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Maroc, les Lions de la casse

Par Mathieu Rollinger et Maxime Brigand, à Saint-Pétersbourg
Maroc, les Lions de la casse

En embuscade derrière l’Espagne et le Portugal dans le groupe B, les hommes d’Hervé Renard commencent leur Coupe du monde vendredi face à l’Iran, à Saint-Pétersbourg. Devant eux : une compétition qui prend l’allure d’un filtre à destins.

La rumeur court depuis déjà plusieurs mois : attention, ces gars-là sont affamés. Confirmation : en arrivant jeudi après-midi face à la presse, à Saint-Pétersbourg, où le Maroc ouvrira sa Coupe du monde vendredi face à l’Iran du magicien Queiroz, Hervé Renard a rappelé à qui veut l’entendre que sa troupe ne vient pas en Russie pour se faire scier les pattes, encore moins pour « prendre des photos de monuments » .

« On est là parce qu’on est des compétiteurs » , pose derrière son sourire Ultra Brite la belle gueule d’Aix-les-Bains. L’idée est la suivante : ce Mondial est un purgatoire, où les Lions de l’Atlas viennent savourer une première invitation au bal après vingt ans passés sur le canapé, mais aussi rapidement gommer la frustration de s’être fait botter de la course à l’organisation d’une Coupe du monde. Pour la cinquième fois. Histoire d’y mettre la forme et de prévenir le monde entier, le Maroc tient actuellement entre ses doigts la troisième série d’invincibilité la plus importante des mondialistes, derrière l’Espagne et la Belgique. Soit 18 matchs consécutifs sans défaite. Renard enfonce ainsi le dernier clou avant le premier tour de piste : « Aujourd’hui, on a tout pour faire un bon résultat. »

Reservoir Dogs

« Tout » ? Le cœur, les armes, les hommes, sans aucun doute. L’essence du moteur : des types tirés d’un polar, des truands qui s’allient quel que soit leur passé respectif pour réussir le plus beau des braquages. Sur un gros fauteuil capitonné, Mehdi Benatia, le patron, celui qu’on écoute, qui fait dégouliner sur l’ensemble son aura et sait aussi tirer les ficelles pour que le groupe vive en totale osmose. « Tout n’a pas été facile pour beaucoup d’entre nous, insiste le défenseur de la Juventus au moment d’attaquer le premier Mondial de sa vie. Maintenant, dans une carrière de foot, à la fin, tu as toujours ce que tu mérites : cette Coupe du monde a encore plus de saveurs, parce qu’on sait ce qu’on a dû faire pour arriver jusqu’ici, devant vous. » Lui : un gamin de la génération 1987, lourdé par l’Olympique de Marseille à vingt piges et qui a dû prendre des chemins de traverse pour s’imposer ensuite chez les grands, tout en acceptant de quitter la France, un pays qui n’aura jamais réussi à complètement l’apprivoiser. Derrière lui : des destins cabossés, des vies vallonnées, mais surtout des mecs qui se tiennent aujourd’hui debout, serrés.

Facile de s’arrêter. Il y a là Munir Mohamedi, gardien né dans l’enclave espagnole de Melilla, destitué de son strapontin de titulaire à Numancia, mais qui s’accroche à celui de la sélection du pays de ses ancêtres, et ce, malgré l’incompréhension des potes restés de l’autre côté du grillage. Puis, Manuel da Costa, qui a dû répondre devant la justice anglaise d’une affaire d’attouchement sexuel lors de son passage à West Ham, en 2011. Finalement blanchi, l’image lui colle toujours à la peau. Pareil pour l’ancien délinquant Hakim Ziyech, qui a connu la taule et la drogue dans sa jeunesse aux Pays-Bas.

Plus loin, on retrouve le vétéran M’bark « Baradona » Boussoufa, lui aussi enfant de l’Ajax, fracassé de la vie, refoulé de Chelsea par le projet Abramovitch, puis exilé au pays des Soviets pendant cinq saisons sans trop y jouer, mais grassement payé. « Sa prison dorée » , comme il aime le répéter. Et le reste : l’intello Khalid Boutaïb, une tête en maths, qui a dû vendre des beignets et trimer à Luzenac avant de faire son trou en Ligue 2, Aziz Bouhaddouz, orphelin à treize ans, vendeur de journaux à dix-sept et aujourd’hui idole à Sankt-Pauli, ou encore le crack dévalué Nabil Dirar. Des déracinés qui ont fini par se rattraper aux branches : pas moins de dix-sept joueurs de la sélection n’ont jamais joué pour un club marocain.

Les Affranchis

Et alors ? La trajectoire d’Hervé Renard, qui a décollé jeudi l’étiquette de « petite équipe » à son Maroc et qui a été publiquement soutenu par Louis van Gaal en arabe dans le texte, ne raconte pas autre chose. L’entraîneur français cherche avant tout à croquer dans la chance donnée à ce cocktail de vieux rêveurs et de jeunes promesses. « On va vivre ça comme une fête et on compte la vivre le plus intensément possible, assure-t-il. Je suis parti de la quatrième division, en France, et voilà, au fil des années, du travail, de quelques échecs, de réussites, on peut atteindre ses rêves. Maintenant, le plan est simple : jouer notre jeu, comme toujours, avec le même esprit, parce que c’est ce qui fait qu’on est difficiles à jouer. »

Et que le Maroc est probablement l’équipe africaine la plus sexy d’un moment où Benatia appelle les jeunes à profiter du Mondial : « La pression, c’est pour les anciens. » Difficile à contredire : face à l’Iran, vendredi, dans une rencontre où la victoire est presque impérative, Renard comptera avant tout sur l’insouciance de Ziyech, Saïss, Hakimi. Leur appétit est connu et leur soif de revanche avec : place à l’affranchissement des destins.

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Par Mathieu Rollinger et Maxime Brigand, à Saint-Pétersbourg

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