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Supporters : la CNIL épingle de nouveau le PSG

Par Anthony Cerveaux
5 minutes
Supporters : la CNIL épingle de nouveau le PSG

La CNIL a de nouveau épinglé le PSG, lui intimant cette fois de respecter le champ d'application de ses délibérations. La commission, qui motive en détail sa mise en demeure, dénonce la prolongation d'exclusions de stade, décidées de façon discrétionnaire par le club parisien, qui a désormais un mois pour se mettre en conformité avec la loi.

Décidément, la CNIL ne lâche pas le PSG, peut-être encouragée par la récente décision du Conseil d’État de suspendre en urgence la mise en œuvre du fichier « STADE » , créé par un arrêté du ministère de l’Intérieur. Ce fichier automatisé qui avait pour but de collecter des données semblait avoir été confectionné sur mesure pour aider le club de la capitale à trier ses supporters, mais les juges de la haute cour ont estimé qu’il y avait « un doute sérieux sur (s)a légalité » . La CNIL non plus ne semble pas prête à laisser le PSG choisir ses supporters.

Des interdictions de stade prolongées

Ses récentes investigations ont donc permis de mettre en lumière des éléments que nous avions déjà publiés, à savoir la prolongation d’une interdiction administrative ou judiciaire de stade par le PSG une fois celle-ci terminée, et ce, quand bien même elle pouvait faire l’objet d’une procédure de contestation devant le tribunal administratif. Comme dans le cas de Mathieu, ce supporter parisien d’une trentaine d’années qui avait fait l’objet d’une interdiction administrative de stade (IAS) de 3 mois en février 2013 pour avoir porté une écharpe affichant la mention d’une association dissoute. Non content de cette sanction, le PSG avait prolongé cette IAS d’une interdiction supplémentaire de vente de 6 mois, motivée par un non-respect des conditions générales de vente du club. L’interdiction de stade de Mathieu a pourtant été cassée par le tribunal administratif plus d’un an et demi plus tard. Mais cette annulation ne lui a pas rendu les six mois où il a été tenu à l’écart du Parc des Princes sur seule décision du PSG.

Dans sa délibération du 30 janvier 2014, la CNIL avait bien autorisé la mise en œuvre d’un traitement automatisé de données ayant pour finalité l’exclusion de clients. Mais elle avait surtout réduit, comme nous l’avions rappelé, la constitution de ce fichier à quatre motifs : l’existence d’impayés, le non-respect des règles de billetterie, l’activité commerciale dans l’enceinte sportive et les paris sportifs. Soit des fondements tout autre que ceux relevant des mesures d’interdiction de stade prises par les autorités judiciaires ou administratives.

Un PSG « multi-récidiviste »

Or, une délégation de la CNIL exerçant un contrôle au siège social du PSG à l’automne dernier a pu constater que le club parisien « ne respecte pas le champ d’application des autorisations délivrées par la Commission » , tel qu’on peut le lire dans la décision de la présidente de la CNIL datée du 21 mai 2015, mais rendue publique aujourd’hui. En effet, les enquêteurs de la Commission ont découvert qu’une mesure administrative ou judiciaire entraînait « systématiquement, à l’issue de cette mesure d’interdiction une prolongation de l’exclusion de la personne concernée pour une durée librement fixée par le PSG Football » . Et toujours au moins équivalente à celle de la durée de l’interdiction de stade. Une pratique illégale selon la CNIL qui ne manque pas de rappeler que « la sanction des comportements pénalement répréhensibles et le maintien de l’ordre public sont des attributions régaliennes qui relèvent de la compétence exclusive des pouvoirs publics et des juridictions » . Une disposition que le PSG semble ignorer avec une certaine constance ces dernières années.

Pierre Barthélémy, avocat de nombreux supporters parisiens, qui a régulièrement interrogé la CNIL sur cette pratique, est satisfait « que la Commission considère ces plaintes comme particulièrement sérieuses » . De son côté, Cyril Dubois, qui a également déposé « plus d’une centaine de plaintes à ce sujet » , indique que « le PSG a désormais un mois, à compter du 21 mai, date de la mise en demeure, pour modifier ses conditions générales de vente afin de les mettre en conformité avec la loi et cesser de s’arroger lui-même le droit d’édicter des interdictions de stade. » Et l’avocat prévient : « Nous serons extrêmement vigilant ce délai passé car, avec le PSG, nous avons affaire à un multi-récidiviste. » Si le PSG suit les demandes de la CNIL, aucune suite ne sera donnée à la procédure. Dans le cas contraire, un rapporteur sera désigné qui proposera une sanction pour le club parisien. Si la sanction financière n’effraie guère les propriétaires qataris, l’image publique du PSG pourrait pâtir d’un tel affichage.

Le PSG va obtempérer… et poursuivre le tri de ses supporters

Contacté par So Foot, le club de la capitale a fait savoir qu’il allait « se mettre en conformité avec les demandes de la CNIL sans pour autant modifier la politique commerciale actuelle vis-à-vis des supporters considérés comme indésirables » . Il n’y a pas de « blacklist » assure-t-on du côté de la Porte d’Auteuil, mais « on entend continuer à choisir les gens qui viennent au stade » . Les avocats de supporters écartés pourraient alors poursuivre leur plainte sur le plan judiciaire. « Cette mise en demeure, explique maître Barthélémy, fondée sur des considérations de fait et de droit, constitue un élément fort au soutien des recours introduits devant le juge civil. Elle révèle non seulement l’existence d’une discrimination entre supporters, mais encore que le PSG se substitue au juge pour prononcer des interdictions de stade. »

Cyril Dubois en appelle aussi à la responsabilité politique : « Il est désormais plus que temps que la mairie de Paris se saisisse pleinement de ce sujet, contrôle davantage ce que fait le PSG dans des enceintes qui appartiennent quand même à la ville et mette en œuvre les conditions d’un véritable dialogue entre le club et ses supporters » . C’est le vœu de Nicolas Bonnet, président du groupe Communiste-Front de gauche au Conseil de Paris, déposé en mars dernier, mais qui demeure pour le moment un vœu pieu. Dans un communiqué, ce dernier « s’est félicité » du rappel à l’ordre de la CNIL et demande maintenant « une intervention ferme » de la mairie de Paris.

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