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- Épisode 7
Mais au fait, ils veulent dire quoi ces blasons ? Épisode 7
Ils sont les premiers repères de l'identité visuelle des clubs et ont généralement une place de choix sur tous les maillots. Qu'ils soient moches, magnifiques, compliqués ou au contraire simplistes, les blasons ont tous des petites histoires à livrer.
Futebol Clube do Porto
De tous les blasons des grands clubs européens, celui du FC Porto est peut-être l’un des plus complexes et l’un des plus beaux. Le 26 octobre 1922, le joueur Augusto Baptista Ferreira (surnommé Simplício par ses coéquipiers) décide de dessiner le blason de son club. Il se trouve qu’il est également graphiste, un avantage non négligeable dans ce cas de figure. Augusto décide pour commencer de garder l’ancien blason du club comme base du nouveau. Cet ancien blason, c’est ce ballon de football bleu sur lequel on peut voir, en blanc, les initiales du club. Au dessus de ce joli ballon, l’artiste joueur décide d’ajouter les armoiries de la ville de Porto. À cette époque, il s’agit d’un bouclier divisé en quatre parties : dans les parties supérieure gauche et inférieure droite sont incrustées les armoiries du Portugal, et dans l’autre diagonale celles de la ville (la Vierge Marie tenant Jésus dans ses bras au milieu de deux tours – rien à voir avec Le Seigneur des anneaux). Autour de ce bouclier, Augusto dessine un joli collier, et pas n’importe lequel. Il s’agit du collier de l’Ordem Militar da Torre e Espada do Valor, Lealdade e Mérito (l’ordre militaire de la tour et de l’épée de valeur, loyauté et mérite, en français), représentant la plus haute distinction honorifique portugaise. Enfin, tout en haut dans sa couronne trône le symbole du club, le dragon. Choisi par le club pour ce qu’il représente (pouvoir, volonté, peur), le dragon est lié au Portugal depuis longtemps. Il était l’un des symboles de la deuxième maison de Bragance qui régnait sur le Portugal entre le XVIIe et le XIXe siècle. C’est d’ailleurs l’une des membres de la famille, Maria II, reine du Portugal de 1826 à 1828 et de 1834 à 1853, qui surnomma Porto Invicta (la cité invaincue) après que la ville a résisté au siège de 1832/1833. Ce surnom est d’ailleurs présent dans la gueule du dragon en haut du blason. La boucle est bouclée et elle a de quoi faire pâlir les scénaristes de Game of Thrones.
West Ham United FC
Des châteaux, des dynasties… Le blason de West Ham ne pouvait pas mieux tomber. Fondé en 1895 par Arnold Hills et Dave Taylor, le club est resté fidèle à ses origines. Lors de la fondation, les deux créateurs sont contre-maîtres dans une société londonienne de chantiers navals que s’appelerio Thames Ironworks and Shipbuilding Company Limited. Logiquement, le club prend alors le nom de la compagnie à laquelle il est associé et naît sous le nom de Thames Ironworks FC. En 1904, lorsque le premier blason est dessiné, il veut rendre hommage aux ouvriers des chantiers navals qui battent l’acier avec… des marteaux, oui. Voilà pourquoi on peut retrouver ces deux marteaux sur le blason et pourquoi les joueurs sont surnommés les Hammers (en anglais, a hammer est un marteau). Et le château, alors ? Selon les dires de plusieurs historiens, West Ham se serait installé à l’endroit exact de Green Street House, le château de la mère de la reine Elizabeth Ier, Anne Boleyn. Voilà qui explique pourquoi le stade actuel de West Ham s’appelle le Boleyn Ground. Au début des années 2000, le club décide même de faire reconstruire des répliques des tours de Green Street House à l’entrée du stade. Seulement, puisque West Ham déménagera l’an prochain dans le stade olympique, le château va disparaître du blason, qui ne gardera que les marteaux et les couleurs du club. Des couleurs que le club a « empruntées » à Aston Villa. En 1899, Bill Dove, père d’un des joueurs de West Ham, défie à la course des joueurs d’Aston Villa à Birmingham. Après une victoire écrasante, l’un des joueurs d’Aston Villa, chargé de lessive ce jour-là, offre à Bill Dove un jeu de maillots. Depuis, les deux équipes partagent le claret et le blue sur leurs maillots.
Racing club de Lens
Ainsi donc, les couleurs d’un blason revêtent elles aussi des petites histoires succulentes. Et ce ne sont pas les Lensois qui pourront affirmer le contraire. Avant 1923, les Sang et Or ne jouaient pas du tout en rouge et jaune. Un soir, en sortant de réunion, les dirigeants et les joueurs passent devant les ruines de l’église Saint-Léger de Lens. L’un deux fait remarquer à l’assemblée réunie qu’il s’agit là des derniers vestiges de l’occupation espagnole de la ville. René Moglia, président de l’époque, a un déclic et emprunte le rouge et le jaune au drapeau espagnol pour remplacer le vert et le noir du Lens des années précédentes. Depuis 1955, le blason fait la part belle à la lampe de mineur, en noir, et rend ainsi hommage aux premiers joueurs qui étaient également salariés des Houillères de Lens (qui ont fondé le club, tout de même). Les Houillères ont compris « le bien social que peut apporter une équipe de football dans une région où le football est roi » . À partir de 1969, date à laquelle le maire André Delelis décide de redonner un coup de jeune au club (qui vient d’être revendu par les Houillères et qui évolue alors en amateur), la lampe de mineur doit coexister avec un château fort et des fleurs de lys. Deux éléments qui sont, comme bien souvent, empruntés aux armoiries de la ville. Ce château est le symbole de la ville de Lens depuis le tout début du XIIIe siècle (il était vraisemblablement présent sur l’actuelle place de la République). Les fleurs de lys, quant à elles, sont le symbole de la monarchie française et apparaissent sur les armoiries de la ville vers 1400. Tout en haut du blason, la mention « depuis 1906 » est, elle, apparue en 2001 et fait référence à l’année de création du club. Logique.
Par Gabriel Cnudde