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L’année où mes parents sont partis en vacances

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L’année où mes parents sont partis en vacances

Brésil 1970 : la coupe du monde bat son plein et les militaires durcissent le ton. Les parents de Mauro, 12 ans, décident de « partir en vacances » pour fuir la dictature. A Sao Paulo, ils doivent confier leur fils à son grand-père mais celui-ci n'est pas au rendez-vous. Le couple ne s'en inquiète pas et prend la tangente. Le papy ne viendra jamais et Mauro est recueilli par la communauté d'un quartier juif pauliste.

Second film du réalisateur brésilien Cao Hamburger, L’année où mes parents sont partis en vacances narre donc l’histoire de Mauro, gamin de Belo Horizonte, fan de foot comme tout Brésilien qui se respecte, d’un ersatz de Subbuteo, collectionneur invétéré de vignettes pré Panini à l’effigie des joueurs de la Seleçaõ. Expédié malgré lui dans le quartier juif de la mégalopole pauliste, Moishale (surnom éloquent qui lui est donné par ses voisins) y vivra pleinement ce Mondial mexicain marqué par l’absence de ses darons.

Dans un Brésil en pleine période dictatoriale (les militaires prennent le pouvoir en 1964) et alors que la répression s’intensifie, on fait connaissance avec des figures de la contestation, et notamment Italo, étudiant marxiste, un résumé à lui seul de la défiance vis-à-vis du pouvoir en place. Une scène de répression quelque peu irréelle, à laquelle les passants assistent comme s’ils étaient au théâtre, illustre d’ailleurs à sa façon quasi surréaliste la violence dévastatrice du pouvoir totalitaire.

Mais on a beau se battre contre la junte, rien n’y fait, on est Brésilien et on le demeure. Pendant le match Brésil-Tchécoslovaquie, les étudiants révolutionnaires ne savent plus trop où donner de la tête. Qui supporter ? Le Brésil des militaires ou la Tchécoslovaquie communiste ? En découle une douce schizophrénie chez ces marxistes pur sucre, se réjouissant de l’ouverture du score des camarades de l’Est : « C’est toujours ça de pris » , mais qui virent hilares lorsque les Auriverde reprennent l’avantage. C’est ce que l’on retrouve également sur la présence conjointe ou non de Pelé et Tostao dans le onze de départ de la sélection brésilienne. Comme si à l’époque ce débat-là importait plus que tout le reste dans le pays de l’“ordem e progresso”. Plus que les libertés élémentaires ; plus que l’absence des siens partis se terrer dans quelque improbable refuge ; plus, enfin, que le manque cruel de perspective d’avenir.

Opium du peuple, le futebol permet avant tout au peuple de l’opium (le pays champion du monde), l’espace d’un match, d’oublier sa misérable condition. Preuve s’il en est le match de quartier entre la communauté juive et son homologue italienne, ou plutôt entre les Juifs et leur gardien noir et les Ritals. Tiens, d’ailleurs parlons-en un instant de ce gardien spectaculaire stoppant tir sur tir. Comment ne pas y voir un clin d’œil appuyé à Zizinho, le gardien de la Seleçao de 1950, bouc émissaire historique de la défaite du Maracana alors qu’un nul aurait suffi pour offrir son premier titre au Brésil, et qui fut le dernier gardien noir des Auriverde jusqu’à Dida. Le gardien, dernier rempart du temple, le seul à ne pas avoir droit à l’erreur sur le terrain. D’ailleurs, le père de Mauro ne répète-t-il pas : « Dans un match de football, tout le monde peut faire une erreur sauf le gardien de but » .

Plus qu’un film sur le football ou la junte militaire inique qui court des 60’s aux 80’s, L’année où mes parents sont partis en vacances évoque surtout l’absence et le déracinement. Il nous montre Mauro coincé entre son bonheur lié au parcours du Brésil et à la découverte de ses nouveaux amis (particulièrement son alter ego féminin Hanna), et l’attente fébrile de ses parents lui ayant promis de le récupérer pour la Coupe du Monde. Leur retard devient encore plus insoutenable lors des matchs de la Seleçao, qui même s’ils permettent d’une part de s’extraire de cette solitude sans fin, lui remémorent d’autre part la promesse qui lui a été faite.

Ce film rappelle enfin le Papa est en voyage d’affaires de Kusturica, où dans la Yougoslavie de 1952 un père est lui aussi absent à cause de ses aspirations rebelles, laissant sa famille derrière lui, loin du camp de travail où il est consigné. Pour ne pas inquiéter les enfants et alerter les voisins, on prétend que le paternel est en « voyage d’affaires » . Business ou vacance(s) des parents, deux mêmes façons finalement, dans l’ex-Yougoslavie comme au Brésil, de dealer avec ses propres peurs et celle de sa descendance…

Pablo René-Worms

L’année où mes parents sont partis en vacances de Cao Hamburger.

Argentine…Oups Brésil, 1h45.

Distr. Haut et court.

En salles depuis le 26 décembre 2007.

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