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Salvioni : « Évra et Tamazout avaient mis le feu contre Laval »

Propos recueillis par Valentin Pauluzzi
Salvioni : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Évra et Tamazout avaient mis le feu contre Laval<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Entraîneur ayant sillonné les divisions inférieures italiennes, Sandro Salvioni a fait un passage remarqué à l'OGC Nice de 2000 à 2002. À son actif, une promotion en Division 1 et le replacement d'un attaquant au poste d'arrière gauche, un certain Patrice Évra.

Juste pour nous situer, c’était comment le Nice italien ?Quand j’ai débarqué à l’été 2000, le Gym appartenait depuis déjà trois ans à Franco Sensi, alors président de la Roma, et qui a vendu le club à des entrepreneurs corses à 8 matchs de la fin de ma seconde saison, soit celle de la montée. À mon arrivée, il y avait des gars comme Bravo, Grassi, Marquet qui avaient eu des problèmes avec les supporters et qui ont donc juste fait le stage de pré-saison. J’ai pourtant tenté de les convaincre de rester, mais il n’y avait rien à faire. Le directeur général était Federico Pastorello qui est aussi agent de joueur. Jusqu’alors, je bossais avec son père à Parme depuis cinq ans en tant qu’entraîneur des U19 gialloblu. D’ailleurs, j’y coachais plusieurs de ses gars dont Ghidini et Verdi, qu’on a emmenés à Nice. J’ai fait aussi venir Cinetti que j’avais eu à la Pro Vasto en D4, mais à part lui qui était un garçon sympathique, ils ont tous eu un peu du mal. Évra faisait aussi partie de ces « Italiens » . Il arrivait de Monza en Serie B où il avait connu Pastorello qui était donc devenu son agent. J’avais demandé à ce dernier un attaquant petit et rapide comme je les aime, mais je n’avais jamais entendu parler de Patrice. Nous disputions un amical à Carros lorsqu’on s’est croisés pour la première fois, il me tend la main et me dit : « Enchanté, Patrice. » Je ne le voyais pas, car son visage était caché par la visière de sa casquette, je n’avais pas du tout aimé sa façon de se présenter, mais c’était un gamin de 19 ans très timide. Et il était comment comme attaquant ?Dès que je l’ai vu, j’ai dit à mon directeur sportif qu’il ferait un bon ailier gauche dans mon 4-4-2 ou 4-2-4. Il a joué 15 minutes durant cet amical, il était pas mal du tout, mais je le préférais sur le côté. Je lui en ai fait part, mais lui préférait évoluer avant-centre. J’ai insisté en lui parlant de ses qualités physiques, son habileté à passer son vis-à-vis, sa qualité de centre. Quand je bossais avec mes défenseurs, je l’invitais à participer aux exercices pour lui faire comprendre le travail de couverture d’un ailier quand son arrière se superpose. Rien à faire, il voulait être attaquant. Du coup, je l’envoyais avec la CFA où il occupait son poste de prédilection. Cela a duré une saison, il a été titulaire deux, trois fois en équipe une et a figuré cinq fois sur le banc. Son agent me demandait pourquoi je ne le convoquais pas, mais tant qu’Évra ne voulait pas apprendre à défendre…

J’insistais bien sur les erreurs qu’Évra faisait. Il ne comprenait pas pourquoi je ne le félicitais jamais sur ses points forts. Mais c’était pour le faire devenir un vrai joueur de foot. Jamais je n’ai voulu l’exalter.

Et l’année suivante ?Il était métamorphosé. Après deux jours de préparation, lors d’une course en montée où lui guidait le groupe, on s’est regardés avec mon préparateur physique et on s’est dit qu’il avait vraiment changé, qu’il était devenu plus humble, on en a même rigolé. Je pense que Pastorello l’a convaincu de m’écouter. Du coup, quand je l’appelais pour participer aux directives défensives, il répondait présent. Ce sont des séances importantes, car je veux toujours que mes latéraux et ailiers soient séparés de seulement 15/20 mètres pour bien combiner.

