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Mahmoud Sarsak, la fin de la grève

Par Régis Delanoë
5 minutes
Mahmoud Sarsak, la fin de la grève

Emprisonné depuis près de trois ans sans jugement en Israël, le footballeur international palestinien Mahmoud Sarsak avait entamé une grève de la faim en mars en guise de protestation. Sous la pression du monde du football et de quelques personnalités influentes qui se sont émues de sa situation, il a reçu la promesse d’être libéré en juillet.

22 juillet 2009, terminal d’Erez, check point entre la Bande de Gaza et Israël. Comme tout le monde, Mahmoud Sarsak et deux autres joueurs gazaouis font la queue pour passer la frontière. Dans les mains du jeune homme de 25 ans, un sac de sport contenant ses affaires de foot et des papiers administratifs d’autorisation de sortie. Car lui comme ses compères sont attendus par la sélection palestinienne, qui doit disputer une rencontre amicale dans le camp de réfugiés de Balata, près de la ville de Naplouse, au nord de la Cisjordanie. Sarsak, qui a débuté dans le championnat local à l’âge de 14 ans au poste de milieu de terrain, est un joueur qui monte au pays.

Mais au moment du contrôle d’identité, les choses dérapent : tandis que ses deux coéquipiers se voient refuser l’entrée en Israël par les douaniers, Mahmoud se fait carrément arrêter. Le motif ? D’après lui, d’après son frère Imad, d’après son avocat Mohammad Jabbarine, il n’y en a aucun. De leur côté, les autorités israéliennes l’accusent de mener le Jihad, sans jamais en avoir apporté la preuve depuis. Interrogé durant trente jours, le jeune homme originaire de Rafah est finalement écroué fin août à la prison d’Ashkelon, sous le régime de la « détention administrative » , une disposition héritée du mandat britannique qui permet d’emprisonner sans jugement toute personne considérée comme un « combattant ennemi » issu d’un territoire hostile. Ce qu’est devenu Gaza pour Israël, depuis leur désengagement achevé en 2005 et l’arrivée au pouvoir du Hamas.

Canto s’en mêle

Comme d’autres compatriotes, Mahmoud Sarsak est incarcéré sans inculpation ni jugement, pour une durée de six mois renouvelable à l’infini. Une sorte de PATRIOT Act condamnée par Amnesty International. Les semaines passent, les mois, les années. Au sixième renouvellement de son statut, Mahmoud Sarsak décide de passer à l’action. La seule qu’il puisse entreprendre : la grève de la faim. Fin mars dernier, ils sont comme lui entre 1000 et 2000 prisonniers palestiniens à refuser de se nourrir, pour interpeller sur leurs conditions de détention. Un accord est finalement signé le 14 mai avec l’administration pénitentiaire et tous stoppent leur grève, sauf Mahmoud qui s’acharne, au péril de sa vie. Jamais un prisonnier n’avait fait une grève de la faim aussi longue. Son avocat, sa famille et les médecins alertent : l’ancien footballeur a perdu un tiers de son poids de forme, s’évanouit régulièrement, a des problèmes cardiaques et ne peut plus se déplacer qu’en fauteuil. En clair, il est pas loin d’y passer.

Soutenu d’abord par la population palestinienne, qui manifeste régulièrement pour la cause dans les rues, Mahmoud Sarsak voit son cas dépasser les frontières. Signée par plusieurs personnalités telles que Cantona, Ken Loach ou Noam Chomsky, une lettre demandant la libération du prisonnier a été adressée à plusieurs instances du monde politique et du football. Même le pourtant pas très militant Sepp Blatter a exhorté récemment la Fédération israélienne à intervenir en faveur de Mahmoud Sarsak et d’autres joueurs de football, « détenus de manière prétendument illégale » . Parmi les mouvements de solidarité nés ces derniers jours, on peut également citer le soutien public apporté par la FIFPro, la fédé internationale des joueurs professionnels, ainsi qu’une pétition signée par plusieurs sportifs (Mandanda, Mamadou Niang, Momo Sissoko, Anthony Le Tallec, André-Pierre Gignac, les frères Ayew, Moussa Sow, Anelka, Ladji Doucouré…), à l’initiative de Fred Kanouté. La Fédération palestinienne a même demandé que soit retirée l’organisation de l’Euro espoirs 2013 à Israël. Cette mobilisation a finalement eu de l’effet : en début de semaine, l’avocat Mohammad Jabbarine a indiqué que son client venait de cesser sa grève de la faim, contre la promesse d’une libération, qui doit avoir lieu le 10 juillet, soit près de trois ans après son arrestation. En attendant, il a été transféré dans un hôpital pour se refaire une santé.

Les galères de la sélection

L’histoire se finit donc bien pour Mahmoud Sarsak. Pour le football palestinien en revanche, la galère continue. On avait interviewé il y a un peu plus d’un an le sélectionneur de l’époque, Moussa Bezaz. Il nous avait fait part de sa grande lassitude quant aux conditions de travail au quotidien et les problèmes générés par les autorités israéliennes. « Les joueurs de Gaza sont encore soumis à des permis pour sortir du territoire et y rentrer, disait-il. Du coup, lors d’une de nos dernières sorties, en Mauritanie, j’ai été contraint de composer sans huit sélectionnés, qui se sont fait refuser leur autorisation de sortie » . Pis, en janvier 2009, trois joueurs gazaouis, dont l’international Ayman Alkurd, avaient été tués dans les bombardements qui avaient secoués la Bande. Dans de telles conditions, difficile de maintenir la sélection du sport le plus populaire du pays à flot. Éliminée au second tour des qualifications au Mondial 2014 par la Thaïlande, la Palestine, 153e nation Fifa, participe dans quelques jours à la Coupe arabe des nations en Arabie Saoudite. Avec forcément une pensée pour Mahmoud Sarsak.

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Par Régis Delanoë

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