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Danny Newton : « Vardy a un bouledogue qui ronge ses meubles »

Propos recueillis par Thomas Andrei
Danny Newton : « Vardy a un bouledogue qui ronge ses meubles »

La saison passée, quand Danny Newton ne travaillait pas à l’usine, il empilait les buts avec Tamworth, club de National League North, sixième échelon du football anglais. Il y a deux mois, à 26 ans, il est devenu footballeur professionnel à Stevenage, en D4. Si son destin rappelle une version alpha de celui de Jamie Vardy, ce n’est pas pour rien. Sa nouvelle vie, Danny la doit à la V9 Academy, école de football fondée par l’attaquant de Leicester qui a pour objectif de... trouver le nouveau Vardy. L’expérience s’est transformée en émission de télé, dont le premier épisode était diffusé le 16 septembre dernier sur Sky 1.

Comment se passe ton début de saison ?Je n’aurais pas pu espérer meilleurs débuts. Je craignais que ce soit difficile, mais je m’entraîne tous les jours, je suis plus regardant niveau fitness, donc moi aussi je suis meilleur. On joue plus au football, c’est moins direct. Je m’habitue à avoir plus la balle, à construire les actions. Avant, je jouais devant 500 personnes en moyenne, maintenant ça monte à 3000. Ça change. En pré-saison, je n’ai pas marqué. Je me posais des questions. Puis j’ai marqué pour mon premier match de championnat contre Newport. Je m’en souviendrai toujours. Il faisait très chaud, j’ai juste suivi une action en claquant la balle en lucarne. J’ai célébré et mon pied s’est bloqué dans une sorte de grille sous la pelouse, j’ai failli m’envoler, mais j’ai tenu debout.

Où as-tu grandi ?Je suis né à Liverpool, mais nous avons déménagé à Leicester quand j’avais deux ans parce que mon père avait un boulot de gardien de prison là-bas. On habitait à côté de la prison, avec ma grande sœur et ma mère qui gérait un club de gym. C’était là où ils mettaient tous les employés et leurs familles. Donc j’ai grandi avec les enfants de gardes. On avait un peu de gazon où on pouvait jouer au foot. J’avais toujours un ballon avec moi, je voulais déjà devenir pro. Ça m’a juste pris plus de temps qu’à d’autres.

Comment ça se fait ?Quand j’étais petit, j’étais à Leicester chez les jeunes. J’étais bon, mais ils ont fermé l’académie pour des problèmes d’argent. Quand je suis devenu semi-pro à 17 ans, toujours dans la région, à Hinckley United, des équipes comme Oldham ou Wolves se renseignaient souvent sur moi. J’avais un contrat, donc on ne m’a rien dit. Alors je suis allé à Nuneaton et ça m’a pris deux ans pour retrouver mon jeu. Depuis quatre ans, je marque un but tous les deux matchs. Je n’ai jamais eu d’agent, je n’ai jamais fait d’essai, je ne savais jamais si on m’observait. J’ai toujours pensé que j’étais bien au-dessus que la plupart des joueurs de ma division. Je marquais beaucoup plus. J’ai vu des gens marquer moitié moins de buts que moi devenir professionnel. Eux avaient des agents. Je pensais toujours que si j’étais assez bon, quelqu’un viendrait pour moi. Mais non. Et plus je vieillissais, moins ça semblait probable.

Tu as arrêté l’école à quel âge ? À 16 ans. D’abord, j’ai trimé à l’entrepôt de mon beau-père, puis j’ai fait un apprentissage en électrotechnique pendant quatre ans. Je suis devenu ingénieur de maintenance, pendant neuf ans. Je me levais à 6h30, je nourrissais mon chien, Archie, je me douchais, je montais dans ma Mégane et je conduisais 30 minutes jusqu’au travail. J’arrivais, je checkais si toutes les machines fonctionnaient. Dans la journée, si une avait un problème, c’est moi qui devais comprendre comment la réparer. C’était beaucoup de travail. Ça me plaisait, mais les jours où tu stresses et ne peux pas régler le problème, c’était plus difficile. La compagnie pour laquelle je bossais avant m’a viré.

Ça a eu un impact sur ton football ?J’ai mieux joué ces deux dernières années parce qu’on me traitait mieux au travail. Mon employeur précédent me traitait mal. Tout était de ma faute, pour eux. Ça me fatiguait, me stressait, ça mangeait tout mon temps et toute mon énergie. Nous étions 15 ingénieurs, c’était une grosse boîte. Je travaillais et les autres ne faisaient rien. J’étais bon et capable, mais on me traitait mal, alors que ça aurait dû être l’inverse. Les grosses corporations, c’est comme ça qu’ils traitent les gens.

