Premier League : Chelsea, bémol
Frank Lampard boit du petit lait. Alors que Manchester United s’est pris les pieds dans le tapis à Burnley mercredi (0-1) et que Liverpool avait raté son entrée en scène dimanche dernier à Tottenham (1-2), Chelsea engrange et prend de l’avance : « Pour moi, la défaite d’United à Burnley n’était pas complètement une surprise. Je savais que ça serait un match compliqué pour eux. On a un peu d’avance sur eux et Liverpool, c’est une bonne chose » . Et le milieu de terrain des Blues d’expliquer les motifs de sa confiance : « Ils ont perdu Cristiano Ronaldo. Le nombre de fois où j’ai allumé ma télé pour voir ce gars marquer le but de la victoire, c’était incroyable. C’est notre gros plus cette année : nous, nous n’avons pas perdu nos meilleurs joueurs » .
Dit comme ça, ces arguments massue sont imparables. Mais on ne saurait trop conseiller à l’international anglais de mieux regarder le contenu des prestations de son équipe car l’ensemble est loin d’être parfait. Et à la place de Carlo Ancelotti, on ne tarderait pas à effectuer les bons ajustements sous peine de se compliquer la vie quand les oppositions auront une autre allure qu’un Hull en goguette (2-1) ou un Sunderland limité (3-1). D’ailleurs, en ces deux occasions, Chelsea était mené et s’en est sorti limite-limite. Et ce n’est pas un hasard…
Lampard n’est pas à sa place
La dernier road-trip à Sunderland nous renseigne sur les maux qui menacent les Blues. Ancelotti, désireux d’évoluer avec un milieu en diamant, avait aligné Deco, Ballack, Lampard et Essien. Soit autant de joueurs totalement axiaux, même si Essien est capable à l’occasion de exiler sur le flanc droit. Résultat : chez les nouveaux partenaires de Lorik Cana, le jeu londonien a manqué de largeur, chaque milieu ayant tendance à aller dans l’axe. Du mal, en la circonstance. L’autre souci est venu du positionnement spécifique de Frank Lampard lui-même. Ancelotti veut en faire la pointe de son diamant. Le coach italien s’appuie sans doute sur les stats ahurissantes du milieu de terrain : 130 pions en 426 matches de Premier League joués avec Chelsea. Lu comme ça, la conclusion est rapide : ce gars-là fait un malheur aux-avant-postes. Mais ce bon Carlo aurait dû mieux regarder les caractéristiques de son vice-capitaine.
Si « Lamps » trouve la lumière aussi régulièrement, c’est grâce à sa frappe de balle phénoménale et son flair sur les seconds ballons, quand il arrive… lancé ! Et pour tout cela, l’Anglais a besoin de partir de loin et surtout d’avoir le jeu face à lui. Joueur roulant au diésel dépourvu d’une grosse capacité de démarrage et d’accélération, Lampard présente les mêmes limites qu’un Juninho : ils ne peuvent pas jouer dos au but. Or, et c’est tout le problème du dispositif d’Ancelotti, en étant à la pointe du diamant, le meneur des Blues est trop souvent arrêté et dos à la zone de vérité. En l’état, Chelsea perd une bonne partie de sa force de frappe. Et les Blues galèrent…
A quand le retour au 4-3-3 ?
Au fond, et c’est tout le problème du club londonien depuis maintenant deux ans, Chelsea n’arrivent pas à rompre avec l’héritage de José Mourinho. Et c’est là le paradoxe des Blues qui se sont appliqués à ne pas changer en profondeur l’effectif avec les mêmes hommes forts qu’à l’époque du Portugais. Oui, rompre le système avec les mêmes joueurs, une bien curieuse idée. Car, les tauliers bleus sont profilés pour évoluer en 4-3-3 et rien qu’en 4-3-3, autrement dit un back-four, un milieu de trois récupérateurs-relayeurs, deux faux ailiers et une pointe, une seule. Bizarrement, ce système ressemble assez à l’arbre de Noël de l’AC Milan de l’ère Ancelotti. Alors quoi ? L’ex-entraîneur rossonero refuserait-il ce schéma pour une simple question de rupture avec l’héritage mourinhien passé ? Non, Carlo, en bon rital, est pragmatique quand il s‘agit de ballon rond.
Si le technicien des Blues refuse de reprendre sa recette lombarde, c’est qu’il estime que sans un Pirlo, ça ne peut pas marcher. Selon lui, Obi Mikel n’a pas la relance du maître à jouer italien et la discipline tactique d’Essien lui semble douteuse. Pas faux. Mais en attendant, même sans une rampe de lancement à la Pirlo, il semble que le milieu à trois reste une meilleure option que le fameux diamant. De la capacité d’Ancelotti à résoudre cette énigme dépend peut-être le sort du championnat.
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