre Preston North End à Cardiff (1-0). « Porter le maillot de West Ham a toujours été ce que je voulais. Alors, je ne veux plus bouger. Jamais. »

La grâce et les critiques

Avant ça, Bobby Zamora s’était planté à Tottenham malgré les nombreuses observations de Hoddle. Après West Ham, il a commencé sa descente entre Fulham et QPR, en alternant le bon et le moins bon, mais en laissant toujours une trace. Par un but, un geste ou un sourire. C’est là, aussi, que Zamora a découvert la puissance des blogueurs spécialisés en Angleterre qui n’ont cessé de le tailler pour son manque de réalisme jusqu’à ce que cette caractéristique soit hurlée dans les tribunes du pays : « When your sat, in Row Z, and the ball hits your head that’s Zamora ! » Mais qui peut par exemple oublier cet instant de grâce à West Bromwich ? Personne. Zamora restera à jamais comme un mec à part dans le paysage du foot anglais comme un Andy Carroll, comme Darren Bent ou Peter Crouch. C’est comme ça. C’est aussi pour ça qu’on aime le foot anglais.

Sauf qu’il voulait retrouver de l’amour pour finir, donc il est revenu, forcément, à Brighton y couler une dernière saison chez les pros l’an passé. Tout devait se terminer ainsi, sur sept buts en vingt-six apparitions, avant cette blessure à la hanche en mars dernier qui restera à jamais comme la dernière fois où on a vu Zamora sur un terrain de foot. C’est dur, mais c’est ainsi. Depuis, le grand Bobby s’est rangé vers ce qu’il aime le plus après claquer des coups de casque : pêcher, partout à travers le monde, mais il s’est aussi lancé avec Mark Noble et Rio Ferdinand dans la construction de logements sociaux à Londres. C’est là qu’on le retrouvera maintenant. Dans des actions loin des surfaces ou au bord d’une rivière. Restera ce nom, ses gestes et ces chants. Merci Bobby.

Dans cet article :
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Par Maxime Brigand

Propos de Dave Beasant recueillis par MB.

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