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Pour Bartomeu, le bateau a culé

Par Adel Bentaha
Pour Bartomeu, le bateau a culé

L’arrestation de Josep Maria Bartomeu lundi matin a secoué toute la Catalogne. Une onde de choc aux allures de séisme qui semblait pourtant prévisible. Visé par une multitude d’affaires judiciaires, dont le fameux « Barça Gate », l’ancien président du FC Barcelone paie la gestion désastreuse d’un club mythique. Choisi pour succéder au sulfureux Sandro Rosell au mois de janvier 2014, le Barcelonais de naissance n’aura pas su apprendre des erreurs de son prédécesseur. Sept ans plus tard, il se retrouve à son tour seul face à un destin cruel.

Ce lundi a sonné le glas d’une période sombre et amorcé un nouveau chapitre dans la vie du FC Barcelone. Josep Maria Bartomeu, Òscar Grau, Jaume Masferrer, et Román Gómez Ponti viennent de passer une journée entière au commissariat de Les Corts. Il y a un peu moins de six mois, Bartomeu quittait pourtant sa fonction de président, sous la pression de supporters furieux et des menaces à peine voilées de Lionel Messi. Élément déclencheur d’une cascade de malheurs, la prolongation de La Pulga aura précipité la chute déjà amorcée du dirigeant et de ses collaborateurs. Cette matinée du 1er mars a donc vu « los Mossos », la police catalane, débouler dans les locaux du Camp Nou afin de récupérer les documents liés à ce « Barça Gate », point de départ du précipice.

Mensonges et calomnies

Tout commence le 17 février 2020. Alors que les premières rumeurs sur le contrat de Leo Messi s’ébruitent, SER Catalunya fait état d’une étrange opération de communication menée par Josep Maria Bartomeu. Dans son programme Què T’hi Jugues !, la radio révèle que le président aurait signé un partenariat avec I3 Ventures, une société spécialisée dans les télécommunications et les relations digitales. Cet accord a pour but de former un mouvement de propagande en faveur de la direction et de dénoncer les agissements de plusieurs membres du club sur les réseaux sociaux. Par le biais de faux comptes subtilement intitulés Justicia y Dialogo en el Deporte ou encore Sport Leaks, une véritable campagne de manipulation d’opinion est lancée. On peut ainsi y apprendre que « Gerard Piqué est plus préoccupé par ses ambitions politiques que son niveau de jeu » et que le FC Barcelone aurait « rapporté plus d’un million d’euros à la ville en 2018 et 2019 ». Des publications au mieux grossières, au pire ahurissantes qui n’échappent pas au cyclone médiatique. Accusé de « diffamation » et de « manipulation de l’opinion publique », le dirigeant se retrouve dos au mur. Pour se défendre, Bartomeu organise une assemblée, durant laquelle il réfute chacune des accusations dont il fait l’objet.

Pourtant, les preuves continuent de pleuvoir, et des centaines de publications mensongères sont démasquées tour à tour. Sentant le vent se transformer en tempête, Josep Maria Bartomeu fait machine arrière et avoue à demi-mot : « Il est vrai qu’à la fin de l’année 2017, le Barça a embauché ce service de surveillance comme le font la grande majorité des clubs et des entreprises. C’est certain. À la question de savoir si nous avons commandé le suivi des réseaux sociaux, la réponse est oui. Et nous continuerons à le faire. » Le 21 février, un cabinet indépendant est nommé afin de faire la lumière sur ces agissements. Dans un premier rapport, la Price WaterHouse (PWC) assure « que le club n’a pas diffamé et qu’il n’y a eu ni corruption ni surévaluation des coûts ». Malgré l’ambiguïté de son intervention, le président ne compte pas en rester là et entame sa chasse à la taupe. En réaction à ces méthodes drastiques, six membres de la direction finissent alors par démissionner en avril. Parmi eux, un nom interpelle : celui d’Emili Rousaud, le vice-président. Considéré comme proche du président, mais loin d’être irréprochable, ce dernier décide de quitter le navire en perdition.

La vie est un Rousaud

En démissionnant du FC Barcelone, Emili Rousaud est devenu l’ennemi intime de son club de toujours. Invité de la RAC1, l’ancien vice-président évoque pour la première fois l’existence de plusieurs zones d’ombre : « Les dirigeants nous disent que le coût de ce service avoisine les 100 000 euros, mais le problème, c’est que nous en avons déboursé un million. Quelqu’un a donc forcément mis la main dans la caisse pour se servir. Je n’ai aucune preuve pour le moment et je ne peux pas dire qui. » Peu après, le deuxième rapport de la PWC tombe. Le document révèle en effet que les tarifs moyens appliqués par des sociétés similaires à I3 Ventures oscillent entre 120 000 et 150 000 euros. Un écart de plusieurs centaines de milliers d’euros est donc à déplorer par la commission d’enquête, loin du premier bilan établi. Les révélations de Rousaud enfoncent un peu plus Josep Maria Bartomeu sous l’eau, le tout résumé en une phrase : « Les dirigeants nous ont poussés à démissionner, et je l’accepte. Cependant, je refuse de partir sans expliquer aux socios la manière dont leur club est géré. »

Aux accusations de diffamation vient effectivement s’ajouter la « falsification de document », soutenue par des montages économiques illégaux. Comme le révèle AS, cette somme d’un million d’euros aurait en effet été divisée en cinq parties de 200 000 euros. Un système savamment orchestré par le chef du cabinet de la présidence Jaume Masferrer, dans le but d’échapper aux radars du conseil d’administration et de ses contrôles internes. Un aspect d’autant plus visible qu’il affecte l’ensemble de la structure barcelonaise. Plusieurs responsables de la Masia ont ainsi découvert l’existence de montants « estimés à 99 000 euros ». Des factures « non renseignées dans les registres », appartenant à la société Tantra Soft, filiale d’I3 Venutres. Au total, le club aurait sollicité quatre entreprises différentes et déboursé près de deux millions d’euros. Les locaux de Tantra Soft, Digital Side, Big Data Solutions et Futuric ont fini par être perquisitionnés ce lundi.

Coup de pied dans la barcelonière

L’arrestation de Josep Maria Bartomeu, Òscar Grau, Jaume Masferrer et Román Gómez Ponti semble donc être le début d’une longue série de feuilletons judiciaires pour le Barça. L’ancien président et ses associés ont révélé, malgré eux, les rouages d’un système en déliquescence qui a plongé un symbole historique dans le noir complet. Ce « Barça Gate » n’est en réalité que l’arbre qui cache une forêt de plaintes. Parmi elles, l’enquête ouverte début février contre plusieurs membres du comité de direction de Bartomeu, à la suite de la divulgation du contrat de Lionel Messi. Plus récemment, c’est le tribunal économique de Barcelone qui est parti à l’offensive, après de nouvelles révélations sur le transfert de Malcom à l’été 2018.

Comme un oxymore, c’est finalement loin du terrain que le FC Barcelone fait la une des journaux depuis plus d’un an maintenant. Une véritable insulte au football et aux Culés, qui voient défiler la déchéance d’une direction avide de gros sous. Loin du tiki-taka, c’est désormais sur les bancs froids des salles d’audience que l’institution catalane joue sa réputation.

Par Adel Bentaha

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