Et arrive cette première journée contre Laval.On gagnait 1-0, l’équipe jouait bien, Patrice était ailier gauche, le très bon Scotto derrière lui, lui aussi était un attaquant reconverti, mais plutôt latéral droit. On se fait égaliser vers la 60e, je décide alors de faire entrer Tamazout à la place de Cirilli, Scotto bascule à droite, Évra descend d’un cran et Tamazout se poste devant lui. Je ne te raconte pas ce qui s’est passé pendant une demi-heure, ils ont mis le feu ! C’est d’ailleurs le néo-entrant qui marque le but de la victoire. À la fin du match, Patrice vient me voir : « Coach, tu sais que je me suis éclaté ? » C’est là qu’il prend conscience de son nouveau poste ?Pas tout de suite. Le vendredi suivant, on effectue les mises en place tactiques pour le second match, au moment de distribuer les chasubles, je lui donne celui d’arrière gauche et lui commence à rouspéter, alors je lui montre la sortie et c’est seulement à ce moment-là qu’il se résigne. Je lui ai dit : « Dimanche, vous avez fait une superbe demi-heure, Tamazout et toi, vous avez contraint Laval à rester dans sa moitié de terrain, tu as très bien défendu et là tu ne veux pas jouer à ce poste ? » Prise de conscience définitive, il finit meilleur latéral gauche de Ligue 2. On imagine que vous l’avez fait bosser comme un malade non ?On a énormément travaillé tactiquement, car je veux des joueurs qui me garantissent certaines tâches, surtout avec mon style de jeu très entreprenant. Il était très à l’écoute, mais il n’y a pas eu besoin de séances personnelles. Je faisais filmer toutes nos rencontres pour avoir une vue d’ensemble afin de corriger les erreurs de positionnement. J’insistais bien sur celles qu’il faisait, à tel point qu’il ne comprenait pas pourquoi je ne le félicitais jamais concernant ses points forts. Mais c’était pour le faire devenir un vrai joueur de foot. Jamais je n’ai voulu l’exalter. À la fin de l’année, il a compris et je lui ai dit : « Maintenant, tu es devenu un footballeur, tu peux t’en aller. »

Et il n’a plus rejoué ailier ?Plus jamais, même pas une minute. Cela me rappelle le cas de Kelly Berville, un arrière gauche physique, mais qui ne levait pas la tête. Le match de la promotion contre Istres, je l’ai fait jouer dans l’axe, car Cobos et Angan étaient absents, il n’était pourtant pas convaincu. Le Mans a perdu à domicile et cela a officialisé notre montée. Pendant les festivités, j’ai senti un gars qui me tirait le maillot, je me retourne et c’était Berville qui me lance : « Je me suis amusé comme un fou ! » « Il suffit de faire ce que je te dis, espèce d’âne ! » lui ai-je répondu.

Je pense qu’Évra a un avenir au poste de défenseur gauche dans une défense à 3, à la Chiellini. Il est très bon de la tête, se débrouille bien dans les un-contre-un. Ça peut être une bonne idée.

Les autres joueurs clés de cette épopée ?Pitau, Meslin et Tamazout furent les seules recrues du mercato estival, les autres venaient pratiquement tous de la CFA. Je me souviens de Mané et Camara, des gars qui se sont perdus par la suite, car moi, j’étais un vrai marteau sur et hors du terrain, je ne les lâchais pas. Et puis l’Argentin Rodríguez, les journalistes m’avaient descendu, car c’était un 10 et je le faisais jouer et courir sur le côté la première saison. La seconde, je l’ai mis avec Pitau au milieu de terrain, et ils ont fait un championnat extraordinaire.
Quelle idée vous êtes-vous fait du caractère d’Évra ?Son expérience italienne l’a aidé à mûrir, surtout à Marsala au fond de la Sicile. Quand il est arrivé chez nous, il n’avait pas une grosse personnalité, mais quand vous jouez, c’est un aspect que vous développez, vous ressentez l’estime des coéquipiers, du coach, du club. Et puis, il a la culture de la gagne, Deschamps l’a beaucoup influencé de ce point de vue-là à Monaco.
Quel type de rapports entretenez-vous avec lui aujourd’hui ?On s’envoie volontiers quelques messages. D’ailleurs, je dois l’appeler pour lui demander son maillot, car un ami insiste pour l’avoir, mais je ne suis pas du genre à casser les pieds, je préfère le laisser tranquille. Bref, quand il a fait le doublé championnat-coupe par exemple, il m’a écrit qu’il ferait de moi son adjoint quand il sera coach, je lui ai répondu : « Fais gaffe, je pourrais te piquer ta place ! » (rires) De l’extérieur, que pensez-vous du rapport d’Évra avec son pays ?Je crois que les Français ne se rendent pas compte de la chance qu’ils ont de l’avoir, peu de joueurs ont sa culture de la gagne et du travail. Il peut aider ses coéquipiers de façon positive. Ça me rappelle justement mon arrivée à Nice. Il y avait le capitaine Tatarian qui avait une énorme personnalité, mais il l’utilisait négativement, il mettait de l’appréhension aux autres gars qui tremblaient à l’idée de lui faire une passe. Après avoir bien discuté avec lui, j’ai dû m’en séparer, il a filé à Créteil et quand on s’est recroisés, il est venu me féliciter pour notre façon de jouer. Évra, c’est tout le contraire, il utilise cet aspect de son caractère à bon escient.
Il vient d’annoncer qu’il voudrait jouer tard comme Zanetti ou Maldini. En est-il capable ?J’ai lu dans les journaux que la Juve l’a prolongé pour le faire jouer éventuellement dans le rôle de Chiellini, à gauche dans une défense à trois. Je pense qu’il a un avenir à ce poste-là, il est très bon de la tête, se débrouille bien dans les un-contre-un, ça peut être une bonne idée.

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