Espoirs et doutes à Pompey
Derrière Arsenal, Manchester Utd, Chelsea et Liverpool, il y a une équipe qui ne cesse d'engranger les points et de se rapprocher tout doucement du strapontin pour la Ligue des Champions. Cette équipe, c'est Portsmouth. Un club pas très glamour, mais qui enfile les victoires à l'extérieur comme Lorik Cana empile les jaunes.
Invaincus depuis onze rencontres, les hommes de Redknapp ne sont devancés par les Reds de Liverpool qu’à la différence de buts, même si les quintuples champions d’Europe comptent un match en moins. En fait, on serait même inquiets pour les coéquipiers de Gerrard s’il n’y avait pas cette Coupe d’Afrique des Nations en perspective, qui va amputer Pompey de ses meilleurs éléments.
A la base, Portsmouth, c’est une modeste ville côtière du Sud de l’Angleterre d’à peine 200 000 habitants, un peu glauque, éloignée de tout et à des heures de route de la capitale londonienne.
Une ville plus connue pour son port que pour ses rues commerçantes, et dont le club de foot joue en maillot dégueulasse. Pour résumer, Portsmouth, c’est Le Havre. Mais aujourd’hui, Portsmouth, c’est surtout le cinquième du championnat d’Angleterre, à égalité de points avec le grand Liverpool. Une place pourtant promise il y a peu aux Tottenham, Aston Villa, et autre Newcastle.
Au départ du championnat, on n’aurait effectivement pas misé lourd sur Portsmouth quand on connaît l’importance d’un début de saison réussi et son impact sur la suite de l’exercice.
L’ordinateur chargé d’organiser le calendrier de la Premier League 2007-2008 avait en effet réservé aux hommes de Redknapp les quatre gros au menu des six premières journées. Avec un bilan moyen mais pas catastrophique (deux défaites et deux points pris face à MU et Liverpool), Pompey a fait le dos rond avant d’appuyer franchement sur l’accélérateur, au point d’avoir remporté six matches consécutifs à l’extérieur.
Avec 19 points pris sur 27 possibles, Portsmouth est actuellement la meilleure équipe de Premier League hors de ses bases. Surtout, Pompey s’est imposé sur le terrain de ses rivaux à la course à la cinquième place : Newcastle, Blackburn, et Villa le week-end dernier.
Alors comment expliquer qu’une équipe composée d’anciens pensionnaires de Ligue 1 sur le retour, comme il en existe une bonne poignée Outre-Manche (Bolton, Newcastle etc.), squatte le haut du classement et titille les gros ? La tactique mise en place par Redknapp est simple : un 4-5-1 Ligue 1 style, qu’il justifie de la sorte : « Comme toutes les équipes du pays jouent en 4-4-2, ça nous fait un joueur de plus que les autres au milieu, et tout le monde sait que la bataille du milieu, c’est la clef du match. Le but est de passer le ballon au joueur qui est démarqué » . Une leçon de tactique, clairement. On comprend maintenant mieux pourquoi la Fédé anglaise préfère confier sa sélection aux étrangers.
Quoi qu’on en dise, ça fonctionne. Derrière, Sol Campbell colmate les brèches laissées entrouvertes par Distin et Noé Pamarot pendant que David James multiplie les miracles depuis que les tabloïds l’ont laissé tranquille pour s’en prendre à Robinson.
Au milieu, Papa Bouba Diop et Sean Davis ratissent alors que Sulley Muntari enchaîne les cacahuètes qui feraient de lui un type adulé en Bundesliga. Devant, Benjani se régale des offrandes de Niko Kranjcar et d’un John Utaka enfin régulier. Oui, Utaka, le mec autrefois capable d’enfiler deux quadruplés en deux matches avant d’hiberner pendant un trimestre est devenu capable d’être bon sur la durée. Malheureusement, à domicile, là où il faut faire le jeu, ça coince un peu. Pompey n’a glané que deux succès à Fratton Park en sept rencontres, dont le mémorable 7-4 face à Reading.
Aujourd’hui, Portsmouth parait le mieux placé pour concurrencer le Big Four. Mais aujourd’hui seulement. Dans un mois, un tiers de l’équipe-type s’envolera pour la CAN, pour en revenir blessé, comme souvent. Pire, Redknapp ne peut pas vraiment compter sur une élimination rapide de ses protégés qui font tous partie des plus grosses cylindrées du Continent Noir.
Le Nigeria de Kanu et d’Utaka a le profil d’un demi-finaliste en puissance, tout comme le Sénégal de Bouba Diop, et on voit mal Muntari et le Ghana se faire sortir avant la finale d’un tournoi qu’ils disputeront à domicile. Une véritable saignée qui pourrait réduire l’effectif professionnel de Pompey à quatorze joueurs seulement.
Pour éviter de faire du surplace au cœur de l’hiver, l’entraîneur anglais s’est donc mis en tête de recruter. « Il nous faut trois à quatre joueurs. C’est une nécessité parce que notre club n’a pas des jeunes aguerris de 19 à 20 ans qui auraient pu faire l’affaire. Je chercherai partout et si je trouve quelqu’un dans les divisions inférieures pouvant faire l’affaire, je le prendrai sans problèmes » .
On l’a compris, Redknapp a surtout besoin de quantitatif, davantage que de talent. C’est sûrement dans cette optique que Portsmouth a décidé de mettre à l’essai Fabrice Pancrate, si l’on en croît le Daily Mirror. Pourquoi pas ? Après tout, des mecs comme Distin, Benjani et Pamarot sont bien en train de titiller le Big Four…
Par Marc Hervez
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