Serie A : Torino, monument en péril
Match de la peur aujourd'hui à Turin : si le Torino, 17ème, perd à face à Bologne, 18ème, il filera tout droit vers la Serie B. Une fois de plus, une fois de trop.
Ce sont les grand-pères qui le disent : le Torino est l’un des plus grands clubs italiens. Vrai, mais il faut effectivement avoir près de 40 ans pour le savoir puisque le dernier titre du club – Coupe d’Italie mise à part – remonte à 1976. Avant cela, il y eut 7 championnats (dont 5 consécutifs, à la fin des années 40), des grands joueurs (Mazzola, Nestor Combin), des tragédies (l’accident d’avion de Superga en 49, la mort de Meroni en 67), et une ferveur quasiment inégalée dans la Botte.
Problème, il ne reste quasiment rien du Torino aujourd’hui. Le Stade Filadelfia, mythique enceinte du club, est laissé à l’abandon des junkies en plein Turin. Seuls quelques tifosi s’y rendent de temps à autre pour aider la bâtisse à tenir debout. Le mois dernier, une expédition de nettoyage express a permis de rapporter à la surface 200 seringues usagées. L’équipe première ne va pas mieux : le dernier grand joueur à être sorti du club, Gigi Lentini, a fracassé sa carrière au volant d’une voiture de course sur l’autoroute Turin-Piacenza en août 1993.
En vérité, depuis près de 20 ans, le Torino est devenu un club comme tant d’autres, qui fait l’ascenseur entre la seconde et la première division, et se contente d’une victoire contre la Juventus dans le derby pour être content de sa saison. Cette année encore, le Torino est engagé dans une lutte pour le maintien depuis le premier coup de sifflet final. Et il y a fort à parier qu’il sera encore en train de batailler lorsqu’on jouera les arrêts de jeu de la dernière journée. Actuellement, le club n’a qu’un point d’avance sur le premier relégable, Bologne, qu’il reçoit aujourd’hui. Défaite interdite et climat pesant.
La semaine dernière, lors de la commémoration des 60 ans de l’accident d’avion de Superga (dans lequel toute l’équipe du grande Torino de la fin des années 40 trouva la mort), le pauvre Alessandro Rosina, capitaine actuel du Toro et pas le pire de ses joueurs, s’est ainsi fait conspuer alors qu’il s’apprêtait à lire un message devant le monument aux morts du club : « Apprends à jouer » , « Ne lis pas les noms des anciens joueurs, tu n’en es pas digne » . Demandez donc à Tottenham, le Betis Séville ou Möchengladbach ce qu’ils en pensent, ils vous le diront en toute honnêteté : la combinaison grand club/petite équipe est sans doute ce qu’il y a de pire à vivre pour un joueur de football. Trop lourd, tout simplement.
Comme souvent dans ces cas-là, le Torino a décidé de s’en remettre à la superstition pour se sortir du marasme. Puisque les deux dernières parties à la maison (contre Catane et Sienne) se sont soldées par deux victoires inespérées, la direction du club a choisi de reproduire à l’identique le rituel d’avant-match : mise au vert à l’Air Palace Hôtel dès le vendredi soir, conférence de presse de l’entraîneur le samedi à 13h, buffet servi aux journalistes présents, repas, sieste. Le service de presse du club le jure, ce « menu sauvetage » sera organisé à la seconde près. Et puisqu’il faut un porte-bonheur, le Toro a demandé à Vittore Beretta, le sponsor du club (des salamis), de venir au match : à chaque fois qu’il s’est assis en tribune, le Torino a gagné.
Torino-Bologne
Dimanche, 15h, 35ème journée de Serie A
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