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Giorgio Chiellini, la revanche du brave

Par Andrea Chazy
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Giorgio Chiellini, la revanche du brave

Capitaine de cette Nazionale championne de l’Euro 2020, Giorgio Chiellini a enfin attrapé ce titre majeur à l’échelle internationale qu’il lui manquait tant. À bientôt 37 ans, Giorgione peut désormais raccrocher les crampons quand il le souhaite : sa mission est d'ores et déjà accomplie.

Les multiples embrassades entre Giorgio Chiellini et Manuel Locatelli feront partie des images fortes de cet Euro 2020. En demi-finales face à l’Espagne, après le tir au but manqué du milieu de terrain de Sassuolo, Chiellini était resté près du gamin de 23 ans jusqu’à la délivrance avant de l’étreindre. Face aux Anglais, en finale, le vieux routier de Turin tout comme le néophyte d’Émilie-Romagne n’ont pas tiré. Mais ils se sont roulés par terre, ensemble, après l’arrêt de Gianluigi Donnarumma sur l’ultime tentative de Bukayo Saka. Pour Chiellini, la nuit est magique. À 36 ans bien tassés, cette victoire avec l’Italie n’est pas une consécration, mais une juste récompense pour un homme qui s’est longtemps battu pour l’obtenir.

Enfin roi

Si Giorgio est tout sauf un enfant gâté, il a plus que mérité de passer une nuit avec la Coupe d’Europe comme compagne d’un soir. Dans sa riche carrière, il a connu tous les bonheurs possibles dans la Botte en remportant la Serie A neuf fois d’affilée entre 2012 et 2020, cinq fois la Coupe d’Italie ou encore cinq fois la Supercoupe avec sa Juventus. Mais dès qu’il mettait un pied hors des frontières, tout volait en éclats. Avec les Bianconeri, il a perdu deux finales de Ligue des champions face au Barça et au Real, en 2015 et 2017. Avec la Nazionale, le destin était encore plus cruel avec lui. Il était un poil trop jeune pour faire partie du groupe de Marcello Lippi en 2006, et donc pour grimper sur le toit du monde avec Fabio Grosso et compagnie. Derrière, il a pris part à tous les échecs de l’une des périodes les plus sombres du football italien : deux quarts de finale en 2008 et en 2016, deux sorties au premier tour des Mondiaux sud-africain et brésilien en 2010 et 2014, une finale d’Euro perdue sur le score le plus large de l’histoire en 2012 face à l’Espagne et enfin, en point d’orgue, cette non-qualification à la Coupe du monde 2018, ce qui était une première depuis soixante ans. Ce succès à Wembley est pourtant tout sauf une revanche personnelle.

Et ce n’est pas un hasard qu’au coup de sifflet final, le soldat bianconero se soit fendu d’un message de patron à une nation qu’il a vu tant souffrir des déboires de cette Nazionale, mais également d’une période actuelle qui ne l’a pas épargnée avec la pandémie de Covid-19. Car après la bagarre vient le temps des excuses ou des hommages. Pour une fois avec le maillot azur, c’est le deuxième chemin qu’a emprunté « Gogogorilla » sur les réseaux sociaux : « Merci. À tous. Parce que dans cette incroyable aventure, nous vous avons tous amenés avec nous. Sous nos yeux, vous étiez là. Dans nos cœurs, vous étiez là. La douleur de ceux qui ont souffert, les difficultés de ceux qui ont été mis à genoux par la pandémie, la volonté de vivre à nouveau étaient présents aussi. Les visages des femmes, des hommes, des vieux, des jeunes, des enfants et de ceux qui nous ont sauvé la vie, les médecins, également. Vous nous avez poussés. Vous nous avez aidés. Vous avez chanté avec nous. Le résultat n’est qu’une partie du jeu, mais ce résultat, cette victoire, ces larmes de joie vous sont dédiés. Nous avons écrit l’histoire ! »

Lorsqu’il montait en phase offensive, Trezeguet se moquait de lui gentiment. À peine Chiellini passait le milieu de terrain que David lui disait : « Hey, tu sais quoi ? Vas-y, reste derrière. »

Baume sur les mains, Calciopoli et conseils de Trezeguet

N’empêche qu’il serait fier, l’adolescent qui descendait les rues de Livourne en Vespa à 16 ans. Peut-être surpris, aussi, du chemin parcouru. S’il s’était permis de refuser Arsenal et un pactole à cet âge-là, « une folie » assure-t-il aujourd’hui, Chiellini est finalement resté en Toscane jusqu’à ses 20 ans. C’est devant sa famille et ses amis du lycée qu’il se façonne, en troisième et deuxième divisions aux côtés de la légende locale Cristiano Lucarelli, et apprend de ses aînés cette malice qui lui permettra, dix-sept ans plus tard, de mener la barque italienne à bon port. « Mes premiers coéquipiers à Livourne me racontaient qu’à leur époque – il y a trente ans –, à chaque corner, ça s’écrasait les pieds, les gars se mettaient de l’huile ou du baume sur les mains pour ensuite toucher les visages adverses, nous racontait Chiellini en février dernier. (…) Toucher souvent l’adversaire par exemple, c’est lui faire comprendre que tu es là. Tu l’empêches de faire certains mouvements, tu l’embêtes. »