Venant de Leicester, tu étais aux premières loges pour suivre l’aventure de Jamie Vardy. Tu pensais que tu pourrais faire comme lui ?Oui. Ça donnait de l’espoir à tout le monde. Vu qu’il joue pour l’Angleterre, il est allé au bout de son histoire. Grâce à lui, beaucoup d’équipes cherchent un nouveau Vardy.

Comment as-tu rejoint son académie ?Je jouais contre AFC Fylde. Ils étaient premiers. Ils n’arrêtaient pas de marquer, ils étaient invaincus. Ils payaient très bien leurs joueurs, à temps plein. J’ai fait un gros match. J’ai mis trois défenseurs sur la touche en me démenant. J’ai marqué le but de la victoire 1-0. En rentrant, je vois que V9 Academy me suit sur Twitter. Ils me demandaient d’envoyer un formulaire d’inscription. Je ne savais pas ce que c’était, je ne savais pas qu’ils étaient au match. J’ai un peu regardé et je l’ai fait. Quelques jours plus tard, on m’a appelé pour m’inviter à signer au stade de Leicester et rencontrer Vardy.

C’était comment de le rencontrer ?C’est un mec charmant. Les pieds sur terre. Juste unlad. Il m’a dit de continuer à m’entraîner dur. On est allés voir le premier épisode de l’émission ensemble. On a parlé de ses enfants, de nos chiens. J’ai un bulldog anglais et il a un bouledogue français. Le mien est un fainéant, on rigolait parce qu’ils font le même genre de choses. Le sien a rongé pas mal de meubles, le mien aussi.

C’était comment ton premier jour à la V9 ?C’était à l’Etihad. Déjà, c’est une expérience, les meilleures installations possibles. Ils nous ont fait faire une visite. La double session du lundi, c’était dur. Le lendemain, on a fait une opposition, tout le monde avait les jambes lourdes et s’inquiétait de ne pas pouvoir être prêt pour le match test du vendredi. Puis le mercredi, on a fait des bains, des sessions de récupération de pointe. Le jeudi, on a fait plus light et ça a marché. On a aussi eu un psychologue. Le vendredi, pour le match, il y avait des scouts. Les joueurs étaient nerveux, ils avaient peur de n’obtenir aucun résultat.

Les autres mecs étaient comment ?Il y avait de tout. Au bout de seulement cinq jours, on ne voulait pas se quitter. J’avais déjà joué avec l’un d’entre eux à Tamworth, Darell. Il sera dans le premier épisode. Un milieu offensif, il entraîne des jeunes en plus du foot. C’était peut-être le meilleur. Il y avait aussi un prof de fitness, un plombier, un instituteur.

Stevenage t’a contacté quand ?Le lundi après le test, V9 m’a envoyé un message pour me dire qu’ils étaient intéressés. Ils m’ont appelé, j’y suis allé, j’ai parlé au manager et j’ai signé quasiment dans la foulée. Ma copine travaille toujours à Leicester, alors on a déménagé au milieu, à Northampton. On est à une heure du travail tous les deux.

C’était comment de démissionner ?Je pensais pouvoir leur donner une semaine de préavis. Mais quand j’ai signé à Stevenage, ils m’ont dit que je commençais directement. J’ai dû aller à l’usine et dire que je partais. Mon patron a été génial. « C’est ce que tu as toujours voulu faire. Ça nous laisse dans une situation compliquée, mais on ne peut pas t’en vouloir. Fonce ! » Je disais au revoir à tout le monde sans avoir totalement réalisé que je partais, ce qui était en train d’arriver. Il doit y avoir 70 employés, j’ai serré la main à tout le monde. Je me suis excusé auprès du grand patron. Ils me disaient de ne pas les oublier et de passer les voir. Je n’ai pas encore eu le temps, mais la prochaine fois, j’irai.

Comment ton entourage a vécu cette nouvelle vie ?Mon père vient à tous les matchs. Ce qu’il a toujours fait. Il est aux anges. La dernière fois il m’a demandé si je pensais que j’avais fait le bon choix, de quitter mon boulot, etc. Il m’a demandé si c’était dur d’aller au boulot. Je lui ai dit que j’avais l’impression de ne même pas avoir de boulot. J’ai juste l’impression de me lever pour aller jouer au foot.

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