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Le narco qui dribblait les flics et les défenseurs

Par Victor Massias

Comme Ronaldinho, Sebastian Marset a joué au Paraguay et s’est fait coffrer pour une affaire de faux passeport. Petite différence : lui, c’est un trafiquant de drogue qui manie mieux les balles avec son flingue qu’avec ses pieds. Le gangster uruguayen vient d’être repéré sur un terrain de foot en Bolivie, pays qui l’a caché et protégé pendant plusieurs mois avant de l’aider à s’échapper.

Le narco qui dribblait les flics et les défenseurs

Il n’y a pas beaucoup de joueurs aussi puissants que Sebastian Marset Cabrera. Pourtant, l’Uruguayen n’a pas grand-chose du gabarit de ses compatriotes Darwin Nuñez ou Ronald Araujo. À 32 ans, il est plutôt du genre à se faire traquer par Interpol, la DEA et les autorités de plusieurs pays d’Amérique du Sud. C’est en Bolivie qu’il a été aperçu pour la dernière fois, sur un terrain de football. Depuis quelques temps, celui qui est parfois surnommé « El Rey del Sur » (Le Roi du Sud, en VF) jouait dans un club pro sous une fausse identité. Mais ne mettons pas le charrua avant les bœufs. Pour comprendre comment Sebastian Marset, l’un des narcos les plus dangereux de la région, accusé de plusieurs meurtres, a pu se permettre de tâter le ballon en pleine cavale, il faut revenir une bonne décennie en arrière.

Ce bad boy de Marset

Les premières traces d’activité illégale remontent à 2012, lorsqu’il est accusé d’avoir envoyé une cargaison de marijuana du Paraguay vers sa terre natale à bord d’un jet privé piloté par l’oncle de l’ancien président paraguayen, Horacio Cartes. De quoi planter le décor. Mais c’est pour une autre livraison, de 450 kilos d’herbe, qu’il tombe l’année suivante. Cinq ans de prison à Montevideo qui ressemblent moins à une bonne leçon qu’à une enrichissante école du crime. « Il a beaucoup grandi et généré des contacts avec des narcotrafiquants, des gens du PCC, la plus grande organisation criminelle du Brésil, en lien avec la ‘Ndrangheta’ (la mafia calabraise, NLDR) », explique Nicolás Centurión, analyste du crime organisé. À peine sa cellule abandonnée, Marset voyage à travers l’Amérique latine et monte sa propre organisation : le Premier cartel uruguayen (PCU). Il s’allie avec différents groupes afin de transporter la cocaïne de la Bolivie vers le Paraguay, puis l’Argentine et l’Uruguay, d’où elle est expédiée en direction de l’Europe et l’Afrique. « Mais après, tout cet argent doit revenir, note Jessica Echevarria, avocate bolivienne chargée d’affaires dans lesquelles Marset est impliqué. Les trafiquants le lavent à partir de la création de différentes entreprises de façade : stations de lavage, éleveurs de bétail, voitures de luxe, camions, agriculture, scieries, concerts, clubs de foot… »

C’est donc tout naturellement que les soupçons de blanchiment drachent sur le Deportivo Capiatá, en deuxième division paraguayenne, avec qui Marset joue quelques matchs. Six au total, entre le 16 avril et le 29 mai 2021. Le tout, avec le numéro 10 dans le dos. Le criminel avait filé 10 000 dollars à son coéquipier Julio Irrazábal pour ce caprice. Il avait aussi promis au club un contrat de sponsoring pharaonique à hauteur de 100 millions de guaranis (13 750 dollars), mais n’a pas tenu parole. Il s’est fait la malle du jour au lendemain et a quitté le pays qui avait mis Ronaldinho derrière les barreaux un an plus tôt. De toute manière, le club aurait eu du mal à finir la saison avec sa sulfureuse recrue.

Dès le mois d’octobre, le nom de Sebastian Marset affole les autorités lorsqu’il se fait gauler à Dubaï pour être entré aux Émirats arabes unis avec un faux passeport… comme Ronnie. Il est rapidement libéré avec l’aide de son gouvernement. Cette affaire déclenche illico une polémique en Uruguay, obligeant notamment la vice-ministre des Affaires étrangères Carolina Ache à démissionner. Depuis, Interpol est sur ses côtes. Une méga enquête le désigne comme le chef d’une organisation transnationale de trafic de drogue et de blanchiment d’argent. Dans la foulée, le président colombien Gustavo Petro l’accuse publiquement d’avoir ordonné l’assassinat de Marcelo Pecci, un procureur paraguayen tenant tête aux narcos. Il se dit alors que le criminel uruguayen s’est réfugié en Afrique du Sud ou au Mozambique. En réalité, dispensé du poids du respect, le gangster gambade joyeusement à Santa Cruz, sous les couleurs du club qu’il s’est offert, Los Leones El Torno, en deuxième division bolivienne. Ses matchs sont diffusés sur des réseaux sociaux et ça ne semble pas l’affoler.

Il avait une vie publique ici, jouait au football, sortait avec du monde, appartenait à différents cercles sociaux, allait au restaurant. Il ne se cachait pas.

Jessica Echevarria

Plus belle la Bolivie

« Il avait une vie publique ici, jouait au football, sortait avec du monde, appartenait à différents cercles sociaux, allait au restaurant. Il ne se cachait pas, pointe l’avocate Jessica Echevarria. Je pense que s’il a décidé de venir avec toute sa famille et ses trois enfants, c’est parce qu’il y a des personnes qui lui ont donné la garantie qu’ici, personne n’allait le déranger. Cette protection, les seuls qui peuvent te la donner, ce sont ceux qui sont en charge de lutter contre les drogues et qui font partie de l’ordre public : la police. » Il faut savoir que les États-Uniens de la DEA, qui sont à la drogue ce qu’Elmer Fudd est à Bugs Bunny, ont été expulsés de la Bolivie il y a quinze piges. Ça fait un ennemi de moins pour tout individu recherché par cette organisation.

« On dit qu’il a gagné 500 millions de dollars en quatre ans, insiste Nicolas Centurion. Il a donc pu corrompre beaucoup de procureurs, de policiers et de militaires de nombreux pays. Ça démontre une réalité : les autorités sont très perméables. Dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux, il a dit que le directeur de la lutte contre le trafic de drogue l’avait aidé à s’échapper, il l’avait prévenu avant. Il semble donc que les autorités boliviennes l’ont défendu. Les policiers lui ont donné un appui total. » Même le président uruguayen Luis Alberto Lacalle Pou assure que son pays savait « depuis un moment qu’il était en Bolivie ». « Sur la base d’informations datant de février, nous avons alerté les autorités boliviennes de la présence de Marset en Bolivie », ajoute Federico González, ministre de l’Intérieur paraguayen. Désormais, certains murmurent que le narcotrafiquant n’aurait toujours pas quitté le pays et se planquerait à Cochabamba… Quoiqu’il en soit, les clubs de la région sont prévenus : Sebastian Marset est sur le marché des transferts.

Par Victor Massias

Tous propos recueillis par VM, sauf ceux du président de la République uruguayenne et du ministre de l'Intérieur paraguayen, issus de conférence de presse.

Illustration : Midjourney.

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