Samir Nasri : « Personne n’égale Iniesta » (2/2)

A tes débuts, Troussier te comparait à Djorkaeff. Est-ce toujours d’actualité ?

Ça m’a fait défaut ça. Troussier me faisait jouer pendant 90 minutes à 17ans. A la fin, j’étais à bout de souffle. On ne m’utilisait pas avec parcimonie. Mais bon, il m’a fait confiance malgré mon jeune âge, je lui tire un grand coup de chapeau. En 3-5-2 avec deux attaquants, franchement, je me suis régalé.

A Arsenal, on fait travailler les joueurs sur leurs points forts. Pour toi, c’est quoi, la pénétration balle au pied ou la précision de passe ?

Je dois avoir un gros potentiel parce qu’ils me font tout travailler ! Le jeu à une touche, en première intention, sur la pénétration balle au pied, la technique, les bases aussi…

Wenger te place à gauche dans un but bien spécifique. Lequel ?

Bergeroo aussi me faisait jouer à gauche en sélection de jeunes. L’important à gauche, c’est d’avoir un bon latéral derrière toi. C’est facile avec Clichy derrière. Grâce à lui, je peux rentrer dans l’axe. On me demande de ne pas rester sur un côté, je ne suis pas un ailier de débordement.

L’Espagne gagne l’Euro avec Fabregas, Xavi, Iniesta… Tu ne veux pas imposer ton profil en sélection ?

Raymond Domenech a été l’un des premiers à me parler de l’idée d’évoluer à ce poste-là. Mais Toulalan peut apporter un plus offensivement et rassurer. L’Espagne gagne l’Euro mais leur numéro 6, c’était Senna, et ils étaient tous au top. Si on regarde les performances actuelles, entre Lassana Diarra et Senna, ça ne se joue plus à grand-chose. Par contre pour ce qui est d’Iniesta …

Quand tu vois Xavi ou Iniesta et leur pourcentage de passes réussies lors de la finale de la Ligue des Champions, est-ce que tu te dis que, toi aussi, tu peux le faire ?

Tout le monde se pense capable de le faire, il suffit d’avoir un peu d’ambition. Mais après, il faut jouer. A l’heure d’aujourd’hui, on ne peut pas égaler Iniesta. Et Xavi a une telle intelligence de jeu qu’il ne perd pas un ballon. L’Espagne est au top, ils ont vraiment une grosse équipe. Quand je regarde notre Équipe de France, je me dis que nous avons aussi des qualités. Il suffit de trouver le bon schéma pour faire jouer pleinement Ribéry, Henry, Lassana Diarra, Anelka, Benzema… En ce qui me concerne, je sais que je n’ai pas besoin de me peindre en noir pour être crédible en numéro 6 des Bleus (rires) !

Qu’est-ce que tu retiens de l’Euro 2008 ?

Il m’a fait grandir et m’a rendu plus fort. Je n’en sors pas que des choses négatives, j’ai vu le haut niveau. Mentalement, j’ai été mis à rude épreuve. Et pourtant je me suis relevé, c’était une étape nécessaire.

Est-ce que tu chambres les nouveaux venus chez les Bleus ?

Moi, j’aime bien rigoler. Je ne suis pas enfermé dans mon coin. Après, il y a des joueurs qui ne pensent qu’à chambrer : Thierry, Franck…

Que penses-tu du schéma de Domenech, avec deux milieux défensifs purs ?

Je ne raisonne pas comme ça. La réflexion se fait en amont : je dois être bon avec Arsenal pour être sélectionné en Équipe de France. Après, je ne m’inquiète pas. Lors du dernier rassemblement auquel j’ai participé (pour le deuxième match de la Lituanie, nldr), j’ai beaucoup joué au poste de numéro 6. Ça prouve que rien n’est fermé. Il faut répondre présent quand on fait appel à toi, et ne pas penser au poste.

Avec le jeu des générations, auras-tu le temps de t’imposer ?

En Équipe de France, on n’a pas la même vie qu’en club. Certains se révèlent sur le tard donc la politesse, je peux me la faire griller de tous les côtés ! Maintenant je joue pour Arsenal, donc si je suis performant en club, je ne vois pas pourquoi on ne me sélectionnerait pas. Regarde le Mondial 2006 : Ribéry n’était pas forcément titulaire au départ, mais il a fait son match et il n’est plus sorti du groupe. On ne maîtrise pas tous les paramètres, il faut se tenir prêt.

Domenech dit que seule la performance sportive prédomine. Tu peux donc lâcher un dossier sur lui sans risquer ton avenir. Chiche ?

Ouais, je pourrais ! Mais le problème, c’est que je n’ai rien à lâcher sur lui ! Avec moi, il a toujours été correct et droit. Je n’ai même pas de quoi le chambrer en fait.