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Inter : Cœur de Pirate
Lassés de se faire pulvériser leur embarcation par les Gaulois, les Pirates d'Astérix, la série de Goscinny et Uderzo, finirent par se saborder eux-mêmes, trop sûrs de la défaite à venir et de sa douleur. C'est à peu près ce à quoi s'est livré l'Inter à l'approche de son huitième de finale retour face à Chelsea.
Cela fait trois années que l’Internazionale butte en huitièmes de finale de Ligue des Champions. Des échecs comme autant de procès en légitimité, pour un club quadruple champion en titre, accusé d’abus de faiblesse face à une concurrence anéantie, puis amoindrie par le Moggiopoli. Pour asseoir leur autorité et montrer qu’ils ne sont pas qu’un champion par défaut qui prospère sur une Serie A appauvrie, les Nerazzurri se doivent, à l’égal de leurs prédécesseurs Bianconeri ou Rossoneri, de toucher le toit de l’Europe.
Trop conscient de cette faille, Massimo Moratti ne paye pas royalement Mourinho pour remporter sept ou huit titres domestiques. Sa seule exigence a trait à la C1, absente d’Appiano Gentile depuis Helenio Herrera et son verrou. Depuis beaucoup trop longtemps pour un club qui dépense sans compter pour renouer avec sa gloire passée. Le match aller remporté face à Chelsea (2-1) avait généré un vent d’optimisme sur lequel pouvaient surfer les Nerazzurri. Autant tirer les Blues avait inquiété, autant cette victoire suggérait un aggiornamento européen de l’Inter, enfin compétitif dans un match à élimination directe face à un Grand d’Europe.
Mais l’Inter n’est pas un club comme un autre. Leaders incontestés de la Serie A, jamais aussi proches d’un quart de finale depuis quatre ans, les hommes de Mourinho devaient préparer leur match retour dans la sérénité. Deux semaines plus tard, ils se trouvent sous pression comme jamais, avec un Milan AC revenu à un petit point et surtout un vestiaire en état d’implosion.
[page]Mourinho et le management par le conflit
En laissant Samuel Eto’o sur le banc pendant deux matches et sans explication, au lendemain de la victoire face aux Blues, Mourinho a créé un premier malaise. Car Sir Samuel n’est pas du genre à se laisser faire et sa voix porte dans le vestiaire. L’autre protagoniste a un contentieux long comme le bras avec Mourinho. Mais la nouvelle affaire Balotelli a fait basculer l’Inter dans une atmosphère séditieuse, après un match nul décevant face au Genoa (0-0). Selon l’entourage du joueur, le jeune attaquant aurait été aligné alors qu’il se trouvait dans un état fiévreux. Démenti de Mourinho, feuilleton médiatique et Samuel Eto’o encore plus amer.
La nervosité qui a gagné l’effectif s’est exprimée vendredi par l’entrée fracassante de Sulley Muntari, expulsé après avoir passé deux petites minutes sur le terrain. Face à Catane, un adversaire contre lequel elle n’avait pas connu la défaite depuis 40 ans, l’Inter a perdu son premier match depuis trois mois, toutes compétitions confondues. Un revers n’est jamais le bienvenu, mais il a surtout mis en évidence l’usure mentale d’une équipe au cœur d’incessantes polémiques, souvent générées par les propos ou attitudes de son coach.
Mais que cherche Mourinho ? Mystère. En a-t-il déjà sa claque de l’Italie comme ses explosions incontrôlées le suggéreraient ? Ou sent-il à l’inverse que son équipe se trouve en péril dans le confort ? Qu’elle se montre plus saignante quand elle joue sur le fil du rasoir ? Crise de résultats, crise interne, le bulletin de santé interiste indique une équipe en souffrance. Le même type de commentaires sur la nervosité nerazzurra avaient point après la seconde période disputée à neuf face à la Sampdoria de Gênes suite aux expulsions de Samuel et Cordoba.
Depuis qu’elle a commencé à enfiler les championnats sans réussir rien de probant en Europe, l’Inter a souvent été comparée à l’Olympique lyonnais. Alors, le navire interiste va-t-il, malgré un climat plus hostile que jamais, imiter ses homologues français et accoster en quarts ? Ou alors se contenter de cette “maximum” du pirate d’Asterix, fataliste après une nouvelle mise à sac de son embarcation : « Non omnia possumus omnes » . Nous ne pouvons tous faire toutes choses. On voit mal cette phrase dans la bouche de Javier Zanetti. Encore moins dans celle de Mourinho.
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