Mais de là à devenir un immense champion reconnu par ses pairs, il y a encore un gouffre. C’est véritablement en 2004, en rejoignant la Juve, que Chiellini va petit à petit faire le saut qualitatif nécessaire. Lorsqu’il débarque dans le Piémont, le jeune latéral gauche de Livourne a les jambes qui claquent et certainement pas l’assurance qui le caractérise aujourd’hui. Après un prêt à Florence, sa première vraie expérience dans l’élite italienne, il réintègre le groupe pro de la Juve en 2005 et commence à petit à petit à pointer le bout de son nez. Mais ce n’est pas facile, à tous les niveaux. En 2006, après le scandale du Calciopoli, la Juve de Didier Deschamps est reléguée administrativement en Serie B. Une année décisive pour Chiellini. « Cette année-là, ses pieds, c’était une catastrophe », rigole encore aujourd’hui Jean-Alain Boumsong. Dans l’antichambre de l’élite, l’ancienne tour de contrôle de l’AJ Auxerre évolue juste à côté de Chiellini dans un onze qui compte encore Pavel Nedvěd, Alessandro Del Piero, Gianluigi Buffon et surtout David Trezeguet. Si la Vieille Dame survole le championnat, ce n’est pas toujours simple d’évoluer dans un tel effectif rempli de champions et vice-champions du monde pour le jeune Giorgio. « Lorsqu’il montait en phase offensive, Trezeguet se moquait de lui gentiment, reprend Boumsong. À peine Chiellini passait le milieu de terrain que David lui disait : « Hey, tu sais quoi ? Vas-y, reste derrière. » Mais attention : Giorgio, c’est un guerrier. Il va mettre la tête là où les autres vont mettre le pied. »

Il faut toujours être vigilant, prévoir le pire. C’est le tarif réservé aux joueurs normaux comme moi… Je n’ai pas les qualités de fuoriclasse de Sergio Ramos ou Virgil van Dijk.

To be continued…

Là s’est sûrement faite la différence entre lui et les autres. Pendant plusieurs mois, Didier Deschamps fait venir un entraîneur spécifique pour Chiellini qui bosse ses gammes avant chaque début d’entraînement. Giorgio, lui, ne rechigne pas et s’exécute. DD a tout compris de lui, et finit même par le repositionner dans l’axe où il apprend d’abord de Boumsong, de Jonathan Zebina et même de Nicola Legrottaglie. Place désormais au Chiellini 2.0. « J’ai rapidement compris qu’il y avait un gap technique important entre ce que je pouvais faire et le très, très haut niveau des spécialistes du poste comme Gianluca Zambrotta ou Dani Alves, expliquait Chiellini. Dans l’axe, j’ai appris à rationaliser mes efforts : je ne courais plus autant, mais j’étais beaucoup plus efficace dans ce que je faisais.(…)Il faut toujours être vigilant, prévoir le pire. C’est le tarif réservé aux joueurs « normaux » comme moi… Je n’ai pas les qualités de fuoriclasse de Sergio Ramos ou Virgil van Dijk. »

Cette machine au long nez est lancée et ne va cesser d’évoluer : d’abord dans une défense à deux, ensuite surtout dans une défense à trois sous l’ère Conte qui va définitivement changer sa vie avec la fameuse « BBC » (Barzagli-Bonucci-Chiellini). Mais toujours avec la même flamme qui brûle en lui. De quoi faire dire à Chiellini une chose : « Le seul secret, c’est de bosser. L’entraînement est l’unique chose qui te permette de t’améliorer, d’être en phase avec ton époque. Il faut écouter, rester en alerte sur de potentielles nouvelles idées, bosser jour après jour, semaine après semaine, car je pense que c’est à force de faire les choses que tu deviens meilleur. Je n’aurai jamais le pied gauche de Messi, ça j’en suis sûr, mais je suis désormais capable de faire des conduites de balle que je n’aurais jamais imaginé pouvoir réussir à mes débuts. »

Lors de cet Euro 2020, Chiellini a pu faire l’étalage de tout ce qu’un défenseur moderne doit faire : avoir une complémentarité sans faille avec son acolyte Leonardo Bonucci, savoir monter avec le ballon, se montrer dur sur l’homme comme avec Romelu Lukaku ou Harry Kane, entrer dans la tête de Jordi Alba lors d’une séance de tirs au but et presque même buteur face à la Suisse avant de… sortir blessé. Au moment d’évoquer la fin de sa carrière, qui aurait pu retentir dans un stade vide, Chiellini l’avouait : « C’est clair que jouer sans public, ce n’est pas du football. C’est moche. Ça ne transmet pas d’émotion, rien. Mais c’est quand même mieux que rien. Il faut malheureusement s’adapter. En ce qui me concerne, si je finis sans public, ce sera comme ça… » Ce dimanche soir à Londres, il a soulevé un trophée devant plus de 60 000 spectateurs, et prouvé au monde que même sans avoir les qualités de Sergio Ramos ou de Virgil van Dijk, on pouvait devenir immense.

Dans cet article :
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Par Andrea Chazy

Propos de Giorgio Chiellini tirés du So Foot de février 2021 et Jean-Alain Boumsong recueillis par AC

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