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Le Portugal, terre d’exil japonais

Par Amaury Gonçalves
Le Portugal, terre d’exil japonais

À l'été 2015, aucun Japonais n'était présent dans le championnat portugais. Six ans plus tard, ils sont neuf, ayant chacun un rôle essentiel dans leur club de Liga Bwin. Décryptage d’une tendance gagnante pour le football portugais.

Trente-cinq millions d’euros. C’est la somme démentielle pour laquelle Portimonense a vendu en 2019 son joyau nippon Shoya Nakajima à Al-Duhail. Un record évident pour le modeste club situé dans la région de l’Algarve, mais aussi pour le football portugais. En dehors des clubs du top 3 national, il s’agit du transfert le plus onéreux du championnat, devançant même les 32 millions d’euros de la somme perçue par Braga pour le transfert de Vitinha de cet hiver. En moins d’un an et demi, Nakajima est donc parvenu à entrer dans l’histoire économique du championnat, sans oublier d’y étaler pleinement son talent auparavant. Arrivé en provenance du Tokyo FC à l’été 2017, le petit ailier gauche a brillé au Portugal par ses facultés techniques et cognitives qui font de lui l’une des attractions de la Liga NOS. À tel point qu’il tape rapidement dans l’œil de Porto et de Benfica, mais aussi du PSG par l’intermédiaire d’Antero Henrique. C’est néanmoins l’offre mirobolante du club qatari qui rafle la mise. Aux origines de cet évènement, un partenariat lié entre Portimonense et le football japonais. En héritage, une relation durable et fructueuse entre le football de deux pays aux antipodes l’un de l’autre sur le continent eurasiatique.

Portimonense et ses ponts nippons

Encore pensionnaire de deuxième division en 2016, Portimonense mise sur un partenariat original pour faire entrer son club dans une nouvelle dimension. Tandis que Takeshi Okada, vice-président de la Japan Football Association, investit dans le club algarvio dès le début des années 2010, c’est en 2016 qu’il en devient un actionnaire majoritaire. Figure d’influence du football japonais, il encourage Portimonense à s’orienter vers la terre du Soleil levant, par une bonne coordination avec Rodiney Sampaio, président du club, et Robson Ponte, directeur technique et ancien meneur de jeu de l’Urawa Reds au Japon. C’est d’ailleurs à cette période que Robson Ponte fait la connaissance de Takeshi Okada. Ensemble, ils créent un pont entre Portimonense et le football japonais par un accord. Tandis que Portimonense obtient le recrutement de jeunes promesses japonaises du football, le club portugais doit envoyer certains de ses vétérans lusophones en J.League pour aider au développement du championnat.

Mis en place à partir de l’été 2017, ce projet coïncide avec la montée du club en première division. Le club portugais envoie alors quelques-uns de ses joueurs brésiliens en J.League, tels que Fabricio ou Buba. Dans l’autre sens, de nombreux jeunes joueurs japonais se voient accorder un essai au Portugal. Parmi eux, certains sont retenus, mais peu réussissent. Jusqu’à ce qu’un petit ailier aux facultés techniques et physiques admirables ne fasse parler de lui dans tout le pays. La trace économique et sportive laissée par Shoya Nakajima permet au projet de se relancer après un premier temps balbutiant. Shuichi Gonda, Koki Anzai ou Kosuke Nakamura ont depuis eu l’occasion de s’illustrer eux aussi à Portimão. Malgré ces différents succès qui auraient pu permettre à Portimonense de gagner en notoriété à l’autre bout du continent, les répercussions y sont moindres. « Quand Nakajima est arrivé au Portugal, ça a créé un certain engouement au Japon, mais ce n’est pas allé plus loin que ça, atteste Lionel Piguet, journaliste franco-suisse travaillant pour JSoccer Magazine. Les gens s’y sont intéressés, mais le football portugais est difficilement accessible depuis les chaînes nationales. » Ces premiers liens luso-japonais permettent tout de même d’en créer de nouveaux. Dès 2017, l’équipementier japonais Mizuno devient partenaire du club portugais. Un moyen pour la marque japonaise de pénétrer le marché européen, alors qu’elle n’équipe que deux clubs japonais à l’époque. Depuis, Mizuno s’est étendu sur le Vieux Continent en Italie (Lazio) et en Allemagne (Bochum).

La tendance japonaise, nouvelle mode portugaise

Lors de la saison 2017-2018, Shoya Nakajima et Theo Ryuki (Portimonense) sont les seuls joueurs japonais à évoluer au Portugal alors qu’il n’y en avait aucun l’année précédente. Cette saison ils sont neuf, répartis dans sept clubs différents. Un bel indice montrant que la tendance japonaise a dépassé les frontières de Portimão au Portugal. Au-delà du rêve de trouver la perle rare comme le club algarvio l’a fait avec Nakajima se dessinent d’autres logiques sportives et économiques. « Les joueurs japonais ont une envie immense de venir jouer en Europe, témoigne Rui Ferreira, recruteur de Casa Pia en Liga Bwin. De cette manière, certains joueurs s’émancipent du facteur financier pour rejoindre l’Europe, ça aide beaucoup des clubs tels que le nôtre. » C’est grâce à ce principe gagnant-gagnant que le modeste club lisboète a su attirer Takahiro Kunimoto et Yuki Soma. De la même manière, Santa Clara avait enregistré l’arrivée gratuite d’Hidemasa Morita à l’hiver 2021 avant de le vendre au Sporting pour 4 millions d’euros l’été dernier.

Là où les joueurs japonais plaisent aux recruteurs portugais, c’est aussi et surtout par leurs profils. « Le championnat japonais était intéressant pour trois facteurs principaux, détaille Rui Ferreira. Ce sont généralement des joueurs très évolués techniquement, qui ont une connaissance développée du football du point de vue tactique et enfin, avec une immense volonté d’apprendre. » Interrogé en septembre dernier à propos d’Hidemasa Morita, l’entraîneur du Sporting Rúben Amorim avait confirmé et complété ce portrait dithyrambique des joueurs japonais : « Tous les entraîneurs devraient avoir au moins un joueur japonais dans leur effectif, expliquait-il. Un joueur toujours prêt à aider l’équipe, très respectueux, pouvant s’excuser un millier de fois par jour. » Bien qu’idéaliste – le cas Nakajima au FC Porto a montré quelques limites au niveau du comportement –, ce portrait doit composer avec des barrières linguistiques et culturelles logiques. Pour les effacer à Casa Pia, « on apprend quelques mots en japonais et on fait en sorte que [Kunimoto et Soma] ressentent notre empathie, explique Rui Ferreira. On fait naturellement un pas vers eux pour qu’ils puissent plus facilement s’intégrer. »

Au Portugal comme dans le reste de l’Europe, la vague japonaise se renforce. En plus de Morita, Kunimoto et Fujimoto, le pays ibérique devrait accueillir Kazuyoshi Miura. Connu pour être, à 55 ans, le joueur professionnel le plus vieux du monde, il devrait être prêté pour six mois à Oliveirense, club de deuxième division, par Yokohama. Ce transfert, dû au fait que le président du club japonais soit devenu l’actionnaire majoritaire d’Oliveirense fin 2022, permettra au Portugal de se montrer, un peu plus, comme une terre d’accueil des joueurs japonais. De quoi continuer de lui offrir une exposition à l’autre bout de l’Eurasie pour un jour, peut-être, avoir des matchs de Liga Bwin au programme des grandes chaînes sportives du pays du Soleil Levant.

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Par Amaury Gonçalves

Propos de Rúben Ferreira et Lionel Piguet recueillis par AG.

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