Memphis, un feu Depay ?

Au moment de voir cet Euro 2024 débuter pour les Pays-Pays contre la Pologne, il semblait difficile de passer à côté du style « made in USA » de Memphis Depay. Bandeau blanc frappé du numéro 10 et de l’expression « Who cares », en référence à une question sur son nouveau look posée par un journaliste au cours de la préparation. « Qui s’en soucie ? Cela me va très bien et m’aide à transpirer, expliquait l’intéressé en mars dernier après un an d’absence en sélection. Ma copine aime ce bandeau. Incroyable, non ? C’est un nouveau look, et je me sens bien. Je réfléchis déjà à la couleur que je vais porter en Allemagne. » Si l’essentiel est effectivement que le Batave se sente bien dans sa peau, il n’empêche que les choses sérieuses vont débuter pour les Oranje dans cet Euro avec un huitième de finale à élimination directe contre une Roumanie sexy. Et c’est là que Depay, libéré par le contrat qui le liait avec l’Atlético de Madrid, est attendu au tournant.

À cinq buts du record national, et pourtant…

Quand il s’agit d’évoquer Memphis Depay sous le maillot des Pays-Bas, il est possible de voir le verre à moitié plein ou à moitié vide. Depuis l’Euro 2021 où les Néerlandais avaient capitulé dès les huitièmes de finale contre la Tchéquie (2-1), la sélection nationale n’est repartie bredouille qu’à 3 reprises sur 25 matchs lorsque Depay était sur le terrain : en quarts de finale du dernier Mondial face à l’Argentine (2-2, 4-3 TAB), au Stade de France contre l’équipe de France lors des qualifications pour l’Euro (4-0) et contre l’Allemagne en amical le 26 mars dernier (2-1). Avec 46 buts en 95 sélections soit 0,48 but par sélection, le rappeur à ses heures libres s’apprête à devenir ni plus ni moins que le plus grand buteur de sa nation devant Robin van Persie et ses 50 pions en 102 capes internationales. Dans ce prestigieux classement, le récent trentenaire met déjà dans son rétroviseur des chasseurs de buts comme Marco van Basten (58 sélections pour 24 buts marqués), Ruud van Nistelrooy (70/35), Patrick Kluivert (79/40) ou Jan-Klaas Huntelaar (76/42). Rien que ça…

Cependant, mis à part le triple Ballon d’or en 1988, 1989 et 1992, tous comptent en moyenne au moins un but toutes les deux sélections, ce qui n’est pas le cas de Depay. Cependant, comparer ces rendements est risqué : les matchs internationaux se sont multipliés ces dernières années et, en s’intéressant de près à ses 45 pions, Depay empile surtout les buts contre des équipes du rang du Gibraltar (5) ou du Monténégro (4), mais bafouille contre les nations championnes du monde (2 buts contre l’Allemagne en 6 confrontations, 1 seul contre la France en 7 rencontres). Alors, surcoté Memphis ?

« Je doute de voir Depay briller dans les années à venir »

Depuis 2013, l’ailier formé au PSV Eindhoven a connu plus de galères que de bons moments avec la sélection néerlandaise. Une troisième place au Mondial brésilien avec un statut de jeune promesse, mais surtout deux éliminations précoces successives lors des éliminatoires de l’Euro 2016 (derrière la Tchéquie, l’Islande et la Turquie) et de la Coupe du monde en Russie (France et Suède). Deux échecs cuisants qui font finalement un parallèle assez symptomatique avec le parcours individuel de Depay. « Marquer 50 buts en équipe nationale sans avoir gagné de trophée majeur, cela laisse un sentiment anecdotique, se permet de juger Chanot, qui a affronté Memphis avec le Luxembourg, match durant lequel le Néerlandais a planté un doublé. Il faudrait à Depay un match référence contre une grosse équipe dans un grand tournoi international pour être considéré comme un Van Persie ou un Kluivert. » Ça tombe bien, l’Euro n’est pas encore fini.

Cependant, ce qu’ont montré les hommes de Koeman ne prête pas à l’optimisme. Avec un collectif peu emballant, mais quelques beaux noms en défense, les Oranje peuvent-ils espérer mieux qu’une sortie de l’Euro par la petite porte contre la Roumanie ? « Défensivement, je les trouve moyen, pronostique Chanot. On sent que c’est lourd et vieillissant. La chance des Pays-Bas, c’est de se retrouver dans la partie de tableau de l’Angleterre et de l’Autriche. Maintenant, cela va être à Depay de guider son équipe. » Pour Depay, c’est l’heure de prendre ses responsabilités, avec ou sans bandana.