- Ligue Europa
- Barrages retours
- Athletic Bilbao/MŠK Žilina
1956, le premier flirt européen de l’Athletic
Ce jeudi, l'Athletic Bilbao n'espère qu'une victoire pour éliminer les modestes Slovaques de Žilina pour atteindre la phase de groupes de la Ligue Europa. Une Europe à laquelle les Leones ont pris goût depuis 1956 et une épopée qui les a menés jusqu'à Manchester.
Plus qu’un statut social, l’Athletic Bilbao partage avec le Real Madrid et le FC Barcelone le titre honorifique de seule équipe n’ayant jamais connu la descente. Depuis désormais 84 ans, le fanion des Leones se trimbale avec cette fierté sur les pelouses de Liga. Et d’Europe. Forts de leurs huit titres de champions d’Espagne et de leurs vingt-trois Copas del Rey, les Basques voyagent à travers les contrées continentales. Leurs premiers déplacements remontent à l’année 1956, soit quelques mois après leur sixième Liga. Pour leur premier rendez-vous avec la grande Coupe d’Europe, ils s’avancent dans l’inconnu. Seul leur entraîneur, l’ancien Blaugrana Ferdinand Daucik, renvoie à un nom familier des amateurs de football. Le reste de l’équipe se compose essentiellement de jeunes promesses de la cantera et de valeurs sûres du football régional. Pour sûr, l’époque de la « Segunda Delantera Historica » – la « seconde attaque historique » en VF – est bien achevée et laisse place à un nouveau cycle vertueux de l’Athletic. Car, pour leur première épopée continentale, ces jeunes lions vont épater le Vieux Continent, le señor Puskás et, même, Manchester United.
« Même le pape nous connaît ! »
Le premier arrêt européen des Basques remonte pourtant à juillet de la même année. La Coupe latine, qui regroupe les champions d’Italie, d’Espagne, de France et du Portugal, accueille pour sa finale le Milan AC et l’Athletic Bilbao. De cette rencontre, perdue 3-1 par les représentants espagnols, la mémoire collective ne se rappelle que de l’avant-match. Reçus par le pape Pie XXII, les Leones en gardent un souvenir éternel qui vit toujours aujourd’hui à travers une plaque commémorative de San Mamés : « Même le pape nous connaît ! » Plus que le big boss de l’église catholique, ce sont désormais de nombreux clubs européens qui connaissent les Rojiblancos. Le premier répond au nom de FC Porto. À l’occasion du seizième de finale aller de la Coupe d’Europe, les hommes de Daucik ne se ratent pas et remportent leur premier succès. « Toute l’équipe a fait le match qu’elle devait faire, assure El Correo, journal et institution régionale. Dès l’entame, l’équipe respecte sa stratégie : un marquage strict et d’homme à homme. » Ce succès 1-2 dans la besace est validé six jours plus tard par une nouvelle victoire 3-2 lors du retour à San Mamés.
Deux mois de trêve continentale plus tard, c’est au tour du terrible Honved de défier l’Athletic Bilbao. Club hongrois mythique, il regorge alors des plus grands talents nationaux, tels Puskás, Budai, Kocsis ou Czibor. Une force de frappe qui se heurte à la solidité locale. El Correo, toujours : « Si la caractéristique de l’équipe hongroise est l’offensive, on comprendra aisément que les forcer à ne marquer que deux buts est un exploit. » Forts de leur succès 3-2, les Basques pensent se rendre à Budapest en position de force. Soubresaut politique oblige, le match est finalement déplacé à la dernière minute à Bruxelles, l’armée soviétique étant en train d’envahir la capitale de Hongrie. Encore une fois, l’exploit répond présent : « Une nouvelle fois, la glorieuse histoire de notre équipe se répète, entame le journal local. L’Athletic Bilbao a décroché une victoire résonnante et transcendante : éliminer Honved, « la meilleure équipe du monde » comme la qualifie tout le continent, de la Coupe d’Europe. » Grâce au nul 3-3, les Rojiblancos passent un nouveau tour et s’avancent, remplis d’espoir, en quarts de finale.
Terrain enneigé et Old Trafford fermé
Pour le premier quart de finale de son histoire, l’Athletic Bilbao doit se coltiner un monstre : Manchester United. Plus que leur légendaire coach, Matt Busby, les Red Devils affichent l’une des plus belles escouades de leur histoire. Le 16 janvier 1957, c’est un San Mamés enneigé qui accueille les 22 acteurs de ce choc. Malgré un terrain nappé de blanc et une visibilité ridicule, les Basques prennent le meilleur départ et mènent déjà 3-0 à la mi-temps. Sentant l’exploit proche, la Cathédrale pousse ses oisillons et espère contrer un retour des visiteurs. Au final, la partie se solde sur un fantastique 5-3 aux perspectives alléchantes. « Ce résultat montre que les deux équipes ont joué avec un sentiment commun de ce que doit être un football meilleur » , s’enflamme le chroniqueur sportif du Correo. Reste désormais le plus ardu : contenir Old Trafford. Dès leur atterrissage à Manchester, la première bonne nouvelle tombe. L’enceinte des Red Devils étant en travaux, c’est au stade de Maine Road, propriété des rivaux de City, que se décidera la rencontre. Devant 70 000 fans, l’Athletic fait bonne figure et conserve son espoir de qualification jusqu’aux ultimes instants. Le moment choisi par Berry pour crucifier son monde et offrir un succès 3-0 aux siens. En 2012, l’Athletic de Bielsa a enfin rendu la monnaie de sa pièce à United.
Par Robin Delorme