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La France de Franck Ribéry
Si Franck Ribéry arrive aujourd’hui seul à Valenciennes, il se pourrait qu’il se retrouve également seul d’ici un mois. Au choix, avec un finish à la Anelka, la tête cagoulée dans un aéroport lointain. Ou à la Zizou, le portrait recouvrant l’Arc de triomphe. Dans les deux cas, le visage de l’équipe de France à l’Euro sera probablement celui de Ribéry. Pour le moment, les deux sont imprévisibles.
L’Euro français dépendra grandement des prestations de son fuoriclasse munichois. À seulement 24 ans, Karim Benzema a le droit à l’erreur. Ribéry en a 29. L’âge de Zizou quand il marqua cette divine reprise à Glasgow. L’âge de Platini lors de l’Euro 84. L’âge pour devenir grand. Le défi est toujours le même pour le grand frère de la génération 87 : s’adapter au collectif qui se met progressivement en place, tout en s’imposant comme le leader technique de cette équipe.
4-2-3-1 ou 4-3-3, du sur-mesure pour Ribéry Dans les deux systèmes les plus utilisés par Blanc depuis un an, Ribéry a toujours occupé le flanc gauche, son poste au Bayern. Tout comme l’axe pour Benzema, le poste lui semble réservé. La question concerne ainsi plutôt l’interprétation de son rôle d’ailier/attaquant gauche que sa présence. Dans les phases de contre-attaque qu’a pu proposer, par exemple, le match amical contre l’Allemagne (4-2-3-1 ou 4-3-3 selon la position de Nasri), le rôle du Munichois est loin d’être un problème : courir, prendre la profondeur, jouer à l’instinct. Version 2K6. Un système qui avait permis aux Bleus de se projeter rapidement vers l’avant à Brême, et qui leur allait très bien, puisqu’ils se retrouvaient débarrassés d’une construction du jeu jusque-là souvent gênante.
Dans ces systèmes, nous connaissons déjà les débordements-centres meurtriers du Boulonnais. Mais face à une équipe joueuse, Ribéry est également une arme fatale pour casser le pressing adverse et soulager l’effort collectif, comme il l’a brillamment montré face au Real à l’Allianz Arena (en première période). D’autre part, en perçant dans l’axe, Franck est capable d’ouvrir l’aile à Clichy (ou Evra) et de combiner avec Benzema, qui raffole de ces petits dézonages à gauche. Le côté gauche gagne en fluidité, et en explosivité. Enfin, en anglais, suédois et même en ukrainien, « Ribéry » se traduit par : « Ton milieu droit va devoir défendre. » Soit Sebastian Larsson, le meilleur lieutenant de Zlatan, ou encore Walcott ou Milner. De quoi les garder occupés. Ribéry est une menace constante, ou du moins est-il perçu comme tel. Atout psychologique.
Ribéry, meneur de jeu ?
Mais, dans la poule, les Bleus seront plus souvent confrontés à ces longues phases de possession de balle si redoutées par leur animation offensive en manque de repères. Et qui dit animation offensive dit organisation, hiérarchie et donc meneur. Le terrain parlera, mais ce n’est un secret pour personne : Ribéry s’impose comme une évidence au poste officieux de leader technique de cette formation. Depuis 2006 et ses enjambées avec Zidane, Ribéry n’a jamais joué avec un joueur plus talentueux que lui. Robben ? À Munich, Kaiser Franck le fait passer pour un vulgaire Quaresma. Chauve, en plus. Les socios du Bernabéu ont même cru voir débarquer Iniesta en Ligue des champions. En plus puissant. Limiter Ribéry au rôle de dynamiteur des défenses à la Menez serait une erreur. Au Bayern, celui qui lève la tête, remise, décale, met en retrait et dynamise le jeu, c’est Ribéry. Plus qu’un 7. Il a la confiance de ses milieux et joue spontanément.
Jusque-là, Nasri s’était chargé du poste de meneur, avec plus (deuxième mi-temps en Allemagne) ou moins (première mi-temps) de succès. Mais à City, Nasri joue plus souvent meneur excentré à gauche. En bleu, il a rarement le bon timing de passe et joue toujours trop dos au but pour un joueur censé ouvrir le jeu. Concernant Gourcuff, c’est carrément son niveau de jeu qui est excentré. Enfin, l’option Ben Arfa reste plausible. Alors, Ribéry meneur de jeu des Bleus ? Mettre Ribéry dans l’axe est impossible. Trop de pression, trop de changement, Franck doit se faire petit et surtout ne pas en faire trop. Mais c’est à lui que reviendra la tâche d’aller de l’avant. Conclusion, les Bleus vont devoir apprendre à se partager la mène et diversifier leurs armes, en espérant que le trio Ribéry-Nasri-Benzema trouve rapidement des automatismes. L’autre solution serait de revenir au 4-4-2, ce qui aurait pour mérite de clairement répartir les tâches par zone d’influence, Ribéry à gauche et Nasri à droite, et d’intégrer Benzema dans la construction. Mais bon, il faut pas rêver à voix haute non plus, hein.
D’un été à l’autre…
Ribéry et les Bleus, c’est l’histoire d’un coup de foudre. C’était l’été 2006. Un vrai summer love, pas un vulgaire spring break. La passion avait duré. Au soir d’un fameux 9 juillet, aux alentours d’une maudite 99e minute, l’équipe de France avait même failli le demander en mariage. Poteau. Depuis, l’amour s’est éteint. Le joueur déborde d’envie et a demandé pardon. Mais comme une femme blessée, la France ne s’est pas remise de la dernière rupture. Une distance s’est installée. En fait, elle réclame simplement la spontanéité des premiers baisers. Et lui cherche désespérément des signes de confiance et d’affection. Beaucoup de bêtises ont été dites sur Ribéry et le groupe France. Il est temps de laisser les grands joueurs à disposition de Laurent Blanc parler sur le terrain. À commencer par le plus grand d’entre eux ? Si lui le veut. Markus Kaufmann
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